Revirement de situation pour un campement de sans-abri installé sur un terrain du ministère des Transports du Québec (MTQ), dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve : les avocats du gouvernement ont décidé lundi de ne pas poursuivre leurs démarches devant les tribunaux pour évincer les campeurs.

« C’est une bonne nouvelle mitigée, puisqu’en renonçant à l’éviction, on évite de mettre en danger la vie des campeurs. Cependant, en pleine crise d’itinérance, le gouvernement n’offre aucune solution alternative adaptée aux besoins de ces personnes vulnérables afin de les loger immédiatement », a commenté le directeur général de la Clinique juridique itinérante (CJI), MDonald Tremblay, qui a aidé les personnes en situation d’itinérance à contester devant la justice l’avis d’éviction envoyé par le Ministère.

Le mois dernier, la CJI a déposé devant la Cour supérieure trois demandes d’injonction (permanente, interlocutoire et provisoire) au nom des personnes itinérantes vivant au campement de la rue Notre-Dame Est, près de l’entreprise Sucre Lantic, afin de retarder leur éviction, qui était prévue pour le 23 octobre.

Un jugement sur la demande d’injonction provisoire a ordonné au MTQ, le 26 octobre, de suspendre l’éviction jusqu’au 6 novembre. Lundi, les avocats du MTQ ont informé le tribunal qu’ils ne procéderaient pas à l’éviction de la communauté de campeurs, expliquant qu’il n’y avait aucune urgence, rapporte MTremblay.

La CJI avait fait valoir devant le juge que la destruction du campement, sans réelle solution de rechange pour les membres de la communauté, était susceptible de perturber leur fonctionnement habituel, de couper des liens avec leur réseau de soutien et de les rendre plus vulnérables, s’ils devaient vivre isolés les uns des autres.

C’est l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve qui avait ordonné au MTQ de démanteler le campement. Dans un avis daté du 21 septembre, un inspecteur municipal informait le MTQ que son terrain accueillait présentement un « campement de fortune » et que « cet usage n’est pas autorisé dans ce secteur » par le règlement d’urbanisme. On notait aussi l’accumulation de déchets sur le site, ce qui contrevient au règlement sur les nuisances, en donnant au propriétaire 10 jours pour tout retirer.

À l’arrondissement, on a expliqué avoir agi à la suite de la plainte d’un citoyen.

En fin de journée lundi, le MTQ a confirmé qu’il avait « suspendu jusqu’à nouvel ordre » le démantèlement du campement. Selon la porte-parole Sarah Bensadoun, c’est seulement à cause de la demande de l’arrondissement que le MTQ a distribué des avis d’éviction. S’il n’y avait pas eu d’intervention d’un inspecteur municipal, rien n’aurait été fait pour déloger les campeurs, dit-elle. « Il n’y a pas de besoin d’éviction pour ce terrain-là », ajoute Mme Bensadoun.

Vendredi dernier, un porte-parole du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal a affirmé que l’organisme était intervenu auprès des habitants du campement « afin de les soutenir dans leurs démarches et accompagner les personnes qui le souhaitent vers le logement ».

« Le CIUSSS a pris contact à la mi-octobre avec les usagers, a présenté les services de l’équipe Proximité/RSSS, s’est assuré que ces derniers soient avisés de l’avis d’éviction. Aucune demande précise n’a émergé à ce moment de leur part », affirme le responsable des communications Carl Boisvert, dans une réponse écrite aux questions de La Presse.

Jusqu’à maintenant, le CIUSSS a offert des soins physiques, a pris des rendez-vous pour des cartes d’assurance maladie, s’est assuré de faire des suivis psychosociaux et a fait l’arrimage avec des équipes traitantes, indique M. Boisvert. « À chaque rencontre sur le terrain, il y avait minimalement un intervenant psychosocial et une infirmière », dit-il.

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