Une féministe idéologue nourrie par sa vengeance contre les hommes : la défense a brossé un portrait extrêmement négatif de la plaignante mardi au procès de Brad Aeon. Des mythes et stéréotypes, selon la Couronne, qui maintient que l’ex-professeur de l’UQAM a agressé sexuellement la femme à de nombreuses reprises.

La Couronne et la défense ont présenté à la juge Marie Kettlyne Ruben des arguments aux antipodes mardi lors de leurs plaidoiries finales au palais de justice de Montréal. Brad Aeon, chercheur universitaire en gestion du temps et en bien-être, est accusé d’avoir agressé sexuellement Violette* et de l’avoir blessée plusieurs fois en 2021 et en 2022.

Au procès, Violette a raconté crûment de nombreuses agressions sexuelles d’une grande violence : claques au visage, coups de poing sur les fesses, morsures jusqu’au sang, étranglement, sodomie, etc. « Out of the blue, il m’a sauté à la gorge. Il m’a étranglée à deux mains. J’ai été rapidement étourdie », a-t-elle raconté.

Brad Aeon mordait Violette si souvent pendant leurs rapports sexuels que son corps était couvert de bleus, a-t-elle témoigné. Une fois, en pleine rue, devant un restaurant, Brad Aeon lui a mordu le bras « extrêmement fort », puis aurait feint de l’attaquer avec son casque de vélo, a-t-elle relaté.

Selon la procureure de la Couronne MLauren Dahan, Violette a témoigné avec « honnêteté », sans tenter d’être « parfaite ». La plaignante a donné beaucoup de détails, ne s’est jamais contredite et a même brossé un portrait parfois « positif » de l’accusé, a relevé la procureure.

Pendant leur relation, Violette a constamment rappelé à l’accusé ses « limites » acceptables en matière sexuelle, mais Brad Aeon ne cessait de les outrepasser, a souligné la procureure. Ainsi, Brad Aeon a commis des agressions sexuelles en ne s’assurant pas d’obtenir le consentement de la plaignante, selon la Couronne.

L’avocat de la défense s’est montré virulent à l’égard de la plaignante : il a minutieusement discrédité son témoignage en la présentant comme une fabulatrice qui a tout inventé pour se venger de son ex à la fin de leur relation.

« Elle a tenté très fort de convaincre le Tribunal que l’accusé était un violent détraqué sexuel [madman], alors qu’elle était une victime innocente prise au piège », a ironisé MAdam Ginzburg.

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Brad Aeon et son avocat, Me Adam Ginzburg

Selon la défense, Violette est une « idéologue » qui croit que les hommes sont tous « violents de façon inhérente ». D’ailleurs, elle s’est déjà dite « misandre ». Sa « position idéologique » sur les relations hommes-femmes l’a donc menée à interpréter les gestes de Brad Aeon sous un certain prisme, a poursuivi MGinzburg, qui a entre autres évoqué « le comportement émotionnel » de Violette.

Au procès, Brad Aeon a affirmé avoir eu si peur de la plaignante, après avoir lu ses écrits de fiction violents, qu’il a installé des caméras de surveillance chez lui. Pour protéger l’identité de Violette, nous devons rester prudent par rapport à ses écrits. Précisons cependant qu’il s’agit d’écrits de fiction sérieux, et non de simples « fanfictions » sur le web.

Pour la défense, les écrits de fiction de Violette reflètent son « hypocrisie » par rapport à la violence contre les hommes : ses personnages tuent des hommes, alors qu’elle dépeint Brad Aeon comme un « monstre ». D’ailleurs, la notion de « vengeance » est au cœur de son écriture, a insisté MGinzburg.

Dans sa charge contre Violette, MGinzburg souligne qu’elle ne se rappelait pas certaines agressions, mais qu’elle se souvenait pourtant de « choses insignifiantes » comme la position d’une chaise. De plus, à leur fin de leur relation, Violette a envoyé une « lettre d’amour » somme toute positive à Brad Aeon.

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MLauren Dahan, procureure de la Couronne

Souligner l’envoi de cette lettre s’apparente à des mythes et stéréotypes, a plaidé la procureure de la Couronne. « C’est un stéréotype de dire qu’il est improbable qu’elle ait envoyé une lettre d’amour après avoir été abusée », a plaidé MDahan. Une position qui a fait bondir MGinzburg. « Je n’ai pas tenté de stéréotyper la plaignante », s’est-il défendu.

Selon la défense, Brad Aeon s’est toujours assuré d’obtenir le consentement de la plaignante. Il a livré un témoignage « cohérent » et « candide » et doit ainsi être cru, fait valoir MGinzburg. Et si le Tribunal reste sceptique, il doit au moins conclure qu’il avait la croyance sincère, bien qu’erronée, qu’elle consentait aux gestes.

La juge Ruben rendra sa décision en novembre prochain.

*Prénom fictif pour préserver l’anonymat de la plaignante