Le nombre d’appels pour faire intervenir des constables spéciaux a bondi en 2023 dans le métro, a révélé jeudi la Société de transport de Montréal (STM). Devant l’insécurité grandissante, le transporteur ajoute des dizaines d’agents en renfort.

Quelque 47 000 signalements ont en effet été faits l’an dernier pour obtenir l’aide des constables spéciaux, contre à peine 42 000 en 2022. Cela représente une hausse significative de 12 % en seulement 12 mois. L’an dernier, 40 % des appels concernaient une personne « vulnérable », le plus souvent en situation d’itinérance, dont 600 ont été pris en charge.

D’après le président de la société, Éric Alan Caldwell, cela illustre que l’insécurité ressentie par les usagers depuis la pandémie ne doit plus être vue comme « un phénomène temporaire ». « C’est une nouvelle réalité à laquelle il faut s’ajuster. La sécurité, c’est devenu un enjeu prioritaire pour nous », a-t-il dit jeudi en conférence de presse, à la station Place-des-Arts.

Ses équipes sont dotées depuis quelques semaines déjà de six « ambassadeurs de sûreté », un nouveau poste d’abord évoqué au printemps dernier dans La Presse. En uniforme bleu, ils ont pour mandat d’assurer une présence rassurante pour les usagers, en plus de détecter des éléments de violence potentielle. Ils ne peuvent toutefois utiliser la force et doivent faire appel aux constables ou à des policiers au besoin.

L’organisme vise à embaucher 15 autres « ambassadeurs » d’ici le printemps ; une somme de 600 000 $ a été réservée à ce programme.

« C’est vraiment d’être présent dans les édicules, les quais, à l’entrée des tourniquets. Dans toutes les stations, les gens peuvent nous approcher », affirme Philippe Gagnon, l’un de ces « ambassadeurs ». « Il y a les caméras qui nous suivent et qui peuvent nous indiquer s’il y a des problèmes. On a tout un système autour de nous qui est en place pour réagir rapidement », ajoute en ce sens son collègue William Martin.

Rôle revu pour les policiers

Une quinzaine de constables sociaux ont par ailleurs été ajoutés ces dernières semaines, pour un total de 200. La STM promet aussi d’être « plus réactive » côté propreté, avec l’embauche de 20 nouveaux préposés à l’entretien qui cibleront des stations plus achalandées. Total des investissements : 5 millions de dollars.

Ce que nos clients nous disent, c’est que pour se sentir en sécurité dans le métro, ils ont besoin de nous voir davantage.

Éric Alan Caldwell, président de la STM

Tout cela survient alors que les patrouilleurs métro du SPVM n’effectuent plus depuis quelques semaines une surveillance régulière. Ils se concentrent dorénavant sur des problématiques liées spécifiquement à la criminalité comme le trafic de stupéfiants. Les appels au 911 pour des évènements dans le métro sont donc pris en charge par les postes de quartier (PDQ) répartis sur le territoire.

Financièrement, ce changement a permis à la Ville de Montréal de diminuer sa contribution pour les « services policiers » dans le métro de 17,8 à 14,4 millions entre 2022 et 2023.

Sur le fond, ce changement de modèle permet surtout « plus d’efficacité », affirme le directeur sûreté et contrôle de la STM, Jocelyn Latulippe. « Avant, quand il arrivait quelque chose, il fallait faire un rapport et envoyer ça à des enquêteurs ou des unités policières, donc le délai de vulnérabilité entre le crime et l’arrestation était beaucoup plus long. Là, le modèle des policiers va être dédié à l’intervention. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Martin William, ambassadeur Sûreté pour la STM, Jocelyn Latulippe, directeur sûreté et contrôle de la STM, Philippe Gagnon, ambassadeur Sûreté pour la STM, Éric Alan Caldwell et Marie-Claude Léonard.

« Quand il y aura un vol, une agression ou un vol dans le métro, ça va donner un taux d’arrestation beaucoup plus élevé. En dedans de quelques jours, si la personne continue à se promener dans le réseau, elle va être arrêtée. C’est une formule unique en Amérique du Nord », insiste M. Latulippe.

Dans l’opposition à l’hôtel de ville, toutefois, l’inquiétude persiste. « Miser sur le programme d’ambassadeurs de sûreté ne suffit pas, d’autant plus que seuls six ambassadeurs couvrent présentement l’ensemble du réseau et ils ne sont pas équipés pour répondre à l’ensemble des interventions », affirme le conseiller Abdelhaq Sari.

« Pour ramener les usagers dans le transport collectif, l’administration doit offrir un service attractif et sécuritaire, plutôt que de couper et de mettre en place des demi-mesures. Concrètement, ça passe par un temps d’intervention plus rapide, une situation qui pourrait devenir problématique avec le réacheminement des appels d’interventions d’urgence du métro », conclut M. Sari.