Rénald Grondin, qui a été élu président de la FTQ-Construction même s’il avait agressé sexuellement une secrétaire, a fait des avances à d’autres membres du personnel, révèle une enquête indépendante déclenchée il y a 10 mois.

« Plus d’un témoin a rapporté avoir subi des avances non désirées de la part de [Rénald Grondin] », note MAnaïs Lacroix de la firme Latitude. Par contre, Rénald Grondin « a nié avoir commis les gestes reprochés », précise le rapport rendu public jeudi après-midi et remis au ministre du Travail, Jean Boulet.

La FTQ a déclenché cette enquête externe à la suite des révélations de La Presse sur celui qui est devenu président de la FTQ-Construction, d’abord à titre intérimaire en 2017, puis suivant des élections en 2018. Pendant deux ans, entre 2008 et 2010, il a harcelé et agressé sexuellement au moins une secrétaire alors qu’il était directeur général de l’Association des manœuvres interprovinciales (l’AMI).

Il a fait venir la victime dans son bureau et a verrouillé la porte à plusieurs reprises pour l’agresser. Les gestes sont documentés dans une décision de la Commission des lésions professionnelles datant de 2012.

Le rapport de la firme Latitude révèle toutefois que « la preuve ne démontre pas de façon prépondérante » que le bureau syndical savait que l’homme avait agressé et harcelé une secrétaire.

« L’enquête n’a pas révélé de tentative de camoufler ou d’ignorer la situation de la part de l’Exécutif de l’AMI ou de la FTQ-Construction », lit-on dans le document de 31 pages. Vingt-trois personnes ont été interviewées dans le cadre de cette enquête.

« [La victime] n’avait pas signalé la situation ou déposé de plainte auprès de l’AMI (l’Association des manœuvres interprovinciales) en lien avec les évènements », ajoute MLacroix. « [Elle] n’a pas dénoncé la situation par peur des représailles sur elle et sa famille », lit-on plus loin.

Aussi, « [Rénald Grondin] a mandaté un procureur pour représenter l’AMI dans ce dossier, lequel se rapportait directement à lui seul à titre de directeur général de l’AMI », indique l’avocate.

À l’époque, les règles de la FTQ-Construction n’empêchaient pas Grondin de présenter sa candidature ou d’être élu comme président de l’organisation. « Autrement dit, l’existence de cette décision [de la Commission des lésions professionnelles] n’impactait pas son éligibilité et il n’avait pas l’obligation d’en divulguer l’existence », souligne le rapport. Les statuts de la FTQ-Construction ont été amendés en mai dernier afin d’éviter qu’une telle situation ne se reproduise.

10 recommandations

MAnaïs Lacroix formule dix recommandations, dont six concernent la prévention et la gestion du harcèlement en milieu de travail. L’avocate suggère notamment la création d’une entité « indépendante et impartiale » pour prendre en charge le traitement des plaintes de harcèlement psychologique et sexuel.

Quatre autres recommandations concernent la vérification des antécédents dans le cadre du processus d’élection des dirigeants.

« Mon plus grand souhait dans le futur, c’est que ce genre de situations ne se reproduisent plus jamais et que quiconque est témoin d’abus, de gestes d’intimidation, d’agressions ou de harcèlements ne reste pas silencieux et dénonce rapidement ces situations inacceptables », a indiqué la présidente de la FTQ, Magali Picard, dans un communiqué de presse.

« En mai dernier, le Congrès de la FTQ-Construction a modifié ses statuts, adopté rapidement des mesures, mis sur pied un comité d’éthique et de gouvernance et implanté une formation obligatoire pour tous nos représentants et dirigeants. Nous avons maintenant les outils pour réagir dans ce type de situation », a pour sa part dit Éric Boisjoly, le directeur général de la FTQ-Construction, par voie de communiqué.