C’est l’histoire d’un groupe de personnes qui ne se connaissaient pas, mais qui ont accompli ce que les policiers de Montréal jugeaient impossible : retrouver en un temps record un véhicule volé.

Ce qu’il faut savoir

Pour une rare fois, un véhicule volé a été retrouvé à Montréal.

Sa propriétaire avait lancé un appel à tous viral sur Facebook.

Le SPVM recommande aux conducteurs d’installer un dispositif antivol.

Et il ne s’agit pas de détectives, mais bien d’amateurs de gastronomie.

« Les policiers m’ont dit qu’un véhicule volé sur 10 000 à Montréal était retrouvé, et que je perdais mon temps », dit Perle Morency, la propriétaire.

Tout a commencé jeudi dernier en matinée, quand Mme Morency, une restauratrice de Kamouraska qui était dans la métropole pour affaires, a réalisé que son VUS Toyota 4Runner 2023 stationné sur la 8Avenue à Rosemont avait disparu.

« J’étais nerveuse de stationner mon véhicule au centre-ville, ou dans le Vieux-Montréal. Mais dans un quartier tranquille comme Rosemont, je ne m’attendais pas à ça », dit-elle.

Pratiquement neuf, le véhicule lui servait à faire des excursions gourmandes en forêt avec des clients de Côté Est, le bar à vin qu’elle possède à Kamouraska.

« C’est un véhicule d’une édition très rare, avec des autocollants vintage qui se remarquent facilement », dit-elle.

Un appel à tous sur Facebook

Jeudi matin, Mme Morency a donc appelé les policiers du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), qui ont dit qu’ils passeraient la voir. Entre-temps, elle a publié un billet sur Facebook.

CAPTURE D’ÉCRAN DE FACEBOOK

Perle Morency a publié ce billet jeudi dernier après le vol de son véhicule.

« Allo Montréal ! Je viens de me faire voler mon 4Runner 2023. Comme vous le voyez, il est assez reconnaissable… On ne sait jamais ! », a-t-elle écrit, publiant aussi une photo du véhicule. Aussitôt, son billet a commencé à être republié.

Au bout de quatre heures à attendre les policiers, Mme Morency a décidé d’aller au poste de quartier.

[Les policiers] m’ont dit que 30 véhicules Toyota étaient volés chaque jour à Montréal. J’ai bien vu qu’ils ne s’énervaient pas avec ça. Je leur ai dit que des gens cherchaient sur Facebook, mais ils m’ont répondu que je perdais mon temps.

Perle Morency, restauratrice de Kamouraska

Entre-temps, le billet était republié sur Facebook. Des commentaires s’accumulaient sous la publication. Les gens lui ont dit qu’ils ouvriraient l’œil.

Normand Laprise, chef du restaurant Toqué ! et natif de Saint-Alexandre-de-Kamouraska, a imprimé la photo du VUS volé et l’a épinglée sur le babillard des employés de son restaurant.

« Mes amis restaurateurs se mettaient à chercher ma camionnette », dit Mme Morency.

Les signalements fusent

Des gens ont commencé à lui envoyer des photos de 4Runner. Quelqu’un a écrit avoir vu un VUS qui correspondait à la description dans le Mile End. Mais des autocollants appliqués sur la partie arrière du véhicule ne correspondaient pas.

« Des gens pensaient voir ma camionnette à l’île d’Orléans, à Stoneham, dans les Laurentides… », dit Mme Morency.

Parmi les signalements, de nombreuses personnes lui suggéraient de laisser tomber.

Le consensus, c’était que ma camionnette était déjà dans un conteneur au port de Montréal, en route vers la Libye ou l’Irak. Mais moi, je suis une personne positive dans la vie. Je me disais qu’il y avait des chances que quelqu’un la retrouve.

Perle Morency, restauratrice de Kamouraska

Vendredi, Mme Morency est rentrée à Kamouraska comme passagère à bord du véhicule d’un ami. Elle n’avait pas ses bagages, qui se trouvaient dans le véhicule volé, avec des articles qu’elle venait d’acheter, dont des verres à vin, des fromages du Québec, de même qu’un stock de bouteilles de vin mousseux à base de thé sans alcool.

Sur Facebook, sa publication avait atteint 400 partages. Elle continuait d’être republiée.

En fin d’après-midi vendredi, elle a reçu une nouvelle image.

Cette photo venait d’une personne qui fait carrière dans le milieu de la restauration et qui désire garder l’anonymat.

La photo envoyée par ce bon Samaritain avait été prise devant le parc Félix-Leclerc, dans l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve. On y voyait une camionnette noire. Quelqu’un avait fait éclater la fenêtre du côté passager.

En scrutant les photos, Mme Morency n’a eu aucune hésitation.

« C’était ma camionnette », dit-elle.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Elle a contacté les policiers. En attendant près du véhicule volé, ce bon Samaritain a vu un homme approcher et monter à bord du VUS.

« Je lui ai crié : “Hé ! Qu’est-ce que tu fais là ? Arrête !” », se souvient-il.

L’homme est sorti du véhicule et s’est enfui à pied. D’instinct, le bon Samaritain l’a pourchassé, ayant même la présence d’esprit de filmer la scène avec son téléphone.

PHOTO FOURNIE PAR LE TÉMOIN

Le suspect présumé prenant la fuite

« L’homme s’est retourné, et je ne sais pas si j’ai bien vu, mais j’ai eu l’impression qu’il avait une arme. J’ai décidé que je n’allais pas risquer ma vie pour une camionnette. Alors, j’ai laissé faire. »

Les policiers sont arrivés peu après et ont pris en charge le véhicule.

Mesures de prévention

Les voleurs n’étaient pas des professionnels, note Mme Morency.

« Ils avaient arraché les fils du bouton de démarrage. Ils ont aussi arraché la partie où se trouve le rétroviseur, car il y a un système de repérage du véhicule qui se situe là. »

Mélanie Bergeron, des relations médias du SPVM, note que la collaboration de la population est importante pour lutter contre le vol de véhicules à moteur. « Toute personne victime d’un vol de véhicule ou détenant des informations peut communiquer avec le 911 ou avec son poste de quartier. »

Plusieurs actions peuvent être mises de l’avant afin de s’en prémunir, ajoute-t-elle. « Nous suggérons aux propriétaires de se munir d’un antivol efficace, comme un système de repérage, un antidémarreur ou une protection OBD (On Board Diagnostic). Se procurer un étui ou un boîtier bloquant le signal émis par la clé intelligente de son véhicule et poser une barre antivol sur son volant sont d’autres exemples de mesures de prévention. »

Quant à la restauratrice, elle dit avoir été touchée par l’aide du bon Samaritain, ainsi que par celle des gens du milieu de la gastronomie et de la restauration. Elle est heureuse que l’histoire se soit bien terminée.

« Les gens de la restauration, ce sont des gens de cœur, de compassion, de résilience. J’ai reçu une grosse dose d’amour à travers cette mauvaise expérience », dit Mme Morency.

Le véhicule est actuellement en réparation. Cet été, il va pouvoir servir à transporter des clients dans les routes reculées des forêts du Bas-du-Fleuve.

« Le véhicule va avoir une histoire », dit-elle.