«Ne joue pas avec ta nourriture!» La mère de Guy Houde lui a servi cette phrase à satiété. Il faut croire qu'il est un peu délinquant, puisque de jouer avec la bouffe, Guy en a fait son métier.

Avant de devenir styliste culinaire pour la pub, ce cuisinier de formation a travaillé comme craft (c'est le nom qu'on donne à un cuisinier sur un plateau de tournage). À l'époque où il servait des cygnes en crème chantilly à l'équipe technique et aux comédiens, la question qui brûlait toutes les lèvres n'était plus de savoir quel était le nom du réalisateur, mais plutôt celui du craft!


Comment a été inventé le métier de styliste culinaire?

Je pense que ça a débuté aux États-Unis dans les années soixante-dix, soit en même temps que le flash est arrivé sur le marché. Avant ça, c'était plutôt laborieux de photographier de la nourriture, parce qu'elle résistait mal aux éclairages forts. 



Est-ce que l'arrivée de la photo numérique a changé ton travail?

Le numérique met beaucoup plus de pression sur le styliste. Comme on peut voir instantanément le résultat et que tout doit être fait plus rapidement, ça laisse beaucoup moins de temps pour travailler l'image. 



Comment se trouve t-on des clients quand on est styliste culinaire?

En publicité, la production d'une image passe par une longue suite d'étapes et de contraintes. Le concept publicitaire est d'abord créé par une agence et ensuite soumis au client sous forme de maquette. Une fois approuvée, la maquette s'en va chez le photographe. C'est lui qui en bout de ligne engage le styliste en fonction de son talent particulier et des besoins de l'image à créer.



On entend souvent dire que les aliments qui composent les photos culinaires sont artificiels. Est-ce vrai?

C'est une croyance répandue qui me dérange un peu, car autant que possible, je travaille avec des ingrédients frais et vrais. Évidemment, si je cherche de belles petites fraises du Québec et qu'on est en janvier, tout ce que je trouverai en magasin, ce sont d'énormes fraises transgéniques californiennes. Je serai alors forcé d'en utiliser des fausses en acrylique. Mais c'est un dernier recours, mon but étant d'être authentique tant dans le résultat final que dans le processus.



Mais pour être à la fois authentique et esthétique, j'imagine qu'avant de trouver «the» fraise, tu dois en passer un méchant paquet?

Ah, ça oui! Il est possible que j'aie besoin de 500 fraises pour en dénicher une seule assez belle pour être utilisée. Et si quelqu'un de distrait mange cette fraise, on a un gros problème! C'est pourquoi sur un plateau, la table du styliste, c'est un endroit sacré!



Jusqu'à quel point manipules-tu les aliments?

J'imagine qu'il ne s'agit pas seulement de les laver et le tour est joué...
Tout dépend de l'aliment en question et du look recherché. Et aussi le niveau d'obsession de ton client. J'ai un confrère à qui on a déjà demandé d'épiler une framboise! Faut le faire...



À part concevoir un buste de Jean Charest en fromage, quel fut le défi le plus étrange auquel tu te sois attaqué au cours de ta carrière?

J'ai déjà essayé de rendre une pomme de terre sexy! En fait, le concept de départ consistait à photographier une patate dans un lit avec un contenant de margarine. La façon dont elle était épluchée devait suggérer qu'elle se déshabillait de manière sensuelle... Au bout de mes six sacs de patates, j'étais plus capable ! C'est quoi ça, une patate sexy?




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