L’image qu’on se fait des étudiants étrangers est souvent idyllique, nourrie par des films comme L’auberge espagnole, où le tourisme et les loisirs prennent le pas sur les études. Mais il y a une face cachée aux études internationales, dont La Presse a pu mesurer l’ampleur en découvrant que de nombreux étudiants d’ailleurs font appel aux banques alimentaires.

Au Café latino, par exemple, 40 % des clients de la banque alimentaire aménagée à l’arrière du commerce, rue Saint-Hubert, sont des étudiants étrangers.

C’est le cas de Blanca Soto, une habituée de la banque alimentaire, venue ici faire un DEC dans un collège privé de Montréal.

D’autres, sans avoir besoin de ce soutien, doivent trimer dur, comme Dan Nguyen, qui cumule deux emplois pour joindre les deux bouts.

D’où vient cet écart entre l’image et la réalité, si différente de celle que des milliers de jeunes Québécois ont vécue en allant faire une session universitaire à l’étranger ?

Beaucoup d’étudiants étrangers viennent de pays en développement et ils ne sont pas toujours issus de familles aisées. Mais il y a une autre explication : une proportion appréciable veut d’abord et avant tout immigrer au Canada. Pour ces étudiants, les études sont un moyen d’entrer au pays et d’y rester.

Blanca Soto en est l’illustration parfaite.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Blanca Soto

Je fais ce cours pour avoir la résidence.

Blanca Soto, 35 ans

La Mexicaine de 35 ans a fait un baccalauréat en enseignement de l’anglais, à Mexico, où elle a ensuite travaillé comme professeure pendant cinq ans, avant de venir au Québec avec son mari, en décembre 2020. Elle a étudié dans un établissement privé de Montréal, le Collège LaSalle, où elle a obtenu, en mai, un DEC en gestion.

Une fois qu’elle aura la résidence permanente, Blanca compte s’inscrire à l’Université de Montréal pour faire un baccalauréat en enseignement de l’espagnol.

Le parcours de Dan Nguyen est similaire. Diplômée en biotechnologie dans son pays, elle étudie en hôtellerie dans un collège privé, mais espère faire des études universitaires en finance quand elle aura sa résidence permanente.

Ce genre de cheminement, consistant à s’inscrire dans un programme souvent de niveau inférieur pour venir ici – parfois avec son conjoint et ses enfants –, est très différent de la filière classique, où un étudiant poursuit des études supérieures, souvent payées par ses parents, et choisit de s’établir ou de travailler durablement au pays après l’obtention de son diplôme.

La situation de nombreux étudiants étrangers est d’autant plus difficile que leur séjour au Québec leur coûte cher (voir dernier onglet). En plus du coût de la vie quotidienne, ils doivent payer des droits de scolarité élevés, surtout pour les étudiants provenant de pays dont le niveau de vie est faible.

Le programme collégial que Bianca Soto a suivi au Collège LaSalle lui a coûté 47 500 $.

Au début, c’était très difficile. Je ne pouvais pas trouver d’emploi à cause de mes heures de cours. En plus, en janvier 2021, les commerces étaient fermés. Je ne pouvais pas acheter de bottes et de vêtements chauds pour l’hiver. Je ne trouvais rien pour me protéger du froid.

Blanca Soto, 35 ans

Son premier appartement, un studio près de la station D’Iberville, coûtait 600 $ par mois. Son mari et elle y sont restés deux ans avant de déménager dans un trois et demie, à 800 $ par mois.

« C’était dur pour mon mari de trouver du travail en arrivant ici, explique Blanca. Il a eu un emploi de nuit dans un entrepôt de Dollarama. Après, il a travaillé au supermarché Sabor Latino comme laveur de vaisselle. Puis, quand certaines restrictions ont été levées, il a reçu un appel d’un studio de jeux vidéo. »

Pour sa part, Blanca a trouvé un premier emploi dans un salon funéraire, où elle faisait le ménage la nuit. « J’aimais ça, assure-t-elle. Mais quand j’ai été admise au cours de francisation, j’ai réalisé que j’allais recevoir une somme équivalente à mon salaire. Je suivais 20 heures de cours de francisation par semaine et je recevais 350 $ par mois. »

En savoir plus
  • 93 370
    Nombre de titulaires de permis d’études au Québec au 31 décembre 2022
    Source : Ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration
    44 %
    Proportion des étudiants étrangers qui travaillent durant leurs études
    Source : Institut du Québec