(Amqui) Le chauffard qui a laissé la ville d’Amqui dans la stupeur et la consternation en fonçant sur des piétons a été accueilli par des cris de « pourri » mardi après-midi au palais de justice d’Amqui, quelques minutes avant d’être accusé de conduite dangereuse causant la mort.

CE QU’IL FAUT SAVOIR

  • Vers 15 h, lundi, un conducteur de camionnette a heurté plusieurs piétons sur « une certaine distance », a confirmé un porte-parole de la SQ, Claude Doiron ;
  • Le suspect, Steeve Gagnon, 38 ans, a été accusé de conduite dangereuse causant la mort ;
  • Le conducteur aurait agi de manière délibérée ;
  • Deux personnes sont mortes : un septuagénaire et un sexagénaire ;
  • Un enfant de moins d’un an et un autre de près de trois ans sont parmi les piétons frappés. On ne craint pas pour leur vie ;
  • Trois blessés se trouvent dans un état critique et on craint pour leur vie.

Une petite foule de curieux s’étaient assemblés pour accueillir le conducteur de la camionnette qui a fauché, de manière intentionnelle selon la police, une dizaine de piétons mardi faisant deux morts et des blessés graves dont un bébé. L’homme de 38 ans qui portait un t-shirt a gardé le silence alors que jaillissaient des insultes et des huées.

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Steeve Gagnon

La Couronne a déposé contre lui des accusations de conduite dangereuse causant la mort de Gérald Charest, 65 ans et de Jean Lafrenière, 73 ans, tous deux d’Amqui.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales n’écarte pas l’idée de déposer des accusations de meurtre. « L’enquête de la police n’est pas terminée. Un grand nombre de témoins doivent être rencontrés. Plus d’informations doivent être colligées », a dit Simon Blanchette, procureur de la Couronne.

« Alors nécessairement il y aura d’autres accusations portées lorsque l’enquête aura été terminée et qu’on aura pu se pencher sur l’ensemble de la preuve. »

Le chauffard, qui habitait dans un bloc-appartements à quelques centaines de mètres du palais de justice, va demeurer détenu d’ici son procès. Il doit revenir en cour le 5 avril prochain.

Steeve Gagnon n’a pas bronché devant le juge, ni devant les journalistes ou les badauds assemblés. La Couronne a rappelé que l’homme était présumé apte à subir son procès jusqu’à preuve du contraire. « Aucune information qui découle de la preuve nous permet de douter de son aptitude », indique MBlanchette.

L’avocat de l’accusé a refusé de répondre aux questions. « Tout ce que je veux dire aujourd’hui c’est que la communauté d’Amqui a vécu un drame insensé. Nos premières pensées vont aux victimes, à leurs proches et la communauté durement ébranlée », a simplement déclaré MHugo Caissy.

Une scène de désolation

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Un enfant de moins d’un an et un autre de près de trois ans sont parmi les 10 piétons frappés dans la petite municipalité du Bas-Saint-Laurent.

L’Amquien Daniel Thériault connaissait les deux victimes. C’étaient deux hommes « très doux », en bonne forme physique, de grands marcheurs. Les deux étaient retraités.

« M. Charest travaillait pour une entreprise d’aménagement paysager à Amqui. Je le vois encore travailler avec le sourire et nous envoyer la main, s’est-il rappelé avec des trémolos dans la voix. C’était un bonhomme vivant, d’une grande force physique. Il venait juste de prendre sa retraite. »

Selon lui, parmi la dizaine de piétons happés se trouvaient des grands-parents qui marchaient avec leurs petits-enfants.

Mardi matin, la scène de crime avait des airs de désolation. Des souliers jonchaient le sol tout près d’une poussette tordue.

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Une poussette était visible sur les lieux de l’incident.

« Les seuls qui ne criaient pas, c’étaient les victimes », se souvient David Morin, qui a été témoin de la scène sordide dans les instants qui ont suivi les collisions.

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David Morin

Selon lui, les victimes jonchaient le sol sur plus de 100 mètres. « Le gars, il a continué ! Et il y en a qui l’ont évité, le camion. »

La députée bloquiste Kristina Michaud est passée en matinée sur la scène du drame. « J’ai des amis touchés de près, en deuil présentement », dit la députée fédérale locale, qui a grandi à Amqui.

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Kristina Michaud

« La première réaction, ç’a été le choc. On est une petite communauté de 6000 habitants et d’habitude, il n’y en a pas de drames comme ça », a-t-elle dit.

« On pense que ça arrive ailleurs. Ici à Amqui, quand on entend des sirènes, on se colle le nez à la fenêtre parce qu’on se dit qu’on doit la connaître cette personne-là », note la députée. « Toute la communauté aimerait que ce soit un cauchemar. »