(Montréal) La mort tragique de la sergente de la Sûreté du Québec (SQ) Maureen Breau, tuée dans l’exercice de ses fonctions en mars 2023, hante toujours des membres de sa famille, mais ceux-ci espèrent que cet évènement entraînera un changement afin qu’aucune autre famille ne vive ce qu’ils ont vécu.

C’est ce qu’a témoigné notamment le conjoint de la policière, Daniel Sanscartier, par l’entremise d’une lettre lue mercredi lors de l’enquête de la coroner sur le meurtre de la policière.

L’enquête porte sur le décès de la sergente Breau et d’Isaac Brouillard Lessard, un homme de 35 ans atteint d’un trouble schizo-affectif qui a poignardé la policière et un autre agent lors d’une tentative d’arrestation avant d’être abattu par deux de leurs collègues.

PHOTO COURTOISIE/LA PRESSE CANADIENNE

La policière Maureen Breau

« Je sais qu’aucune recommandation à venir ne me ramènera ma conjointe, aucune recommandation ne sera satisfaisante à mes yeux pour chasser la tristesse qui m’habite tous les jours », a affirmé M. Sanscartier, conjoint de Mme Breau depuis deux décennies, dans une lettre lue par une amie de la famille.

M. Sanscartier a soutenu que les recommandations de la coroner auront un impact considérable sur la façon dont les cas de santé mentale seront traités à l’avenir.

L’enquête de la coroner Géhane Kamel a fait état de nombreuses lacunes dans l’évaluation et la supervision de Brouillard Lessard, qui avait été déclaré non criminellement responsable pour cause de maladie mentale à cinq reprises pour des infractions en 2014 et 2018. Il avait passé un an dans un hôpital psychiatrique de Montréal et avait été suivi par la Commission d’examen des troubles mentaux du Québec depuis 2014.

Brouillard Lessard avait récemment été soumis à des conditions imposées par un tribunal en avril 2022, après avoir obtenu une absolution inconditionnelle et une probation pour une agression violente contre un concierge d’appartement.

Trois jours avant l’attaque au couteau, les parents de Brouillard Lessard avaient tenté de convaincre la police de l’arrêter, invoquant la détérioration de sa santé mentale. Les parents ont déclaré qu’ils se sentaient abandonnés lorsque la police s’est rendue dans son appartement et ont conclu qu’ils n’avaient aucune raison de l’hospitaliser.

M. Sanscartier, un policier avec 24 ans d’expérience, a évoqué avoir vu les appels en matière de santé mentale devenir plus fréquents au cours de sa carrière. Il a déclaré qu’il fallait un meilleur suivi et un meilleur encadrement des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, ainsi qu’une meilleure communication entre les responsables de la santé et la police.

« Une sentence à vie »

Selon M. Sanscartier, « l’évènement du 27 mars 2023 était prévisible et aurait pu être évité ». En écoutant les témoignages au cours de l’enquête qui a duré des semaines, ses « émotions ont virevolté, passant par la tristesse, l’incompréhension et la colère », a-t-il mentionné.

M. Sanscartier a dit se souvenir de sa défunte conjointe comme d’une mère dévouée de deux enfants qui l’a immédiatement conquis par son charme, sa gentillesse et sa joie de vivre.

« Quand vous rentiez dans son cercle d’amis, vous appreniez à connaître une femme généreuse, attentionnée et à l’écoute », a-t-il souligné.

La sergente Breau n’était qu’à quelques quarts de patrouille avant de commencer un nouveau travail d’enquêteuse sur les crimes majeurs.

Sa mère, Lorette, a déclaré à l’enquête que la perte de sa fille aînée était « une sentence à vie que nous devons affronter chaque jour », ajoutant qu’elle souffre d’anxiété et d’autres problèmes.

Une partie de nous est morte avec elle.

Mère de Maureen Breau

Michel Breau, le père de la policière, se souvient avoir reçu un appel le soir du meurtre lui disant de se rendre à l’hôpital parce que sa fille avait été blessée au travail. Il était à l’hôpital lorsque son décès a été confirmé.

Il a décrit s’être rendu sur les lieux du crime le lendemain matin à la recherche de réponses, mais il a dit avoir appris peu de choses. De précédents témoignages à l’enquête, Michel Breau a appris que sa fille a monté les escaliers sans savoir que Brouillard Lessard était armé d’un couteau — aucun des agents n’avait mentionné l’arme puisque la tentative d’arrestation a rapidement déraillé.

Michel Breau a mentionné que sa fille avait agi par inquiétude pour son collègue, qui avait crié après avoir été poignardé.

« Je sais tout ce qui s’est passé, aujourd’hui. Ça met fin à mes questionnements » a-t-il affirmé à Me Kamel, la remerciant aussi d’avoir été d’une grande aide.

L’enquête de la coroner doit se conclure jeudi.