Poches de sable, bâches et pompes… Des riverains se sont préparés à vivre (encore) des inondations. La pluie des deux derniers jours, moins abondante que prévu, n’a toutefois pas fait déborder trop de cours d’eau au Québec.

« La dernière fois, ici, ça ressemblait à une maison flottante [boat house] », lance Becky Donohue, une résidante de L’Île-Bizard.

Sa maisonnette, aux apparences de chalet en bois, est encerclée par une muraille d’un mètre et demi de hauteur. C’est que la mère et le beau-père de Becky redoutent les inondations comme celles qu’ils ont vécues en 2019 alors qu’ils venaient tout juste d’emménager dans cette maison louée.

« Mon beau-père a encore un traumatisme de 2019, c’est évident. Il était super impliqué pour protéger notre maison et celles des voisins. Encore aujourd’hui, il essaie d’être préparé. Il vient d’acheter une nouvelle pompe et il a encore remonté son mur de protection parce qu’il n’était pas sûr s’il était assez haut », raconte la femme, alors que son beau-père est justement sorti acheter un boyau compatible avec sa nouvelle pompe à la quincaillerie.

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Becky Donohue

Dimanche, avec la pluie qui a duré toute la journée, l’eau du lac des Deux Montagnes a rampé sur le terrain, s’approchant de plus en plus de la muraille recouverte d’une bâche en plastique.

« Ç’a avancé de deux mètres, peut-être trois. Si ça continue, on va devoir déplacer nos voitures », dit en soupirant Becky Donohue.

La situation aurait quand même pu être pire. Au lieu des 40 mm de pluie qui étaient attendus à Montréal et dans les alentours, la région n’en a reçu qu’entre 15 et 25 mm, dimanche.

« Il reste moins de neige à fondre et la pluie, en plus petite quantité, a été une bonne nouvelle. Le niveau de la plupart des rivières est resté stable ou a augmenté légèrement », explique André Cantin, météorologue à Environnement et changement climatique Canada.

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Quartier Sainte-Geneviève, au bord de la rivière des Prairies

La pluie devait se poursuivre lundi et mardi, mais sous forme d’averses. Ces précipitations intermittentes pourraient laisser jusqu’à 15 mm d’eau dans les Laurentides et Lanaudière, un peu moins à Montréal, dans le Centre-du-Québec et en Mauricie.

Le ministère de la Sécurité publique du Québec confirme aussi que la pluie a fait augmenter le niveau de certains cours d’eau, mais pas de manière inquiétante. Joshua Ménard-Suarez, porte-parole du ministère, parle d’une situation « sous contrôle » et « stable ».

« Dans la plupart des cas, les secteurs inondés sont des secteurs qui sont inondés de façon récurrente, d’année en année. Donc oui, il y a quelques inondations, mais rien d’anormal », souligne M. Ménard-Suarez.

Le ministère garde néanmoins à l’œil les rivières en Outaouais, dans les Laurentides, Lanaudière et la grande région de Montréal, mais rien n’indique que les niveaux de l’eau devraient augmenter de manière imprévue et draconienne, affirme M. Ménard-Suarez.

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Pompes installées de façon préventive à Pierrefonds

À Montréal, la Ville a mis en place des digues ou installé des pompes dans huit arrondissements, dont Pierrefonds-Roxboro, Ahuntsic-Cartierville et Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles ; Sainte-Anne-de-Bellevue a fait de même. Des sacs de sable ont été distribués aux résidences les plus à risque.

Ailleurs au Québec, la rivière du Nord, dans les Laurentides, a causé des inondations moyennes tandis que le lac des Deux Montagnes a provoqué des inondations mineures à Pointe-Calumet.

Distribution de sacs de sable

Fernando Nobrega surveillait justement le niveau de la rivière des Prairies, dans Sainte-Geneviève, lorsque La Presse l’a aperçu scrutant le cours d’eau. L’homme n’est pas particulièrement inquiet pour sa demeure puisque son terrain est légèrement en pente et sa maison n’est pas dotée d’un sous-sol.

Par contre, il ne voudrait pas que ses voisins, des personnes âgées, soient encore inondés comme en 2017 et en 2019. Des sacs de sable ont d’ailleurs été distribués aux résidants de cette rue cossue, mais peu ont été installés en digue.

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Fernando Nobrega

Il faut être conscient qu’à ce temps de l’année, les terrains sont tous inondés. La végétation n’absorbe pas l’eau de pluie.

Fernando Nobrega

L’homme souligne d’ailleurs que quatre ans plus tôt, cette entrevue se serait déroulée les pieds dans l’eau puisque la rivière était beaucoup plus haute.

« En 2017, la rivière ressemblait à peu près à ce qu’elle est aujourd’hui. Puis, du jour au lendemain, l’eau s’est rendue dans la rue », raconte-t-il.

Ce scénario ne devrait toutefois pas survenir ce printemps. Fort heureusement, selon les riverains.