Comment préparer l’arrivée du REM ? Comment combattre la hausse du nombre de fusillades ? Où s’en va le projet de Ray-Mont Logistiques ? Les questions sont nombreuses dans l’est de Montréal, alors que s’entame la dernière ligne droite de la campagne municipale.

L’éternel débat, le REM

IMAGE FOURNIE PAR CDPQ INFRA

Image préliminaire d’une future station du REM de l’Est, rue Notre-Dame

Prévu d’ici 2023, le début du chantier du REM de l’Est est d’emblée sur toutes lèvres dans l’est de Montréal. « Ça va complètement transformer la mobilité, mais encore faut-il que ça s’intègre au cadre bâti. L’Est n’est pas monolithique. Il y a plusieurs types de quartiers. Le défi d’intégration est grand », lâche la mairesse sortante de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles, Caroline Bourgeois. Membre du parti de la mairesse sortante, l’élue plaide pour que l’implantation du REM « se fasse à échelle de quartier ». « On est en 2021. Je ne peux pas croire qu’on n’est pas capables d’y arriver. On ne veut pas une reproduction de ce qui s’est passé dans l’Ouest », affirme-t-elle. Dans les rangs de l’opposition, la candidate à la mairie de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, Karine Boivin-Roy, s’inquiète que « plusieurs questions restent sans réponses ». « Au niveau environnemental notamment, on ne sait pas où vont tomber les pylônes par rapport à la proximité des maisons. On veut faire confiance au processus, mais la Caisse doit nous prouver que ça se fait dans la transparence », réclame-t-elle, en déplorant que l’administration actuelle « ne soit pas entendue, voire exclue » des débats. Au Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-MTL), le directeur Emmanuel Rondia appelle à ralentir la cadence. « On va vite dans ce dossier. C’est encore le temps d’évaluer une planification intégrée. Il faut veiller à évaluer toutes les options », dit-il.

Habitation et itinérance

Pour la directrice du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), Annie Savage, il faut comprendre que l’est de Montréal a « subi beaucoup de transformations » dans la dernière année. « On y a déplacé beaucoup de personnes en situation d’itinérance, notamment avec l’ouverture du refuge à l’Auberge Royal-Versailles. C’était nécessaire, mais les quartiers ont été mal préparés à ça. On sent une certaine grogne », dit-elle. « Certes, ça prenait des réponses d’urgence, mais maintenant, il va falloir travailler la cohabitation sociale à plus long terme. Les besoins sont criants, les groupes communautaires doivent pouvoir avoir plus de moyens », soutient-elle, en appelant à la construction de davantage de logements sociaux. « Il faut aussi que la Ville travaille à préserver notre parc locatif de maisons de chambres. On a vu certains arrondissements mettre en place des règlements empêchant leur conversion, mais ce n’est pas suffisant. Les promoteurs trouvent souvent d’autres leviers pour les transformer en condos », insiste Mme Savage, pour qui investir davantage en travail de rue est aussi une solution porteuse afin de s’attaquer à l’itinérance et au manque de logements.

L’enjeu très actuel de la sécurité

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

La hausse des évènements violents impliquant des armes à feu à Montréal fait particulièrement sentir son impact dans le nord-est de l’île depuis quelques mois.

En tant que responsable des enjeux de sécurité publique au comité exécutif, Caroline Bourgeois reconnaît d’emblée qu’il n’y a pas de « recette miracle » pour combattre la hausse des évènements violents impliquant des armes à feu à Montréal, qui sont particulièrement présents dans le nord-est de l’île depuis quelques mois. « Il faut agir sur plusieurs fronts. Dans les quartiers touchés, oui, il y a une présence policière plus importante, mais la réponse passe aussi par la prévention, les escouades mixtes d’intervenants sociaux sur le terrain », dit-elle, en réitérant la nécessité de former un « espace » au sein duquel les jeunes se « sentiraient les bienvenus ». « Il faut bonifier les équipes mixtes au niveau communautaire, mais surtout, fournir de la formation aux policiers », lance Karine Boivin-Roy, d’Ensemble Montréal, qui est aussi conseillère sortante du district de Louis-Riel, dans Hochelaga. Elle déplore au passage que l’administration Plante ait longtemps « tergiversé » sur l’implantation de caméras corporelles avant d’en faire un enjeu de campagne. Son parti promet par ailleurs de ne pas « désarmer » ni « définancer » le SPVM.

Qu’adviendra-t-il de Ray-Mont Logistiques ?

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le terrain de Ray-Mont dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve

Le projet de terminal de transbordement de conteneurs de Ray-Mont Logistiques continue de susciter beaucoup d’inquiétude dans Hochelaga. Denis Coderre a déjà fait part de son intention de racheter le terrain – ou une partie de celui-ci –, sans toutefois dévoiler ce qu’il en ferait. Le promoteur, Charles Raymond, s’est d’ailleurs dit « ouvert » à l’issue d’une rencontre, selon Karine Boivin-Roy, pour qui « l’occasion était là pour la Ville de tendre la main à Charles Raymond ». Elle dénonce le fait qu’au lieu d’ouvrir le dialogue, l’administration Plante s’est empêtrée dans un processus judiciaire. En 2017, l’arrondissement de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve avait d’abord refusé d’accorder un permis au promoteur. Un an plus tard, la Cour supérieure et la Cour d’appel du Québec ont accordé à Ray-Mont Logistiques la permission de mener à bien son projet. Puis, en mars, la société a intenté une poursuite de 373 millions de dollars contre la Ville. « On est allés au bout de ce qu’on pouvait faire sur le plan juridique pour défendre les droits des citoyens », affirme Caroline Bourgeois, rappelant que la mairesse Plante a demandé à Québec d’évaluer la possibilité de tenir des audiences du BAPE. « Il faut préserver un maximum d’espaces verts. La Ville ne se déresponsabilisera pas », insiste Mme Bourgeois. Charles Raymond, lui, affirme que « l’idée d’une zone tampon végétalisée entre ses activités et les résidences semble être une option appréciée par les différents partis ». « Peu importe le résultat de l’élection, nous poursuivrons avec sérieux nos efforts de concertation. »

Un grand parc dans l’Est ?

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Le parc-nature de la Pointe-aux-Prairies

Au Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-MTL), Emmanuel Rondia appelle aussi une « réflexion collective » sur ce que va englober le grand parc de l’Est. En septembre, la mairesse Valérie Plante a annoncé son intention d’« agrandir substantiellement » le parc-nature de la Pointe-aux-Prairies, en plus d’agrandir le parc-nature du Bois-d’Anjou et de « préserver la vocation d’espace vert » du Club de golf métropolitain d’Anjou, dans le but de former un « grand parc de l’Est ». « Pour l’instant, on a des orientations, mais on ne sait pas encore trop à quoi ça va ressembler. Ça va prendre une réflexion collective sur ce que va englober ce grand parc, et quels sont les terrains à protéger », prévient M. Rondia. « Ça bouge beaucoup dans l’Est de Montréal, donc il ne faut pas perdre de temps et de terrains », ajoute-t-il. « Il y a plein de petits trésors dans le secteur, dont le bois d’Anjou et le ruisseau De Montigny, mais rien qui relie ces espaces. C’est ça, notre vision : joindre ces projets au bénéfice des citoyens, être à l’affût de toutes les occasions possibles », dit Caroline Bourgeois. Son adversaire, Karine Boivin-Roy, plaide surtout pour la protection d’espaces verts, afin d’atteindre la cible de 10 % de surfaces protégées dans l’île. « On veut protéger pour vrai, maintenant », affirme-t-elle.