(Montréal) Il est désormais interdit aux vétérinaires de la province de pratiquer des chirurgies esthétiques sur des animaux de compagnie.

Le Règlement sur le bien-être et la sécurité des animaux domestiques de compagnie et des équidés, qui entre en vigueur ce samedi, vise à interdire quatre chirurgies qui étaient jusqu’à présent permises, mais fortement déconseillées par l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ) : le dégriffage félin, la taille d’oreille, la taille de queue et l’ablation des cordes vocales.

Le président de l’OMVQ, Dr Gaston Rioux, a accueilli favorablement cette nouvelle législation en mentionnant qu’elle reflétait les valeurs fondamentales de l’Ordre et de la société québécoise vis-à-vis le bien-être des animaux.

Dr Rioux a indiqué que de nombreuses cliniques vétérinaires avaient cessé de pratiquer le dégriffage félin, sous les recommandations de l’Ordre, mais que seul le gouvernement du Québec avait le pouvoir de l’interdire formellement.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Dr Gaston Rioux

Ce n’est pas un mouvement qui est unique au Québec. Mondialement, c’est le type de chirurgie qui est interdite et déconseillée aussi.

Dr Gaston Rioux, président de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ)

Au Canada, l’Ontario est la seule province à ne pas encore avoir interdit le dégriffage des chats. Une disposition dans le nouveau règlement interdit de se déplacer pour faire subir une chirurgie interdite à son animal à l’extérieur de la province.

L’ancienne présidente de l’Ordre, Dre Caroline Kilsdonk, a précisé, de son côté, que la coupe des oreilles et de la queue ainsi que l’ablation des cordes vocales n’étaient plus pratiquées par des médecins vétérinaires depuis plusieurs années au Québec, mais qu’il était encore possible de faire faire ces opérations par des non-vétérinaires.

Des chirurgies jugées inhumaines

Les médecins vétérinaires contactés jugent que ces opérations sont non seulement futiles au bien-être des animaux de compagnie, mais qu’elles peuvent également occasionner des effets nocifs sur la santé et le comportement de ces animaux.

Le Dr Rioux explique que ces quatre chirurgies comportent des risques opératoires liés, entre autres, à l’anesthésie générale que doivent subir les animaux lors de la procédure. Le président de l’Ordre est d’avis qu’il est inhumain de mettre en danger des animaux lorsque l’effet recherché est purement esthétique.

Notamment, la taille des oreilles était traditionnellement pratiquée sur des chiens pour répondre à certaines normes esthétiques de race. Le médecin vétérinaire cite l’exemple du doberman, dont les standards de beauté imposent des oreilles pointues.

Bien que la taille de la queue tombe également dans la catégorie des chirurgies esthétiques, la Dre Kilsdonk précise qu’il était d’usage de couper la queue de chiens de chasse pour prévenir les fractures à ce membre.

La vétérinaire a soutenu que cette pratique est désormais obsolète puisque les études récentes démontrent que « les chiens qui chassent sont devenus rares et que les blessures à la queue le sont encore plus ». « Une étude a démontré qu’au fond, la queue de milliers de chiens était taillée pour éviter qu’il y en ait un qui se blesse éventuellement », a-t-elle affirmé.

Problèmes de comportement

L’ablation des cordes vocales ou la dévocalisation consiste à retirer les cordes vocales d’un animal, généralement un chien, pour qu’il soit moins bruyant. « Tout comme le dégriffage félin, il s’agit d’une opération effectuée pour assurer le confort du propriétaire de l’animal », explique Dre Kilsdonk.

La dévocalisation n’empêche pas complètement un chien de japper, mais diminue considérablement le son de sa voix. « Ce n’est pas considéré comme très humanitaire parce que si un chien jappe excessivement, il a sûrement un problème d’anxiété ou d’ennui. On ne s’occupe que du symptôme et non de la cause du problème », ajoute-t-elle.

Il arrive parfois que les animaux domestiques développent des problèmes de comportement après avoir subi l’une ou l’autre de ces chirurgies. C’est particulièrement le cas des chats qui se font dégriffer. Cette opération, qui remonte aux années 1950, consiste à retirer les griffes, soit l’équivalent de la troisième phalange pour un humain.

« Comme c’est le cas avec les humains, une douleur chronique peut apparaître à l’endroit d’un membre coupé », rappelle le Dr Rioux.

« Aujourd’hui, on sait que 30 % des chats dégriffés ont des problèmes de comportement et d’agressivité et 15 % vont mordre davantage », souligne le Dr Gaston Rioux. En outre, cette opération rend les coussinets des pattes plus sensibles. « Ça peut mener le chat à faire ses besoins en dehors de la litière à cause de la douleur causée par les petites roches », ajoute le président de l’OMVQ.

Le Dr Rioux et la Dre Kilsdonk saluent d’autres dispositions du règlement visant à améliorer le bien-être des animaux, dont l’encadrement plus sévère des conditions d’élevage.

André Lamontagne, ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation et responsable de l’application de ces mesures législatives, s’est dit heureux de l’entrée en vigueur du règlement. Il a reconnu dans un communiqué que les animaux domestiques « prennent une place de plus en plus importante dans la vie des Québécois » et que tous ont « un rôle à jouer pour assurer leur bien-être et leur sécurité ».