(Genève) Il y a une « probabilité élevée » que 2024 affiche à son tour des températures inégalées, alors que l’année écoulée vient conclure une décennie de chaleur record, poussant la planète « au bord du gouffre », a alerté l’ONU mardi.

« 2023 a établi de nouveaux records pour chaque indicateur », a déclaré la secrétaire générale de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), Celeste Saulo, en présentant le rapport sur le climat.

La liste des records battus ou « pulvérisés » est longue, allant des niveaux des gaz à effet de serre aux températures de surface en passant par le contenu thermique (l’énergie absorbée et stockée) et l’acidification des océans, l’élévation du niveau de la mer ou encore l’étendue de la banquise antarctique et le recul des glaciers.

Le rapport confirme que 2023 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne à la surface du globe de 1,45 °C au-dessus du niveau de référence de l’ère préindustrielle. La décennie (2014-2023) aura aussi été la plus chaude jamais observée, dépassant la moyenne 1850 –1900 de 1,20 °C.

« Il y a une probabilité élevée que 2024 batte le record de 2023 », a déclaré Omar Baddour, chef du service de veille sur le climat à l’OMM.

La hausse de la température mondiale sur le long terme est due à l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. L’arrivée du phénomène El Niño au milieu de 2023 a contribué à la montée rapide des températures.

« El Niño s’affaiblit, mais il est toujours là. Pour les trois mois à venir, nous nous attendons à des températures supérieures à la normale dans la majeure partie du monde », a prévenu Mme Saulo.

« Alerte rouge »

La planète est « au bord du gouffre », a averti le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres dans un message vidéo, dénonçant le « chaos climatique sans précédent » provoqué par la pollution par les combustibles fossiles.

« La crise climatique est LE défi déterminant auquel l’humanité est confrontée », a renchéri Mme Saulo.

PHOTO ALFREDO ESTRELLA, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le lac Zumpango complètement asséché, au Mexique.

Les vagues de chaleur, inondations sécheresses et feux incontrôlés sèment « la misère et le chaos », bouleversant la vie quotidienne de millions de personnes et infligeant des milliards de dollars de pertes économiques, alerte l’OMM.

« Nous sommes en alerte rouge », a lancé Mme Saulo. « Jamais nous n’avons été aussi proches – bien que temporairement pour le moment – de la limite inférieure fixée à 1,5 °C dans l’accord de Paris sur les changements climatiques ».

« Les graves conséquences du changement climatique ne signifient pas l’inéluctable effondrement de la civilisation. Tout dépend de la manière dont les gens et les gouvernements modifient ou pas leurs comportements », a réagi Jeffrey Kargel, du Planetary Research Institute d’Arizona.

« Notre seule réponse doit être de cesser de brûler des combustibles fossiles afin de limiter les dégâts »,  a noté Martin Siegert, glaciologue et professeur de géoscience.

Océans et glaciers

À la fin 2023, plus de 90 % des océans de la planète avaient connu des vagues de chaleur pendant l’année, selon l’OMM. L’augmentation de leur fréquence et de leur intensité entraîne de profondes répercussions sur les écosystèmes marins et les récifs coralliens.

Par ailleurs, le niveau moyen de la mer à l’échelle du globe a atteint un record en 2023, ce qui traduit la poursuite du réchauffement des océans ainsi que la fonte des glaciers et des nappes glaciaires.

Signe inquiétant, le taux d’élévation de ce niveau moyen au cours de la dernière décennie est plus de deux fois supérieur à celui de la décennie 1993-2002.

Les glaciers de référence à travers la planète ont subi le recul le plus important jamais enregistré depuis 1950, selon des données préliminaires.

Sur les deux dernières années, les glaciers suisses ont perdu environ 10 % de leur volume résiduel, alors que l’étendue des glaces de mer dans l’Antarctique a elle été « de loin » la plus faible jamais enregistrée.

Il y a cependant « une lueur d’espoir », selon l’OMM, signalant l’augmentation de près de 50 % sur un an des capacités de production d’énergie renouvelable, le taux le plus élevé observé au cours des deux dernières décennies.

À ce propos, a relevé Mme Saulo, « investir dans la transition énergétique en Afrique pourrait profiter non seulement à l’Afrique, mais au monde entier. Donc selon moi, nous avons là une solution ».