(Québec) La députée libérale de Westmount—Saint-Louis, Jennifer Maccarone, sent que le Québec recule sur les questions de droits des personnes LGBTQ2 notamment parce que les politiciens en parlent moins.

Mme Maccarone est devenue cette semaine la première élue de l’Assemblée nationale à porter le titre de porte-parole en matière de droits de la communauté LGBTQ2. Elle est elle-même mère de deux enfants et bisexuelle.

Dans le passé, on n’a rapporté aucun cas de député ou ministre libéral gai, ou s’étant affiché ouvertement comme tel.

En entrevue mercredi à La Presse canadienne, Mme Maccarone — qui conserve également le dossier de la famille — a dit réserver plusieurs questions à la ministre de la Justice Sonia LeBel, notamment sur les thérapies de conversion.

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Jennifer Maccarone

Son but, dit-elle, est de sortir les personnes LGBTQ2 de « l’invisibilité » et de les placer en plein cœur de l’action politique.

Si les autres partis politiques veulent emboîter le pas au Parti libéral et nommer des porte-parole pour défendre les gais et lesbiennes à l’Assemblée nationale, tant mieux, à son avis.

« On a pris du recul, a-t-elle déclaré sans détour lors d’une entrevue au parlement. Comme membre de la communauté, je me sens comme oubliée. On est sur la voie de service et il faut rembarquer sur l’autoroute.

« On n’est pas rendu à une place où on peut arrêter de dialoguer. Il y a encore un manque d’inclusion, de cohérence, de compréhension et de tolérance. […] Je pense qu’on a besoin de quelqu’un pour lever le drapeau et dire : “Il faut aller de l’avant”. »

Les personnes LGBTQ2 représentent environ 10 % de la population. Plusieurs d’entre elles peinent toujours à se faire reconnaître comme parents, selon Mme Maccarone.

« On a deux mamans et un papa, mais il y a juste deux parents qui sont reconnus au Québec. C’est un problème. Qui sera la personne qui sera reconnue comme gardien ou parent de cet enfant-là ? On a des familles qui sont recomposées plusieurs fois dans la communauté gaie et lesbienne. Ça veut dire quoi ? C’est qui la personne responsable ? »

Dans le cadre d’une réforme du droit de la famille, Mme LeBel déposera un projet de loi sur la parentalité et un autre sur la filiation, mais ne s’engage pas à les faire adopter d’ici à la fin du mandat.

La députée libérale de Westmount se désole par ailleurs de la quasi-absence des LGBTQ2 dans la nouvelle politique internationale du gouvernement Legault, alors qu’auparavant, c’était un des volets de la politique du gouvernement Couillard.

Elle exhorte le gouvernement caquiste, qui est « jeune » et « en apprentissage », selon elle, à « corriger » la politique internationale.

« C’est un sujet d’importance. On sait qu’il y a toujours de la discrimination, des thérapies de conversion qui se font, ce n’est même pas encore illégal au Canada ! » Elle croit que les ministres caquistes devraient aborder ces questions lorsqu’ils voyagent à l’étranger.

La thérapie de conversion est un ensemble de traitements pseudo-scientifiques utilisés pour tenter de changer l’orientation sexuelle d’une personne.

« Au-delà des étiquettes »

A-t-on besoin d’être porte-parole en matière de droits de la communauté LGBTQ2 pour bien la défendre ? Mme Maccarone répond affectionner son nouveau titre. « Je trouve que ça donne une visibilité », dit-elle.

Pense-t-elle mettre certains députés mal à l’aise avec ses questions au Salon bleu ? « Oui. Mais c’est correct, c’est un apprentissage. Les choses qu’on ne connaît pas font peur, mais lorsqu’on lève le drapeau et on voit qu’il n’y a pas de monstre, tout est possible.

« Je pense que j’ai été mise sur cette Terre pour être la porte-parole des personnes en situation de vulnérabilité. Je ne dors pas parce que je pense à ça tout le temps », a-t-elle poursuivi sur un ton très personnel.

À titre de députée, elle se porte régulièrement à la défense des personnes autistes et handicapées.

« Je veux montrer à mes enfants ce que c’est d’être une députée qui peut porter plusieurs chapeaux, et que c’est correct, et qu’on devrait être fier de ça, et qu’on peut aller au-delà de nos étiquettes. »

L’acronyme LGBTQ2 désigne les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers et bispirituelles.