(Québec) Devant « l’insuffisance de la couverture cellulaire au Québec », qui « constitue un enjeu de sécurité et un frein au développement », le gouvernement vient de lancer un appel d’offres pour identifier les endroits mal couverts et calculer ce qu’il en coûterait pour les connecter.

L’étude est ambitieuse, puisqu’elle va notamment chiffrer le coût de la mise en place d’un immense réseau téléphonique, qui couvrirait l’ensemble du Québec habité, jusqu’aux routes forestières.

Cette nouvelle a été très bien accueillie à la Fédération québécoise des municipalités. Le président de l’Union des municipalités du Québec n’était quant à lui pas en mesure de réagir vendredi, puisqu’il se trouvait en Gaspésie… dans un endroit sans réseau.

La question de la mauvaise couverture cellulaire en région a fait les manchettes ces derniers mois. En septembre, une alerte policière concernant un suspect armé à Saint-Elzéar, dans la MRC de Bonaventure, a été reçue dans presque toute la province, mais pas dans la petite municipalité gaspésienne, faute de réseau.

En mai, une femme victime d’un accident sur la route 138, à 70 km à l’est de Sept-Îles, s’est trouvée incapable d’appeler les secours puisqu’elle se trouvait dans un « désert cellulaire ».

Le gouvernement lui-même constate des lacunes.

Une couverture cellulaire de qualité est requise pour contacter les premiers répondants en cas d’urgence et pour recevoir les messages urgents du gouvernement.

Le ministère du Conseil exécutif dans l’appel d’offres publié le 5 octobre

Le soumissionnaire retenu devra donc cartographier précisément la couverture cellulaire au Québec et répertorier chacune des tours. La carte doit être terminée en juin 2023, prévoit l’appel d’offres.

Puis, d’ici à octobre 2023, le soumissionnaire devra avoir étudié trois scénarios plus ou moins ambitieux :

  • Un scénario maximaliste, avec couverture de « tout endroit habité », toute route numérotée, voie publique ou chemin forestier, ainsi que du fleuve Saint-Laurent, de la rivière Saguenay et du lac Saint-Jean 
  • Un scénario intermédiaire, avec couverture de « tout endroit habité en permanence » — ce qui exclut les chalets et les secteurs de villégiature –, des routes numérotées à deux ou trois chiffres à l’exception des chemins forestiers, ainsi que du fleuve Saint-Laurent 
  • Un scénario minimaliste, avec couverture de tout endroit habité en permanence au sud du 51parallèle (juste au sud du réservoir Manicouagan) et des routes numérotées à deux ou trois chiffres à l’exception des chemins forestiers.

Le soumissionnaire devra finalement produire une étude d’impact économique, puis un scénario sera retenu. Le document ne précise pas qui, des entreprises de téléphonie ou de l’État, paiera la mise en place de cette couverture supplémentaire.

Chose certaine, la Coalition avenir Québec (CAQ) avait promis durant la campagne électorale de « compléter la couverture cellulaire ».

La fracture numérique « n’est plus acceptable »

Le président de la Fédération québécoise des municipalités (FQM), Jacques Demers, se réjouit que ce dossier avance. La FQM demande depuis des années une meilleure couverture cellulaire.

« Pour nous, l’important, c’est qu’on n’en parle plus aux prochaines élections. L’internet, c’est à peu près réglé, les contrats sont donnés. Il reste le cellulaire », lâche au bout du fil M. Demers, qui a dû se rendre dans un endroit bien précis de sa maison de Sainte-Catherine-de-Hatley pour réussir à se connecter au réseau.

Pour lui, il s’agit d’une question de sécurité publique. « C’était assez incroyable, le cas de Saint-Elzéar-de-Bonaventure. Les gens de l’endroit n’ont pas reçu l’alerte. La mairesse n’en revenait pas », dit-il.

Le maire de Sept-Îles espère quant à lui que la route 138 sera entièrement couverte. « On n’a qu’une route d’accès, la 138. S’il y a une route sinueuse, c’est bien celle-là, avec les camions lourds qui circulent… C’est dangereux, dit-il. Que ce soit une crevaison, un accident… Des automobilistes qui finissent dans le fossé et ne peuvent appeler les secours, ça arrive ici. »

Le ministère du Conseil exécutif reconnaît lui-même dans son appel d’offres que « la fracture numérique n’est plus considérée comme acceptable au Québec et [que] l’ubiquité des services numériques est devenue une nécessité ».

Le gouvernement note que les trois grands opérateurs cellulaires canadiens « ont environ le même nombre de sites cellulaires que les opérateurs finlandais, bien que ceux-ci servent 6 fois moins d’abonnés sur un territoire 30 fois plus petit ».

Lisez l'article « Pas de réseau, pas de secours »