La gravité de la crise humanitaire dans la bande de Gaza indigne Oxfam international, qui accuse le gouvernement israélien d’utiliser la faim comme « arme de guerre » pour « punir collectivement » la population du territoire palestinien à la suite de l’attaque du Hamas du 7 octobre.

« La situation est tout simplement horrible – où est l’humanité ? », a demandé mercredi dans un communiqué la directrice de l’organisation au Moyen-Orient, Sallu Abi Khail, qui presse les « dirigeants du monde » d’intervenir pour convaincre Tel-Aviv d’alléger le blocus empêchant l’entrée d’eau, de nourriture et de carburant.

Oxfam a calculé que moins de 2 % de l’aide alimentaire qui aurait normalement été livrée à Gaza au cours des deux dernières semaines avait pu arriver à destination, ce qui entraîne d’importantes pénuries.

  • Manifestation en appui à la libération des otages israéliens détenus par le Hamas organisée devant l’ambassade de l’Allemagne à Tel-Aviv

    PHOTO AHMAD GHARABLI, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Manifestation en appui à la libération des otages israéliens détenus par le Hamas organisée devant l’ambassade de l’Allemagne à Tel-Aviv

  • Des personnes ayant quitté Khan Younès reviennent autour de l’hôpital al Shifa, à Gaza.

    PHOTO DAWOOD NEMER, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Des personnes ayant quitté Khan Younès reviennent autour de l’hôpital al Shifa, à Gaza.

  • Des soldats israéliens montent la garde sur une route près de Sdérot, à proximité de la frontière avec la bande de Gaza.

    PHOTO MENAHEM KAHANA, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Des soldats israéliens montent la garde sur une route près de Sdérot, à proximité de la frontière avec la bande de Gaza.

  • Attaque aérienne dans le nord de la bande de Gaza vue à partir de la ville israélienne de Sdérot.

    PHOTO RONALDO SCHEMIDT, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Attaque aérienne dans le nord de la bande de Gaza vue à partir de la ville israélienne de Sdérot.

1/4
  •  
  •  
  •  
  •  

Durant cette période, près des trois quarts des deux millions de résidants du territoire ont dû abandonner leurs logements pour échapper aux bombardements de l’armée israélienne, qui entend « détruire » le Hamas.

Ils ont fait plus de 6500 morts, selon les autorités locales, un bilan mis en doute mercredi par le président américain, Joe Biden.

La sortie d’Oxfam survient au lendemain d’une intervention controversée du secrétaire général des Nations unies, António Guterres, sur le même sujet.

Le représentant onusien a indigné les autorités israéliennes en déclarant lors d’un débat au Conseil de sécurité à New York que l’attaque du Hamas, qui a tué près de 1400 Israéliens, ne pouvait justifier l’imposition d’une punition collective à la population de Gaza.

M. Guterres est revenu sur sa déclaration mercredi en relevant qu’il n’avait d’aucune façon cherché à justifier les « actions terroristes » de l’organisation islamiste tandis qu’Israël annonçait son intention de refuser les demandes de visas émanant de représentants « hostiles » des Nations unies.

L’Espagne, qui préside actuellement l’Union européenne, et le Portugal sont intervenus en soutien à M. Guterres. Le premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, a demandé du même coup une trêve humanitaire pour faciliter l’acheminement de l’aide à la population de Gaza avant le déclenchement attendu d’une importante offensive terrestre.

Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré mercredi à la télévision, sans préciser de calendrier, que l’armée « se préparait » pour aller de l’avant et viserait à détruire les capacités « militaires et gouvernementales » du Hamas.

Les bombardements sont décrits par Tel-Aviv comme une étape importante en vue « d’améliorer » la position stratégique des troupes avant leur entrée à Gaza.

Israël veut notamment détruire l’important réseau de tunnels construit par l’organisation islamiste, qui détient près de 220 otages, dont plusieurs dizaines d’étrangers.

Le Qatar, qui joue un rôle de médiateur, a indiqué mercredi qu’il pourrait « bientôt » y avoir de nouveaux développements sur ce plan après la libération de quatre femmes, tout en insistant sur la nécessité d’une solution négociée au conflit.

Aucune avancée ne se dessine sur ce plan, Israël et le Hamas maintenant le cap vers un affrontement terrestre frontal qui pourrait prendre une importante portée régionale si l’Iran, hostile à Israël et aux États-Unis, décidait de lancer ses milices dans la mêlée.

Le Wall Street Journal a indiqué mercredi que les autorités israéliennes avaient accepté de retarder l’opération terrestre en attendant l’arrivée de systèmes antimissiles pouvant protéger les soldats américains présents dans plusieurs pays de la région de tirs hostiles.

Deux systèmes sophistiqués de défense aérienne de type « Dôme de fer » doivent par ailleurs être acheminés en Israël pour renforcer les mesures de protection en place.

Tel-Aviv doit composer avec la menace du Hezbollah, un puissant mouvement chiite établi au Liban, contrôlé par l’Iran, qui dispose de dizaines de milliers de missiles.

Nicholas Blanford, analyste de l’Atlantic Council établi à Beyrouth, a déclaré mercredi en entrevue que la population libanaise vivait dans la peur d’un nouveau conflit susceptible de faire de nombreuses victimes civiles comme lors du précédent affrontement, en 2006.

Israël, dit-il, ne sortirait pas indemne d’un tel conflit, puisque le Hezbollah a la capacité de cibler ses infrastructures presque partout au pays.

L’organisation islamiste serait pour sa part largement affaiblie à l’issue des combats et devrait composer ensuite avec l’opposition de la population libanaise, y compris des chiites qui constituent sa base traditionnelle, note M. Blanford.

PHOTO JALAA MAREY, AGENCE FRANCE-PRESSE

L’artillerie israélienne cible le village libanais de Maroun al-Ras, face à Avivim, lors d’affrontements à la frontière avec la milice du Hezbollah et des alliés palestiniens.

À l’instar d’autres analystes interrogés par La Presse, il ne croit pas que l’Iran voudra prendre le risque de perdre le Hezbollah pour sauver le Hamas.

Les affrontements limités survenus depuis deux semaines à la frontière d’Israël et du Liban – qui se passent dans une bande terrestre d’environ cinq kilomètres de profondeur – montrent que les deux camps sont conscients des risques et veulent minimiser la possibilité d’escalade, note-t-il.

Le déclenchement de l’offensive terrestre à Gaza va sans doute entraîner une intensification des tensions, mais les affrontements devraient demeurer limités, relève l’analyste, qui ne peut exclure complètement le scénario du pire.

« Si jamais le Hezbollah tire un missile vers une ville israélienne importante et inflige d’importants dommages, ce sera le signe pour moi que les gants sont tombés », conclut-il.

Avec l’Associated Press, l’Agence France-Presse et Reuters