Dès que la nouvelle voulant que Martin Prud'homme quitte ses fonctions de directeur intérimaire et administrateur provisoire du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) en décembre prochain a commencé à circuler dans les médias, des policiers et policières de Montréal ont manifesté leurs inquiétudes et leur déception.

En quelques mois, le directeur de la Sûreté du Québec (SQ) a su en effet remettre le SPVM sur les rails de la crédibilité, ramener la confiance et encourager les troupes de la base.

Mais que ces policiers ne s'en fassent pas. Les deux seuls candidats que Martin Prud'homme propose pour lui succéder dans l'immédiat sont des directeurs adjoints qu'il a lui-même nommés : Sylvain Caron, ancien haut placé de la Sûreté du Québec sous M. Prud'homme, et Lyne Carbonneau, qui a fait carrière à la Gendarmerie royale du Canada, ont répondu à l'appel de Martin Prud'homme, qui avait besoin de gens de confiance à ses côtés pour redresser la barre au SPVM. Ils continueront ce qu'il a commencé. Ils pourront également très bien consulter le directeur de la SQ en cas de besoin. 

En réalité, donc, l'ombre de Martin Prud'homme continuera de planer au-dessus de la police de Montréal. En entrevue, M. Prud'homme nous a même dit hier que l'année 2019 serait marquée par des rapprochements sans précédent entre la SQ et le SPVM. À ceux et celles qui craignent que la SQ veuille éventuellement faire main basse sur les divisions des enquêtes du SPVM, il se fait rassurant et rejette ces intentions. Il admet toutefois que des effectifs pourraient travailler ensemble, pour réduire les coûts, notamment dans les enquêtes majeures.

UN SPVM FORT ET INDÉPENDANT

Reste qu'il faudra bien un jour que le SPVM retrouve son identité et qu'une personne issue de ses rangs accède à la direction, idéalement dans un avenir pas si lointain. 

Il faut un SPVM fort et indépendant pour contrebalancer et appuyer les autres corps de police comme la Sûreté du Québec et la Gendarmerie royale du Canada, qui ont déjà connu leur crise dans le passé ou qui ne sont pas à l'abri d'en vivre une aussi.

Dans son rapport, Martin Prud'homme écrit que les cadres issus du SPVM ne sont pas prêts à prendre la relève. Les guerres de clans des dernières années ont fait en sorte que plusieurs hauts responsables du SPVM sont partis ou ont été invités à le faire, ce qui a provoqué un vide important dans la direction, vide qui explique, en partie du moins, le chaos des dernières années. Les départs massifs à la retraite ces dernières années des centaines de policiers qui avaient été embauchés durant les années 80 expliquent également pourquoi aucun membre à l'interne n'est prêt immédiatement à occuper le poste de directeur.

Déjà, les noms de candidats potentiels à la direction issus de l'interne circulent. Même si Martin Prud'homme suggère que M. Caron ou Mme Carbonneau devraient rester en poste au maximum cinq ans, la course à leur successeur est peut-être déjà lancée. Ces candidats potentiels de l'interne auront quelques années pour se faire valoir et mesurer leurs appuis. Ils ont assurément plus d'affinité avec certains collègues que d'autres.

Les clans ont toujours existé au sein de la police et ils existeront toujours. Le problème, c'est lorsque ces clans font passer leurs intérêts personnels avant ceux de l'organisation et que des amis, et des amis des amis, sont nommés à des postes enviés ou clés. 

Durant son mandat, Martin Prud'homme a placé les personnes compétentes aux bonnes places, nous disent des sources. Il faudra que cela se poursuive. Et si les choses vont relativement bien du côté de la gendarmerie, il faudrait que les enquêtes retrouvent leur envergure d'antan.

En attendant, le projet de Martin Prud'homme de placer l'une de ces deux personnes de confiance durant quelques années à la tête du SPVM met la direction hors de portée de débris d'anciens clans qui auraient pu encore avoir certaines visées.

Pour les affaires internes, Martin Prud'homme propose la création d'une équipe mixte permanente, inspirée de celle qui enquête depuis plus d'un an sur les allégations qui ont éclaboussé le SPVM au printemps 2017. Les enquêtes sur ces allégations tirent à leur fin. Des sources n'excluent pas que l'éléphant accouche d'une souris, mais toute cette affaire aura au moins eu le mérite de nettoyer des plaies qui gangrénaient le SPVM.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.