Les soupçons sont confirmés : des produits Maple Leaf sont à l'origine de l'éclosion de listériose dans quatre provinces, dont le Québec. Ottawa a annoncé hier soir que des échantillons prélevés parmi les produits retirés des tablettes contenaient la même souche de la bactérie qui a fait au moins 21 victimes, dont quatre morts.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments a prélevé trois échantillons provenant de l'usine de Toronto, qui a été fermée cette semaine après que Maple Leaf eut rappelé 23 produits de charcuterie. Dans deux cas, la souche était la même que celle qui était à l'origine de l'éclosion. Mais dans le troisième, la souche était légèrement différente. Voilà pourquoi l'organisme poursuivra son enquête.

«Puisque les symptômes de la listériose peuvent apparaître jusqu'à 70 jours après la consommation d'un aliment contaminé, on s'attend à ce que le nombre de cas confirmés et soupçonnés augmente au cours des prochaines semaines», a-t-il fait savoir dans un communiqué.

«Cette semaine, nos meilleurs efforts ont échoué et nous sommes sincèrement désolés», a indiqué le président des Aliments Maple Leaf, Michael McCain.

L'entreprise rappellera tous les produits fabriqués dans l'usine de Toronto dès ce matin.

Plus tôt dans la journée, l'ACIA avait avisé les Canadiens de ne pas consommer les sandwichs «Reuben classique» de la marque Shopsy's, car ils contiennent de la viande provenant de l'usine de Toronto. La plupart de ces produits, distribués en Ontario, ont déjà été retirés des tablettes. Mais sept commerces de Toronto pourraient en avoir vendu avant le rappel.

Le dernier bilan officiel de l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) révèle que 21 Canadiens ont été infectés par la même souche de la listériose. Du nombre, quatre personnes sont mortes, trois en Ontario et une en Colombie-Britannique.

Au Québec, cinq personnes ont contracté la bactérie, mais une seule a été infectée par la même souche trouvée dans les produits Maple Leaf. Et encore là, aucun lien n'a été établi avec les autres cas, a indiqué le directeur de la protection de la santé publique au ministère de la Santé, le Dr Horacio Arruda.

L'ASPC étudie aussi 30 cas « suspects », dont huit au Québec.

Plusieurs consommateurs rencontrés dans les épiceries de Montréal hier ont exprimé leur inquiétude quant à la sécurité des aliments.

Dans le IGA de la rue Ontario, à l'est du centre-ville, des dizaines de clients poussaient leur panier, tâtaient les fruits et humaient le pain. Devant le rayon des viandes froides, Lorraine Sanschagrin s'est dite préoccupée par le rappel des produits Maple Leaf, même si elle n'entend pas cesser de manger des viandes froides.

«C'est sûr qu'on va être plus craintifs, a-t-elle confié, un salami dans son panier. Ces jours-ci, j'ai l'impression qu'on n'est plus sûrs de rien.»

Quelques mètres plus loin, Marc Ranger et sa famille souriaient : ils ne mangent que de la viande biologique. Selon eux, l'éclosion de listériose prouve que la production industrielle de la viande n'est pas sécuritaire.

«L'industrie agroalimentaire est une bombe à retardement, a tranché ce résidant de Lachute. Les compagnies sont plus préoccupées par le profit que par la santé des gens.»

Le propriétaire du supermarché, Claude Sauro, dit avoir reçu une bonne dizaine d'appels au cours des derniers jours. Ses clients voulaient s'assurer que les viandes de son étalage n'allaient pas les rendre malades.

«C'est un peu comme ce qui est arrivé pendant la crise de la vache folle en Grande-Bretagne, indique-t-il. Plus personne ne mangeait du boeuf.»

L'entrepreneur n'a pas constaté de baisse des ventes pour le moment. Mais il ne sera guère surpris si les produits Maple Leaf perdent la faveur des consommateurs au cours des prochains mois. Car même si un petit nombre d'aliments ont pu être infectés à la listériose, bien des acheteurs pourraient associer la marque à la maladie.

Le système fonctionne

N'empêche, Claude Sauro se dit plutôt rassuré. Pour lui, le retrait des produits des derniers jours prouve que le système d'inspection des aliments fonctionne.

- Avec La Presse canadienne