(Rome) Le chef de l’organisation nationale représentant les Inuits a rencontré le chef d’un ordre catholique à Rome pour discuter du cas d’un prêtre accusé de crimes contre des enfants au Nunavut.

« J’espère que la foi de l’Église catholique dictera qu’elle travaillera avec nous dans un cas où il y a de graves allégations d’abus sexuels, en particulier d’agressions sexuelles sur des mineurs », a déclaré Natan Obed, président d’Inuit Tapiriit Kanatami.

M. Obed a expliqué qu’il avait eu une réunion d’une heure jeudi avec Louis Lougen, supérieur général des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée, pour discuter de la responsabilité de l’Église pour s’assurer que Johannes Rivoire soit jugé au Canada.

La rencontre est intervenue après que M. Obed a demandé lundi au pape François lors d’une réunion au Vatican d’intervenir personnellement dans le cas de Rivoire.

« J’imagine qu’il s’agit d’une demande extraordinaire du pape, mais c’était tout l’intérêt de la requête, a déclaré M. Obed. Le pape est quelqu’un qui a des pouvoirs extraordinaires au-delà des instances avec lesquelles nous avons essayé de travailler un grand nombre d’heures sur cette affaire. »

Un mandat d’arrêt pancanadien a été lancé en février contre Rivoire, qui a plus de 90 ans et vit à Lyon, en France. La GRC du Nunavut a déclaré que des agents avaient reçu une plainte l’année dernière concernant des agressions sexuelles qui auraient eu lieu il y a environ 47 ans.

PHOTO JUSTIN TANG, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La députée néo-démocrate Mumilaaq Qaqqaq montre une photo de Johannes Rivoire lors d’une conférence de presse tenue à Ottawa, en juillet 2021.

Rivoire était au Canada du début des années 1960 à 1993, date à laquelle il est retourné en France.

Un mandat a également été lancé contre lui en 1998. Il a fait face à au moins trois accusations d’agressions sexuelles dans les communautés du Nunavut d’Arviat, de Rankin Inlet et de Naujaat. Plus de deux décennies plus tard, les accusations ont été suspendues.

Le Service des poursuites pénales du Canada a déclaré à l’époque que c’était en partie dû à la réticence de la France à extrader.

M. Obed a rapporté qu’on lui avait dit que M. Lougen avait personnellement contacté le prêtre et que Rivoire avait refusé de se conformer à l’ordre de retourner au Canada.

Le père Lougen s’est engagé à travailler avec les Inuits pour obtenir justice dans cette affaire, bien qu’aucun détail n’ait été fourni, a ajouté M. Obed.

Vendredi, M. Obed faisait partie des délégués autochtones qui ont assisté à une dernière réunion avec le pape au Vatican. Dans des excuses historiques, le pape François a dit qu’il était « très désolé » pour le rôle de l’Église dans le système des pensionnats au Canada. Il a également demandé le pardon de Dieu pour la conduite déplorable des membres de l’Église.

« Je crois que nous sommes à un moment où les yeux du Canada et les yeux du monde sont tournés vers cette rencontre particulière, des excuses papales, et aussi une meilleure compréhension de ce qui s’est passé et du fait que justice n’a pas été possible pour les victimes, a déclaré M. Obed. Je pense que cela oblige l’Église catholique à agir. »

Plus tôt dans la semaine, M. Obed avait demandé au pape de parler directement avec Rivoire et de lui demander de se rendre au Canada pour faire face à l’accusation. M. Obed a aussi demandé au pape de solliciter la France afin d’intervenir si Rivoire n’est pas réceptif.

Le chef canadien des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée, le père Ken Thorson, a également écrit au ministre canadien de la Justice, David Lametti, offrant la coopération de l’ordre religieux dans toute enquête.

Les dirigeants et les politiciens inuits, des sénateurs aux premiers ministres du Nunavut, ont continué d’insister pour que le prêtre soit jugé. Ces appels se sont multipliés avec la découverte de tombes anonymes sur les terrains d’anciens pensionnats dirigés par l’Église catholique.

Piita Irniq, un aîné inuit qui se bat depuis plus d’une décennie pour le retour de Rivoire au Canada, a déclaré qu’il y avait au moins six Inuits encore vivants qui allèguent que Rivoire les a maltraités.

« Il y a eu beaucoup de pressions et beaucoup de discussions, donc je pense que les gens à qui j’ai parlé ont beaucoup d’espoir, a déclaré M. Irniq plus tôt cette semaine. Cela ressemble plus à la justice. »

Avec les informations de Bob Weber à Edmonton