Chaud par-dessus froid
Comment se forme la pluie verglaçante ? En quelques mots : chaud par-dessus froid. « Normalement, il fait plus chaud à la surface [au sol], et plus on monte dans l’atmosphère, plus il fait froid, dit Julie Mireille Thériault, professeure au département des sciences de la terre et de l’atmosphère de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Dans le cas de la pluie verglaçante, c’est le contraire. Il fait froid à la surface et plus chaud en montant dans l’atmosphère. » Donc, les précipitations de neige, qui partent de très haut, traversent une couche plus chaude (un « nez chaud », dans le jargon), fondent, mais ne se reforment pas en flocons avant d’arriver au sol. Ces gouttelettes sont dites surgelées. Elles demeurent liquides en raison de leurs propriétés microphysiques.
De pluie verglaçante à verglas
« Dès qu’une gouttelette d’eau surgelée frappe une surface, que ce soit un arbre, une corde à linge, un fil électrique ou le sol, elle perd ses propriétés microphysiques et gèle immédiatement », explique Marie-Ève Giguère, météorologue de sensibilisation à Environnement Canada. C’est à ce moment-là que le verglas se forme. Le reste s’enchaîne. De nouvelles gouttes surgelées tombent sur la première couche de verglas, qui s’épaissit avec le temps. « Le grésil est aussi une forme de précipitation verglaçante. C’est une coquille de glace avec un cœur d’eau surgelée », explique Marie-Ève Giguère.
Danger dans la vallée
On l’aime bien, notre vallée du Saint-Laurent, avec ses basses terres cernées de montagnes. Or, c’est le lieu idéal pour créer des précipitations verglaçantes. « Lorsqu’un dôme d’air froid se trouve dans l’estuaire du Saint-Laurent, le fleuve canalise les vents qui restent prisonniers dans les basses terres, note Marie-Ève Giguère, météorologue de sensibilisation à Environnement Canada. Et lorsqu’un système d’air chaud arrive du sud des États-Unis, il monte au-dessus de la couche d’air froid. » Les conditions propices à créer de la pluie verglaçante sont alors réunies.
Une carte révélatrice
Cette carte donne une bonne idée de l’effet de la vallée du Saint-Laurent sur le passage des systèmes météorologiques. À l’exception de St. John’s, à Terre-Neuve-et-Labrador, la région de Montréal et la vallée du Saint-Laurent (points orange) sont celles qui reçoivent en moyenne le plus de pluie verglaçante en Amérique du Nord.
Cinq épisodes, trois tempêtes, un blocage
De la pluie verglaçante est tombée cinq jours consécutifs sur le sud du Québec, du 5 au 9 janvier 1998. Les météorologues regroupent ces cinq journées en trois tempêtes (épisodes) : les 5-6, 7-8 et 9 janvier. Ce qui est remarquable, c’est que les masses d’air ne bougeaient pas. C’est ce qu’on appelle un blocage atmosphérique dans lequel se forme un corridor où passent toutes les précipitations. En plus, ce système s’est positionné plus au sud que normalement. Avec pour effet que le sud du Québec s’est retrouvé dans la partie froide et aux précipitations abondantes de la dépression. Avec les résultats que l’on connaît.
Plus de 100 mm en Montérégie
Selon un rapport d’Environnement Canada, les régions de Montréal, de la Montérégie, de Drummondville et des Bois-Francs ont reçu entre 60 et 100 mm de pluie verglaçante. Avec un pic à près de 120 mm dans le secteur d’Acton Vale. La région de Québec, où il faisait plus froid au niveau du sol, a reçu près de 80 centimètres de neige et de grésil. Les secteurs – plus chauds – frontaliers de l’Estrie et de la Montérégie ont reçu près de 100 mm… de pluie.