Ébranlée par des révélations sur le passé de son candidat vedette dans Montréal-Nord, la mairesse Valérie Plante réitère néanmoins sa confiance en Will Prosper.

« Ça prend combien de temps avant d’avoir une deuxième chance ? »

C’est la question que la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a lancée jeudi après-midi, en réaction aux révélations touchant son candidat vedette Will Prosper, forcé de démissionner de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) en 2001 parce qu’il était soupçonné d’avoir fourni des informations à des membres de gangs de rue deux ans auparavant.

« Je suis convaincue que quand ça fait 22 ans – c’est une erreur importante, soit, mais qui s’est produite il y a 22 ans –, je pense qu’il est le temps de donner une deuxième chance, surtout quand on a une personne qui donne autant à sa communauté », a-t-elle ajouté, visiblement nerveuse, au parc Gouin, lors d’un deuxième point de presse qu’elle a dû convoquer pour aborder ce dossier, après avoir accepté de répondre à des questions sur le sujet dans une conférence de presse portant sur les pesticides, en matinée.

Enjeu électoral majeur pour Coderre

Avec cet appui très ferme accordé à son candidat à la mairie de Montréal-Nord, Mme Plante répondait à son rival Denis Coderre, qui réclame la démission de M. Prosper.

« Pour moi, cette personne ne devrait pas être candidate aux prochaines élections », avait déclaré M. Coderre, chef d’Ensemble Montréal, quelques heures plus tôt, dans un parc d’Outremont où il avait convié les médias.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Denis Coderre, candidat à la mairie de Montréal et chef d’Ensemble Montréal, lors d’une conférence de presse jeudi

« Je suis inquiet, a-t-il dit. La sécurité, ce n’est pas partisan. C’est l’enjeu numéro un de la prochaine campagne électorale. Les gens ont peur et, dans tout ça, il y a un élément de crédibilité, de sécurité et de confiance qui est essentiel. »

Selon M. Coderre, ces révélations sont d’autant plus troublantes que Will Prosper serait appelé à jouer un rôle important sur les questions policières dans une éventuelle administration Plante.

Will Prosper est la caution morale du désarmement et du définancement pour Projet Montréal. Il est le vrai porte-parole de la Sécurité publique pour Projet Montréal et l’administration actuelle.

Denis Coderre, chef d'Ensemble Montréal et candidat à la mairie de Montréal

« J’aurais dû être meilleur »

Tout en reconnaissant cette erreur passée, Will Prosper, qui participait à la conférence de presse de la mairesse Plante, au parc Gouin, a assuré n’avoir jamais transmis d’informations sensibles à des criminels.

« J’ai fait une erreur il y a 22 ans », a-t-il convenu en lisant un texte. « Oui, j’ai consulté un registre sans autorisation. C’est une erreur grave. J’aurais dû être meilleur. Je continue à en mesurer les conséquences dans ma vie personnelle et professionnelle. Toutefois, je n’ai jamais franchi la ligne. Je n’ai jamais donné d’informations à quiconque. C’est contre mes principes. »

Ému, le candidat de Projet Montréal de 47 ans a surtout voulu insister sur son implication communautaire auprès des jeunes de Montréal-Nord.

Je pense avoir prouvé depuis 22 ans, par mes actions, que je suis un gars de principes. J’ai des défauts comme tout le monde, mais je ne mens pas. Dans mon métier de policier et comme travailleur communautaire, je n’ai qu’une seule mission : sortir les jeunes de la criminalité.

Will Prosper, candidat de Projet Montréal à la mairie de Montréal-Nord

Will Prosper était membre de la GRC, il y a 22 ans. Alors qu’il était en fonction, au Manitoba, il a consulté une base de données policière, sans raison valable, à propos de personnes qui faisaient l’objet d’une enquête dans une affaire de meurtre et avec lesquelles il avait des liens d’amitié.

M. Prosper a téléphoné à un ami, à Montréal, qui était aussi l’un des suspects, quelques minutes après avoir consulté le registre.

Au terme de son enquête, la GRC lui a demandé de remettre sa démission, estimant que les liens de confiance étaient rompus. L’entente entre la police fédérale et l’ancien policier était demeurée confidentielle, et il n’y a pas eu de poursuites judiciaires.

Confiance réitérée, malgré les appels à la démission

Jusqu’à ce jour, Will Prosper n’avait jamais parlé publiquement des vraies raisons de sa démission forcée, laissant entendre qu’il avait quitté le métier pour se consacrer au travail communautaire et au cinéma, sa véritable passion.

La mairesse Valérie Plante a précisé qu’il lui avait offert sa démission si elle le jugeait nécessaire.

Elle a aussi fait savoir qu’elle n’était pas au courant des faits qui lui avaient été reprochés avant mercredi, jour qui a précédé la parution de la nouvelle dans Le Journal de Montréal.

« Je réitère ma confiance envers Will Prosper pour amener les changements qui sont absolument nécessaires à Montréal-Nord », a-t-elle dit, assurant qu’il resterait candidat, malgré les nombreuses critiques.

Plus tôt, dans la journée, la mairesse de Montréal-Nord, Christine Black, membre d’Ensemble Montréal, avait elle aussi réclamé la démission de M. Prosper, qui se présente contre elle dans son arrondissement.

« Valérie Plante n’est pas l’homme de la situation, a-t-elle écrit sur Twitter. Tant qu’elle sera mairesse, les Montréalais ne seront pas en sécurité. En pleine crise des fusillades, elle nomme un candidat exclu de la GRC à cause de liens avec des gangs de rue. Elle doit retirer Will Proper. »

Plus tard, elle a ajouté : « C’est assez particulier de voir Mme Plante protéger Will Prosper ce matin, alors qu’elle n’a jamais hésité à se défaire de membres de son équipe pour bien moins, comme ce fut le cas avec Giuliana Fumagalli, Sue Montgomery et Julie-Pascale Provost. Les hommes semblent être plus protégés que les femmes dans le parti de Valérie Plante, c’est complètement ironique pour un parti qui se dit féministe. »

La candidature de Will Prosper aux élections municipales du 7 novembre a été annoncée la semaine dernière par la mairesse Plante.

WILL PROSPER

5

Nombre d’années durant lesquelles Will Prosper, de son vrai nom Wiel Prosper, a fait partie de la Gendarmerie royale du Canada

27

Âge qu’il avait quand il a été contraint de remettre sa démission

2008

Année où il a cofondé Montréal-Nord Républik, collectif né à la suite de la mort de Fredy Villanueva, à Montréal-Nord, et en est devenu le porte-parole

2012

Année où il a tenté, sans succès, de se faire élire sous la bannière de Québec solidaire, dans Bourassa-Sauvé

2021

Année où il a fait le saut en politique municipale