Jeudi dernier, le président des États-Unis, Joe Biden, a déclaré que les menaces de Vladimir Poutine d’utiliser des armes nucléaires dans le conflit contre l’Ukraine font courir au monde un risque d’Armageddon.

Ah ben, geddon ! Vous savez ce que c’est, Armageddon ? Oui, c’est un film avec Bruce Willis et Ben Affleck, où l’on entend Aerosmith chanter I Don’t Want to Miss a Thing. Mais ce n’est pas juste ça. Ça vient de la Bible. C’est le lieu de la bataille finale entre le bien et le mal. L’Armageddon, c’est l’apocalypse, c’est la fin du monde.

Joe Biden a précisé que l’humanité n’a jamais été aussi près de la fin du monde depuis la crise des missiles à Cuba, en 1961. Rien que ça ! Il n’a pas dit qu’on était près d’une troisième guerre mondiale, ce qui serait déjà contrariant, non, il a parlé de la destruction totale de la vie sur Terre ! Et quelle fut la réaction des populations ? A-t-on entendu un grand cri d’effroi ? A-t-on vu des mouvements de panique ? A-t-on stocké des rouleaux de papier de toilette ? A-t-on creusé des abris ?

Pas du tout ! On a continué à s’interroger sur l’avenir du PLQ et sur celui de Juraj Slafkovsky avec le Canadien de Montréal. Allô ! Si l’avenir, c’est l’apocalypse, bye-bye PLQ, bye-bye Slafkovsky, bye-bye toute !

Pourtant, zéro émoi. Zéro stress. Pas de grosses Unes dans les journaux. Pas d’émission spéciale sur les chaînes d’infos. Même pas de commentaires des autres chefs d’État. Justin Trudeau a continué à faire du bungee. Sans craindre que l’élastique nucléaire lui pète dans la face.

Hé, ce n’est pas un complotiste membre d’un obscur groupe Facebook qui a évoqué l’apocalypse ! Ce n’est pas Jojo Savard, non plus. C’est Joejoe Biden ! Le président des États-Unis. La personne la mieux informée de la planète. La personne dont chaque parole est pesée. L’homme le plus puissant de la Création évoque l’Armageddon. Et on s’en fout !

Les frileux marchés boursiers, qui réagissent au moindre pet nerveux de l’ordre mondial, n’ont pas du tout été secoués par les propos alarmistes du président.

L’apocalypse, pis après ? Ben justement, il n’y a rien après.

Comment expliquer cette indifférence généralisée ? C’est le syndrome Pierre et le loup. L’avertissement du président américain repose sur les dires de son homologue russe. Vladimir Poutine a déclaré, le 21 septembre dernier, être prêt à utiliser tous les moyens dans son arsenal face à l’Occident, précisant que ce n’était pas du bluff.

Le problème, c’est que ce n’est pas la première fois qu’il le dit depuis le début du conflit. Comme Pierre qui crie au loup si souvent que plus personne ne s’en inquiète, Vladimir crie aux armes nucléaires si souvent que plus personne ne s’en formalise.

Pourtant, plus le temps passe, plus l’Ukraine résiste, plus, comme le constate Biden, l’attaque atomique devient la seule issue pour que Poutine ne perde pas la face. Et Poutine déteste plus perdre la face que perdre des hommes ou perdre du terrain.

Donc les menaces du président russe proférées il y a quelques jours sont beaucoup plus graves que celles lancées au début de l’invasion.

Et ce qui est le plus inquiétant, c’est notre insouciance. Quand l’opinion publique s’alarme, quand tout le monde est sur ses gardes, le pire se produit rarement. La crise des missiles, opposant Kennedy à Khrouchtchev, en est la preuve.

C’est plutôt quand l’opinion publique est occupée ailleurs, quand tout le monde ignore une situation, quand on sous-estime un danger, que le pire frappe. Les livres d’histoire en sont remplis d’exemples.

Bon, pourquoi gâcher votre week-end de l’Action de grâce avec ces angoisses apocalyptiques ? Désolé. Mais la guerre en Ukraine a trop baissé au palmarès de nos soucis. Il faudrait recommencer à s’en préoccuper, si on ne veut pas qu’elle s’occupe de nous. La diplomatie occidentale doit trouver une porte de sortie au leader caractériel de la Russie. Sinon, personne ne s’en sortira.

Sur ce, joyeuse Action de grâce, quand même ! Il y a tant de choses pour lesquelles nous devons être reconnaissants. Tout ce que la Terre nous donne, à nous de le protéger.