(Ottawa) Les libéraux et les néo-démocrates se sont engagés à hauts cris à empêcher les conservateurs de bloquer leur projet de loi sur l’assurance médicaments à la Chambre des communes lundi – même si les deux partis disposent de suffisamment de voix pour contourner l’opposition.

Le chef néo-démocrate, Jagmeet Singh, et le ministre fédéral de la Santé, Mark Holland, ont prononcé des discours passionnés sur la liberté des femmes et l’accès à la planification des naissances.

Ils ont accusé les conservateurs de tenter de refuser cet accès aux Canadiennes.

Les deux partis avaient difficilement négocié le libellé de ce projet de loi, dans le cadre d’un pacte politique visant à empêcher des élections anticipées avant 2025. Libéraux et néo-démocrates ont élaboré ensemble un programme qui couvrirait une sélection de médicaments et de fournitures pour la contraception et contre le diabète.

Le porte-parole conservateur en matière de santé, Stephen Ellis, a déposé le mois dernier un amendement au projet de loi qui, s’il était adopté, invaliderait essentiellement la loi proposée.

M. Ellis soutient que le programme tel que proposé ne fera rien pour résoudre la crise des soins de santé au pays. Il estime que ce programme offrira plutôt aux Canadiens un régime d’assurance médicaments de qualité inférieure, qui offre moins de couverture, coûte plus cher et crée une très lourde bureaucratie.

L’amendement conservateur devrait toutefois être facilement rejeté par les députés libéraux et néo-démocrates.

« Le gouvernement nous aidera-t-il à empêcher les conservateurs de refuser à 9 millions de Canadiens la gratuité des contraceptifs ? », a demandé M. Singh au ministre Holland, lundi, lors d’un échange à la période de questions aux Communes.

M. Holland a répondu en accusant les conservateurs de faire obstacle aux libertés individuelles des femmes au Canada. « Je dirai au Parti conservateur du Canada : arrêtez de bloquer [ce projet de loi] afin que les femmes puissent obtenir les aides à la reproduction dont elles ont besoin pour contrôler leur avenir reproductif », a déclaré le ministre de la Santé.

Les conservateurs n’ont pas répondu à une demande de commentaires.

Pas de menace pour le projet de loi

Même si les libéraux et les néo-démocrates ont tenté de susciter des craintes quant aux projets des conservateurs, la manière dont l’opposition officielle votera ne devrait pas modifier la trajectoire du projet de loi.

Le langage musclé a commencé en fin de semaine, lorsque M. Singh a écrit une lettre au chef conservateur, Pierre Poilievre, pour lui demander de retirer la motion, invoquant la crise du coût de la vie.

« Près d’un Canadien sur quatre a déclaré avoir fractionné ses pilules, sauté des doses ou décidé de ne pas faire exécuter ou renouveler des médicaments sur ordonnance essentiels en raison de leur coût élevé », a-t-il écrit.

Dans ses publications sur les réseaux sociaux, M. Singh a présenté la lettre comme un ultimatum. « Il peut retirer [la motion] ou nous l’arrêterons », a écrit M. Singh sur le média social X lundi midi.

Le porte-parole néo-démocrate en matière de santé, Peter Julian, a présenté lundi une motion à la Chambre pour demander aux conservateurs de retirer cet amendement, mais les conservateurs ont refusé.

Les conservateurs soutiennent que la grande majorité des Canadiens bénéficient déjà d’une certaine forme d’assurance médicaments. Le député Ellis a également critiqué la liste des médicaments qui seraient couverts par le programme et il a accusé le gouvernement de n’avoir consulté personne, à l’exception des néo-démocrates, sur les médicaments qui devraient être inclus.

« [La liste] regorge de médicaments plus anciens, sans frais pour les pharmaciens », soutenait-il lors des premières étapes du débat à la Chambre le mois dernier.

Les libéraux ont proposé lundi de limiter la durée du débat à cinq heures avant que la Chambre ne vote sur le projet de loi pour la première fois plus tard cette semaine.

Le Bloc québécois n’est pas contre une assurance médicaments étatique, mais il plaide que le Québec dispose déjà d’un programme et que l’Assemblée nationale demande à Ottawa un droit de retrait du régime fédéral avec pleine compensation financière.