(Ottawa) Le Canada a été contraint de réduire considérablement sa présence diplomatique en Inde au cours des dernières heures, un signe indéniable que les tensions entre Ottawa et New Delhi sont loin de s’apaiser.

L’histoire jusqu’ici

  • Justin Trudeau a soutenu le 18 septembre que des agents liés au gouvernement indien auraient joué un rôle dans l’assassinat d’un Canadien d’origine sikhe en juin dernier à Surrey, en Colombie-Britannique.
  • L’Inde a nié vigoureusement ces allégations.
  • Les relations diplomatiques entre les deux pays sont au plus bas depuis. L’Inde a exigé et obtenu le départ de 41 des 62 diplomates canadiens en poste sur son territoire.

Le Canada n’a eu d’autre choix que de donner suite à la requête du gouvernement indien qui exigeait qu’Ottawa réduise la taille de la représentation canadienne en Inde de manière qu’elle soit comparable à celle que maintient New Dehli au Canada.

Résultat : 41 diplomates canadiens et leurs proches ont quitté le territoire indien. Leur départ survient après deux semaines de pourparlers entre les deux pays visant à établir une « parité » diplomatique.

La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a confirmé le départ des diplomates canadiens durant une conférence de presse jeudi. Elle a indiqué que cette escalade des tensions entre les deux pays allait affecter les services aux ressortissants canadiens qui se trouvent en Inde et aux citoyens de ce pays qui souhaitent venir au Canada.

Le haut-commissariat du Canada à New Dehli demeure ouvert, mais les services offerts dans les consulats de Chandigarh, Bombay et Bangalore seront considérablement réduits.

La ministre a précisé que le Canada avait été contraint de rapatrier les diplomates et leurs proches parce qu’ils risquaient de se voir retirer leur immunité diplomatique – ce qui aurait pu mettre en danger leur sécurité et celle de leurs familles.

« C’est clairement contraire au droit international et contraire à la Convention de Vienne », a dit la cheffe de la diplomatie canadienne, qui était accompagnée du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marc Miller.

Mme Joly a indiqué que le gouvernement indien n’avait fourni « aucune raison » pour justifier cette décision.

New Delhi avait donné au Canada jusqu’au 10 octobre pour rapatrier au moins 41 de ses diplomates en poste. Le gouvernement Trudeau avait entretenu l’espoir de trouver un compromis en insistant sur un dialogue diplomatique. Mais le gouvernement de Narendra Modi n’a pas voulu jeter du lest.

« Quels que soient leur pays d’origine et leur lieu d’affectation, les diplomates doivent pouvoir faire leur travail sans crainte de représailles de la part du pays dans lequel ils se trouvent. Il s’agit d’un principe fondamental de la diplomatie et ces règles ne fonctionnent que si chaque pays les respecte », a insisté la ministre.

Cela dit, le Canada n’a pas l’intention de riposter en imposant d’autres mesures de représailles.

Si nous acceptons cette façon de faire, aucun diplomate, où qu’il soit, ne sera en sécurité sur la planète. Pour cette raison, le Canada n’adoptera pas la même approche que l’Inde.

Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada

De son côté, le ministre Marc Miller a indiqué que le Canada allait continuer de traiter les demandes de résidence permanente et temporaire en provenance de l’Inde. Toutefois, il a prévenu que la décision de l’Inde aurait des conséquences sur leur traitement.

« Les clients risquent de voir les délais de traitement s’allonger et devront attendre plus longtemps pour obtenir des réponses à leurs questions ou un visa sur leur passeport », a dit M. Miller.

Un froid diplomatique s’est installé entre le Canada et l’Inde depuis quelques années. Mais les relations entre les deux pays sont au plus bas depuis que le premier ministre Justin Trudeau a mis l’Inde au banc des accusés. Dans une déclaration qu’il a faite à la Chambre des communes le 18 septembre et qui a secoué les chancelleries à travers la planète, il a affirmé que le Canada détenait « des allégations crédibles » selon lesquelles des agents liés au gouvernement indien auraient joué un rôle dans l’assassinat d’un Canadien d’origine sikhe, Hardeep Singh Nijjar, en juin à Surrey, en Colombie-Britannique.

New Delhi a vigoureusement nié ces accusations en affirmant qu’elles étaient « absurdes ». Hardeep Singh Nijjar était accusé de complot pour meurtre et de terrorisme en Inde. Il aurait fait l’objet de menaces de mort en raison de son soutien à un État sikh indépendant du Khalistan, en Inde.

Dans la foulée de la déclaration du premier ministre, le Canada a expulsé un diplomate indien du plus haut niveau, Pavan Kumar Rai. La riposte du gouvernement Modi a été immédiate. Il a expulsé à son tour un haut diplomate canadien en poste en Inde.

Trois jours plus tard, soit le 21 septembre, le gouvernement indien a annoncé qu’il suspendait jusqu’à nouvel ordre le traitement des demandes de visa soumises par des citoyens canadiens.