Ça fait des semaines que les deux candidats à la mairie de Montréal Marc-Antoine Desjardins et Balarama Holness déplorent le fait que les médias leur accordent peu d’attention. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils ont été accueillis en véritables vedettes jeudi matin devant l’hôtel de ville.

L’annonce de la fusion des partis qu’ils représentent, Ralliement pour Montréal et Mouvement Montréal, vient mettre encore plus de piquant dans cette campagne qui, en effet, semble mettre uniquement de l’avant Valérie Plante et Denis Coderre.

Cette décision, prise au cours des derniers jours, a été nourrie par le récent sondage Léger-Le Devoir, qui a donné à ces deux candidats un total de 13 % des intentions de vote (contre 37 % pour Denis Coderre et 36 % pour Valérie Plante).

Jeudi matin, lors de l’annonce, les deux hommes, gonflés à bloc, ont martelé qu’ils en avaient marre de la division et que leur union marquait le début d’une « ère de changement ». On a même parlé d’une « journée historique ».

Les candidats ont aussi rappelé que la grande majorité des idées et des valeurs qu’ils prônent, sur le plan environnemental, économique et social, se ressemblent beaucoup. C’est vrai. Alors, pourquoi ne pas parler d’une même voix et utiliser la soixantaine de candidats dont ils disposent pour être une avenue de choix ?

Marc-Antoine Desjardins et Balarama Holness ont compris qu’ils se dirigeaient tous les deux vers un succès paroissial au terme de cette campagne et qu’en unissant leurs forces, ils pouvaient brasser la cage.

Ils ont aussi compris qu’il y a une vaste catégorie d’électeurs à prendre en ce moment.

Vous êtes nombreux à m’écrire la même chose depuis quelques jours : vous n’avez pas envie de voter pour Valérie Plante, mais vous n’êtes pas tentés non plus d’aller du côté de Denis Coderre.

Le dernier sondage Léger faisait état de 14 % d’indécis ou, si vous préférez, d’électeurs qui ne sont pas comblés.

Bref, cette fusion est un étonnant revirement de situation dans la campagne qui se joue et une option intéressante.

Mais il y a un mais…

Balarama Holness s’affiche depuis le début de sa campagne comme le candidat qui veut faire de Montréal une ville bilingue, une idée que ne défend pas Marc-Antoine Desjardins. Ce dernier a placé la valorisation de la langue française bien en haut du manifeste de son parti.

Ce sujet a fait l’objet de discussions au cours des derniers jours et Balarama Holness a été amené à revoir sa position. Jeudi, on s’est contenté de dire qu’on ne toucherait pas à la Charte de la Ville tout en promettant plus de nuances au cours du week-end.

N’empêche que cet aspect met du sable dans l’engrenage de ce mariage surprise. C’est un pari risqué qu’a fait Marc-Antoine Desjardins en offrant sur un plateau d’argent sa vingtaine de candidats à Balarama Holness, avec qui il échange des « clins d’œil » depuis quelques semaines.

Mais que serait la politique sans les risques et des coups de poker ?

J’ai demandé aux deux hommes de me parler de la réaction de leurs candidats. Ils ont été évasifs, préférant dire qu’ils préparaient un grand rassemblement avec les membres des deux équipes samedi après-midi.

Imaginez un peu : vous décidez de vous porter candidat pour Marc-Antoine Desjardins et, à cinq semaines du scrutin, vous devenez le représentant d’un autre candidat qui plaide pour que la métropole devienne bilingue. C’est sûr que la pilule doit passer de travers pour certains.

Les réactions n’ont pas tardé à venir de supporteurs se disant trompés jeudi sur les réseaux sociaux. Il faudra attendre de voir la quantité d’eau que Balarama Holness mettra dans son vin avant de se faire une idée plus juste.

Cela dit, si Balarama Holness joue bien ses cartes, s’il séduit l’électorat anglophone et celui des communautés culturelles, s’il réussit à ne pas trop se mettre à dos les francophones, il pourrait permettre à son parti de faire des gains et faire de lui une voix critique importante.

Car, il faut bien se le dire, à part Ensemble Montréal, l’administration Plante a eu les coudées franches au cours des quatre dernières années. Équipe Anjou et Équipe Barbe (renommée Équipe LaSalle) n’ont pas tapé du pied très fort. Une autre opposition forte serait souhaitable.

Mais surtout, si Balarama Holness prend du galon, il va brouiller les cartes de cette campagne.

Valérie Plante et Denis Coderre doivent se poser certaines questions en ce moment. Il ne faudra pas s’étonner de voir que des flèches sont maintenant dirigées vers cet adversaire.

Jeudi soir, lors de la rencontre organisée par les Amis de la montagne sur l’avenir du mont Royal (qui a pris la forme d’une séance de signatures de divers engagements – ce n’est pas tous les organismes qui ont ce privilège), il a réussi à tirer son épingle du jeu même si ses deux adversaires l’ont supplanté grâce à l’expérience du mandat qu’ils possèdent. Cette soirée nous a également permis de voir que Denis Coderre a semblé « cruiser » ce troisième joueur. À suivre…

Balarama Holness qui, à 38 ans, est le plus jeune des candidats à la mairie devra maintenant mettre les bouchées doubles (il a mis beaucoup de temps à s’imposer) et faire de grandes enjambées au cours des prochaines semaines.

Il faut surtout qu’il apprenne, comme ses deux autres adversaires, à occuper le fameux « espace médiatique » en faisant des annonces solides.

À vous de jouer, monsieur Holness !

Appel à tous !

Une fois de plus, vous allez apposer un X à côté du nom d’un homme ou d’une femme appelé(e) à diriger les destinées de votre ville. J’aimerais savoir : quelles sont, selon vous, les qualités d’un maire ou d’une mairesse idéal(e) ?

Écrivez-moi !