J’ai quitté le Palais des congrès de Montréal, où je venais de recevoir ma seconde dose, en me disant une fois de plus que cette gigantesque opération est vraiment impressionnante.

Pas (ou peu) d’attente, un personnel accueillant et sympathique, un système hyper rodé… Tout cela mérite notre admiration.

Mais il y a une autre raison d’être fier de ceux qui travaillent d’arrache-pied à nous protéger, et c’est l’incroyable énergie qu’ils déploient à aller à la rencontre de ceux pour qui une prise de rendez-vous ne semble pas être une priorité.

Après l’opération au Centre Bell et la remise de hot-dogs gratuits, voilà que des brigades se rendent dans des parcs, des campings et des centres commerciaux pour vacciner ceux qui jouent aux indifférents.

Un chausson avec ça ?

Le week-end dernier, une équipe était présente au parc Jean-Drapeau afin de vacciner sur place les fidèles du Piknic Électronik. Cet évènement attire surtout des jeunes qui font partie du groupe des 18-39 qui, selon les plus récentes données, est le moins pressé de se protéger.

Avec un taux de vaccination de 68 % pour la première dose, la tranche des 18-29 ans traîne la patte. À titre comparatif, le groupe des 30-39 ans atteint un taux de 73 % et celui des 40-49 ans, près de 79 %.

Cela est d’autant plus inquiétant que le groupe des 20-29 ans, qui s’est fait doubler en quelques semaines par celui des 12-17 ans (qui affiche maintenant un taux de 76 %), connaît actuellement une augmentation de cas positifs. Au cours de la dernière semaine, le nombre est passé de 13 à 17 au quotidien.

Le ministre Christian Dubé ne cesse de multiplier les encouragements à l’endroit des 18-39 ans. Il l’a encore fait le week-end dernier sur les réseaux sociaux.

Bref, tout cela pour vous dire que je suis à la fois renversé et ébahi de voir les responsables de la campagne de vaccination faire preuve d’autant d’ingéniosité et d’énergie pour parvenir à planter une petite seringue dans le bras des réfractaires ou des insouciants.

Inspiré par les États-Unis, François Legault a jonglé avec l’idée de créer une loterie ou des « récompenses de toutes sortes » afin d’inciter les jeunes de 18 à 39 ans à venir se faire vacciner.

Des récompenses ? Eh oui, on va offrir des cadeaux et des gros lots (pourquoi pas des timbres-primes ?) pour que les gens sauvent leur vie et celle des autres.

Cela dit, ce n’est pas juste au Québec qu’on sort les fanfares et les majorettes pour réveiller les citoyens. Aux États-Unis, une jeune étudiante de l’Ohio a remporté 1 million de dollars à une « loterie vaccin » appelée Vax-a-Million. Dans l’État de Washington, on a eu l’idée d’offrir un joint de cannabis en retour d’un vaccin (j’imagine que la douleur au bras passe mieux).

En Virginie-Occidentale, on a organisé un concours à l’occasion de la fête des Pères permettant de gagner une camionnette, un permis de chasse ou… un fusil.

En France, le groupe des 18-39 semble plus motivé. Il faut dire que depuis le 30 juin, les évènements de plus de 1000 personnes sont permis dans l’Hexagone. Mais pour cela, il faut respecter les conditions du « pass sanitaire ».

Disons qu’ici, pour le moment, il est facile de se faufiler entre les gouttes lors des grands rassemblements. Vous avez vu les foules de dimanche dans la Petite Italie ? La pandémie n’existait plus pour personne.

Ce qui me déprime dans toute cette affaire, c’est qu’on se fait vacciner pour avoir un hot-dog, parce qu’on vient directement à nous ou parce que cela va nous permettre de faire la fête. On ne le fait pas pour les vraies raisons.

Au cours des prochaines semaines, des équipes de la Santé publique iront dans divers endroits du Québec à bord de véhicules qu’on a nommés Vaccibus, Vaccivan, Vaccin-O-Bus, Vacc-I-Express et tutti quanti. On pourra ainsi se rendre dans des coins éloignés des grands centres de vaccination.

Jusque-là, tout va.

Les personnes âgées qui faisaient partie des premiers groupes avaient des raisons valables de ne pas se déplacer. Les personnes à mobilité réduite aussi.

Jusque-là, tout va.

Mais les autres, qui sont en forme et qui trouvent le temps d’aller chiller avec des amis le dimanche après-midi, mais qui n’ont pas celui qui leur permettrait de prendre un rendez-vous pour se faire vacciner, j’avoue que je trouve ça fort de café.

On ne parle pas d’enfants ici, ni d’adolescents. On parle d’adultes majeurs et… non vaccinés. Le succès de la lutte contre cette pandémie passe par la vaccination. On ne cesse de le répéter depuis des mois. Ce je-m’en-foutisme est de l’ordre de l’incompréhensible.

Je le dis et je le répète : bravo aux équipes de vaccination de déployer autant d’efforts, de revoir leur stratégie et d’augmenter le degré de difficulté de cette opération déjà archicomplexe en créant ces brigades volantes.

J’espère que lorsque nous aurons atteint le seuil qui nous permettra de retrouver collectivement cette fameuse « normalité » à laquelle nous aspirons tous, on pensera très fort à vous.

J’espère aussi qu’après tout cela, vous trouverez du temps pour aller vous amuser au Piknic Électronik.