(Québec) Le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, demande à la Cour d’appel du Québec d’identifier le juge et les avocats qui ont été impliqués dans le procès secret d’un informateur de police.

Par voie de communiqué, mercredi, M. Jolin-Barrette a expliqué avoir mandaté les procureurs du ministère de la Justice afin qu’ils s’adressent au plus haut tribunal du Québec et qu’ils présentent une demande « visant à ce que certaines informations actuellement caviardées puissent être rendues publiques, dont l’identité du juge concerné, des avocats impliqués ainsi que des ordonnances rendues dans cette affaire ».

En tant que ministre de la Justice et Procureur général du Québec, je demeure fortement préoccupé par les circonstances qui sont rapportées. À cet égard, je me suis entretenu avec les directions de la Cour du Québec et de la Cour supérieure. Nous partageons les mêmes préoccupations quant aux circonstances entourant ce dossier ainsi que sur l’importance du principe de la publicité des débats judiciaires.

Extrait du communiqué de Simon Jolin-Barrette

« Bien que n’ayant pas accès aux informations de ce dossier en raison des ordonnances rendues par la Cour d’appel, je suis cependant informé que le Directeur des poursuites criminelles et pénales n’a pas pris part au dossier », a-t-il ajouté.

Un procès piloté par la couronne fédérale

La Presse révélait plus tôt mercredi que le procès secret tenu au Québec serait lié à un dossier de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et qu’il a été mené par des procureurs de la couronne fédérale. L’accusé était un informateur de la GRC. Les policiers et les procureurs auraient mis en place ce procès secret pour protéger une enquête en cours.

À Ottawa, le ministre de la Justice, David Lametti, s’est dit « très préoccupé » par cette affaire sans vouloir s’en mêler. « Le principe de la publicité des débats est un principe fondamental de notre système de justice, a-t-il rappelé dans une déclaration écrite. La justice doit être faite, au vu et au su de tout le monde. »

PHOTO PATRICK DOYLE, ARCHIVES REUTERS

David Lametti

Je suis soulagé que la Cour d’appel du Québec fasse la lumière sur cette affaire, a-t-il ajouté. Un pouvoir judiciaire indépendant est essentiel à une démocratie saine.

David Lametti, ministre fédéral de la Justice

Il n’a pas voulu commenter davantage en raison des ordonnances judiciaires émises.

Cette histoire, qui défraie la manchette depuis plusieurs jours, a été révélé vendredi par La Presse qui a dévoilé comment la Cour d’appel avait découvert l’existence d’un procès criminel secret tenu dans un contexte jugé « incompatible avec les valeurs d’une démocratie libérale ». Aucun numéro de dossier n’a été ouvert, les accusations ont été gardées confidentielles, tout comme la sentence et le nom du juge. Le jugement n’a pas été archivé au greffe, et des témoins ont été interrogés en dehors du palais de justice.

Le député libéral Gaétan Barrette a demandé mercredi au ministre Jolin-Barrette d’interpeller le Conseil de la magistrature pour qu’il indique sous quels critères il est acceptable dans une société démocratique de tenir un procès secret. La députée péquiste Véronique Hivon a pour sa part demandé aux parlementaires de se saisir d’un mandat d’initiative pour aller au fond de cette histoire qu’elle a qualifiée de « bombe nucléaire » sur le milieu juridique.

Avec Vincent Larouche, Daniel Renaud et Mylène Crête, La Presse