L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a dévoilé mardi son plus récent bilan sur l’état du climat. Un bulletin qui sonne comme un constat d’échec puisque les émissions de gaz à effet de serre, la température de surface et la température des océans ont établi de nouveaux records en 2023.

Nouveaux records pour le CO2 et le méthane

PHOTO FRED DUFOUR, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Les émissions de gaz à effet de serre ont établi de nouveaux records en 2023.

En 2022, dernière année où des chiffres consolidés sont disponibles, les concentrations de CO2 (417,9 parties par million) et de méthane (1923 parties par milliard) dans l’atmosphère ont établi de nouveaux records, aggravant ainsi l’effet de serre qui influence le climat planétaire. Ces valeurs ont malheureusement poursuivi leur progression en 2023 et en 2024, établissant au passage de nouveaux records. Philippe Gachon, professeur d’hydroclimatologie à l’UQAM, est particulièrement préoccupé par le méthane, une « bombe à retardement » qui a un pouvoir de réchauffement de 20 à 30 fois plus important que le CO2. « Le méthane peut aussi favoriser l’atteinte de points de bascule qui vont complètement modifier l’état d’équilibre du climat », souligne le chercheur.

Des écarts qui inquiètent les scientifiques

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L’année 2023 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée, rappelle l’OMM dans son rapport intitulé State of the Global Climate. La température moyenne sur Terre a ainsi été de 1,45 degré supérieure au niveau établi au début de l’ère préindustrielle. Ce qui inquiète particulièrement les scientifiques, c’est l’écart avec le record précédent, établi en 2016 (1,29 degré). Des chiffres, rappelons-le, qui constituent une moyenne à l’échelle planétaire. Fait inquiétant, les experts de l’OMM prévoient eux aussi que 2024 pourrait battre le record de 2023. « Depuis le début de l’année, de nouveaux records ont été établis, rappelle Philippe Gachon. Ça pointe effectivement vers une année record. Ça dépend du moment où l’effet d’El Niño va s’estomper. »

Les océans se réchauffent

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Les océans représentent 70 % de la superficie de notre planète. Ils absorbent aussi 90 % de la chaleur générée par la hausse des émissions de GES. Avec un tel volume d’eau, les océans se réchauffent beaucoup plus lentement que l’air ambiant, mais ils se réchauffent quand même, à des niveaux jamais observés. À la fin de l’année 2023, plus de 90 % des océans avaient connu des vagues de chaleur, signale notamment l’OMM. « C’est beaucoup plus facile d’évaporer de l’eau chaude que de l’eau froide, ça prend moins d’énergie. Plus l’océan se réchauffe, plus il y a des transferts énormes d’humidité qui s’en vont dans l’atmosphère, provoquant des évènements météo extrêmes », explique Philippe Gachon. Ce qui est particulièrement inquiétant selon lui, c’est qu’on observe également un réchauffement des océans jusqu’à 2000 mètres de profondeur.

La hausse du niveau de la mer s’accélère

PHOTO LUIS ACOSTA, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Ces maisons de l’île Tierra Bomba, au large de Carthagène, en Colombie, sont touchées par la hausse du niveau de la mer.

La planète se réchauffe tout comme les océans, ce qui provoque une hausse du niveau de la mer, qui a franchi un nouveau record en 2023. Entre 2014 et 2023, le niveau des océans a augmenté de 4,77 mm par année, soit plus du double du niveau annuel observé entre 1993 et 2002 (2,13 mm). Deux phénomènes sont à l’origine de cette hausse, soit la fonte des glaces et la hausse de la température de l’eau, entraînant une dilatation thermique, soit un plus grand volume d’eau. « La communauté météorologique mondiale met en garde le monde entier et tire la sonnette d’alarme : nous sommes en alerte rouge », a d’ailleurs déclaré Celeste Saulo, secrétaire générale de l’OMM, au moment de présenter le rapport de son organisation.

De moins en moins de glace en mer comme sur terre

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Déposez un cube de glace dans une tasse d’eau chaude et il fondra évidemment. C’est ce qui se produit avec la glace de mer en Arctique et en Antarctique. En février, l’étendue de la glace de mer en Antarctique a d’ailleurs fracassé un nouveau record avec une superficie de 1 million de kilomètres carrés de moins que le record précédent. La couverture de glace au Groenland rétrécit également année après année. La glace, tout comme la neige, permet de refléter les rayons du soleil ; or, la disparition de ces surfaces blanches amplifie le réchauffement, accélérant du même coup la fonte des glaces. Si le monde devenait carboneutre dès aujourd’hui, « ça prendrait certainement des décennies, voire plusieurs siècles, avant que les océans ne se refroidissent à nouveau », précise Philippe Gachon.

Lisez le rapport de l’Organisation météorologique mondiale (en anglais)