Des consultations parlementaires déterminantes pour l’avenir du projet de loi 29 portant sur l’obsolescence et le droit à la réparation se sont ouvertes cette semaine à Québec. La première journée a été marquée par le passage de plusieurs experts représentant les consommateurs, notamment du secteur automobile. La plupart s’entendent pour dire que le projet de loi 29 est nécessaire, mais que le gouvernement du Québec devra aller plus loin pour protéger les consommateurs. Notamment avec un système de sanctions.

Garantie plancher

L’un des témoignages phares est venu d’un chargé de cours en droit de l’Université de Sherbrooke, Jonathan Mayer, dont les étudiants sont à l’origine de la loi sur le point d’être adoptée. Selon lui, la législation marque un « pas dans la bonne direction, mais elle est nettement insuffisante ». Il faudrait inclure de l’information directement sur les emballages et des mesures incitatives auprès des manufacturiers, insiste-t-il.

« La garantie de bon fonctionnement prévue dans le projet de loi vient établir une durée de vie plancher. Sauf que les durées vont être établies par le gouvernement. Il faudrait s’inspirer de l’Europe avec son indice de réparabilité, en fixant à l’achat une durée de cinq ans sur les électroménagers, pour la réparation et l’entretien. Et une durée légale de deux ans pour les appareils électroniques », estime-t-il.

Loi robuste

Équiterre réclame un droit à la réparation « robuste » et « accessible. » L’organisme y va de nombreuses recommandations, notamment la mise en marché d’un chargeur universel, l’accessibilité à des logiciels de mise à jour, l’instauration de garantie prolongée, l’accès à de la main-d’œuvre en réparation et à des ressources pour qu’un consommateur puisse réparer lui-même ses appareils.

Selon Équiterre, il est impératif que la loi prévoie également l’augmentation du « montant des sanctions liées aux pratiques d’obsolescence programmée afin qu’elles soient dissuasives pour les fabricants ». En ce qui concerne la réparabilité, Équiterre suggère d’inclure dans le « prix raisonnable d’une réparation le coût des pièces, et le cas échéant, le coût de la main-d’œuvre ».

Enfin, l’organisme, qui a rédigé le mémoire avec la contribution de plusieurs partenaires, dont la fondation David Suzuki et l’Association québécoise zéro déchet, demande au gouvernement de mettre en place des campagnes d’informations, de sensibilisation et d’éducation. « Il faut que les changements se rendent aux oreilles » des gens, indique Équiterre.

Le poids total des ressources nécessaires à la production d’un électroménager est 15 à 100 fois plus élevé que sa masse finale.

Équiterre

Les fameux citrons

La nouvelle loi prévoit aussi le droit à la réparation automobile. Le gouvernement Legault souhaite en finir avec les fameux citrons grâce à une plus grande responsabilisation des grands constructeurs.

Jean-François Champagne est président et directeur général de l’Association des industries automobiles du Canada (AIA). Il a d’abord rappelé que l’industrie de l’entretien et de la réparation automobile au Québec compte pour 7 milliards de dollars en revenus annuellement.

Avec la montée en flèche des voitures « dites connectées », l’AIA invite les députés québécois à adopter rapidement la loi. Selon M. Champagne, il est urgent de mettre fin au monopole des constructeurs qui « gardent jalousement » les données de divers capteurs et systèmes de télémétrie.

« Les garages et ateliers indépendants que nous représentons se retrouvent souvent dans l’impossibilité de proposer des services appropriés aux conducteurs de véhicules connectés. Et avec l’électrification du transport au Québec, il est essentiel d’avoir accès à des services d’entretien et de réparation partout, même en région », a-t-il dit.

Temps de réparation

En fin d’après-midi, mardi, le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, s’est dit ouvert à encadrer le temps qu’un commerçant aura pour réparer un bien défectueux. Dans son mémoire, l’Union des consommateurs a demandé que le délai maximal pour la réparation soit fixé à 25 jours. « Il y a un équilibre à atteindre aussi en fonction de la disponibilité des pièces et pour l’entreprise qui doit la réparer aussi », a toutefois indiqué le ministre Jolin-Barrette.

Mercredi, des experts du domaine manufacturier et de l’exportation au Québec prendront la parole. Les audiences se termineront avec les observations du Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire.

Avec La Presse Canadienne