Réduction des pesticides, aménagements favorables à la biodiversité, protection des sols : Québec continuera de payer les agriculteurs qui adoptent de meilleures pratiques environnementales. Le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, annoncera ce vendredi une bonification de 34 millions du programme de rétribution financière des pratiques agroenvironnementales à la ferme, a appris La Presse.

Ce qu'il faut savoir

  • La carotte plutôt que le bâton : Québec annoncera ce vendredi qu’il bonifiera de 34 millions le programme de rétribution financière des pratiques agroenvironnementales à la ferme.
  • Au total, près de 4000 agriculteurs seront récompensés financièrement pour l’adoption de pratiques durables.
  • Les producteurs agricoles peuvent aller chercher jusqu’à 50 000 $ sur trois ans.

Grâce à ce financement additionnel, plus de 1200 entreprises agricoles québécoises pourront s’ajouter aux 2800 fermes déjà inscrites au programme lancé en 2022, le premier du genre au Canada. En comptant les sommes allouées depuis le début, c’est donc 119 millions en « aide directe » qui sera versée aux producteurs.

« Le choix qu’on a fait au Québec, c’est d’être en accompagnement et d’y aller avec la carotte », a expliqué le ministre André Lamontagne en entrevue avec La Presse.

« Plutôt que de taper sur les agriculteurs, l’idée, c’est de les accompagner, les sensibiliser, leur donner les moyens, les former et accélérer le transfert de connaissances. Nous, c’est le pari qu’on fait. C’est ça qui va être le plus payant pour le Québec à plus long terme », a-t-il ajouté.

Jusqu’à 50 000 $ en rétribution

Les entreprises qui adoptent des pratiques favorables à la biodiversité comme des bandes riveraines élargies ou des haies brise-vent peuvent aller chercher jusqu’à 50 000 $ sur trois ans. L’utilisation de semences non traitées aux insecticides, la réduction de l’usage des herbicides et la plantation de cultures de couverture en hiver sont aussi des pratiques récompensées.

« La plupart des producteurs et des productrices sur le territoire, ils sont de bons citoyens et ils essaient de faire ce qu’ils ont à faire pour avoir les meilleures pratiques, mais là, ce qu’on leur demande, c’est qu’ils augmentent leur game pour faire plus que le client en demande », a souligné le ministre André Lamontagne.

Jusqu’à présent, près de 400 000 hectares cumulés ont été cultivés avec des approches durables qui vont au-delà des exigences réglementaires.

Au Québec, près de 2 millions d’hectares sont cultivés, ce qui représente environ 2 % du territoire de la province. Environ 1 million d’hectares sont admissibles au programme, principalement des champs de maïs-grain, de soya et de légumes.

Moins de pesticides et d’engrais chimiques

L’approche consistant à récompenser financièrement les bons élèves est la pierre d’assise du Plan d’agriculture durable (PAD) 2020-2030. Ce plan vert agricole a été adopté dans la foulée de l’affaire Louis Robert, cet agronome du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) qui avait perdu son emploi après avoir dénoncé l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides.

Le PAD vise à faire chuter de 15 % le volume de pesticides vendus à l’échelle de la province et de 40 % l’indice qui chiffre les risques théoriques des pesticides sur la santé et l’environnement.

À terme, Québec vise à réduire de 15 % la concentration totale en phosphore dans les cours d’eau de la province et de 15 % les apports de matières fertilisantes azotées sur les superficies en culture.

Initialement, le PAD était doté d’un budget de 70 millions. Devant l’engouement du monde agricole, Québec l’avait déjà bonifié de 15 millions en 2022.

Pour ce troisième tour de roue, Ottawa injectera 24 millions sur les 34 millions dans le cadre du nouveau Partenariat canadien pour une agriculture durable 2023-2028.

L’ancienne ministre fédérale de l’Agriculture Marie-Claude Bibeau, avec qui M. Lamontagne avait signé ce partenariat à Montréal en mars 2023, sera d’ailleurs présente à l’annonce, qui se déroulera dans une ferme de Saint-Hyacinthe.

« Des fois, les producteurs et productrices hésitent à poser des gestes parce qu’ils ont déjà une recette. […] Ils vont hésiter à essayer de nouvelles choses parce qu’il y a une question de coûts et de risque financier, et ce que l’on fait avec la rétribution, c’est qu’on vient partager ce risque-là », a ajouté M. Lamontagne.