Le gouvernement albertain conteste un jugement rendu il y a trois semaines, qui annule la contravention d'un francophone d'Edmonton parce qu'elle n'était rédigée qu'en anglais.

Dans une décision qualifiée d'«historique», le juge Leo Wenden, de la Cour provinciale, a déclaré que les droits linguistiques de Gilles Caron avaient été brimés par une amende de 54$ reçue pour un virage illégal en 2003. C'était la première fois qu'un tribunal reconnaissait le statut constitutionnel du français en Alberta, en Saskatchewan et dans les Territoires du Nord-Ouest.

À terme, le jugement pourrait forcer ces gouvernements à traduire toutes leurs lois et permettre aux citoyens de s'adresser aux tribunaux en français.

Le gouvernement de l'Alberta ne rend toutefois pas les armes. «Nous considérons que le juge a erré en droit», résume le porte-parole du ministère de la Justice, David Dear. Il fait valoir que la Cour suprême avait donné aux provinces en 1988 le pouvoir de définir leur propre législation au regard des droits linguistiques.

Les deux parties comparaîtront le 11 septembre pour fixer une date de procès.

L'avocat de Gilles Caron, Rupert Baudais, s'attend à ce que l'affaire se rende en Cour suprême. «C'est une cause d'importance nationale parce que ça touche des questions constitutionnelles fondamentales, explique-t-il, joint à son bureau de Regina. Et c'est une décision qui touche plus d'une province.»

Question de territoire

Pour appuyer les revendications de son client, Me Baudais a fait appel à des historiens. En 1870, un vaste territoire appelé la terre de Rupert a été cédé par la Couronne britannique au Canada. Cette étendue, qui couvre aujourd'hui l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et les Territoires du Nord-Ouest, était surtout habitée par des Métis francophones. Or, des documents d'archives démontrent que ceux-ci ont posé une condition capitale avant d'adhérer à la Confédération: la garantie qu'ils pourraient conserver leur langue.

Des provinces qui sont nées de la terre de Rupert, seul le Manitoba est officiellement bilingue.