Cet été encore, notre critique gastronomique parcourt les routes du Québec. Cette semaine, elle s'est arrêtée à Québec.

En commençant à préparer cette série d'articles sur des restaurants à l'extérieur du périmètre métropolitain habituel, j'ai demandé à toutes sortes de gens qui aiment bien manger, où aller à Québec.

Une nouvelle table. Un nouveau chef. Une nouvelle destination qui surprendrait, qui donnerait une autre bonne raison d'aller passer quelques jours dans la capitale tant que c'est encore l'été. La réponse a été quasi unanime: il faut essayer La Planque.

Planque comme dans cachette. Comme dans lieu à l'écart du reste où on se retrouve peut-être pour se mettre à l'abri, peut-être pour se faire oublier. Ce restaurant est effectivement isolé de tous les autres que l'on connaît, situés traditionnellement sur la Grande Allée ou dans le Vieux-Port, ou encore dans le nouveau quartier Saint-Roch.

La Planque est plutôt à Limoilou, un quartier ouvrier traditionnel, loin des sentiers battus, un quartier en pleine transformation où les Québécois habitent, sortent, font leurs courses, reviennent après le travail, où l'anglais est réservé aux rares touristes qui s'y rendent, probablement amenés par vous, pour essayer le restaurant en question.

Aux fourneaux de cet établissement ouvert il y a quelques mois, on retrouve Guillaume St-Pierre, un ancien du Laurie Raphaël, le gagnant de l'émission Les chefs! de 2011. On le voit à l'oeuvre, car la cuisine, située dans la partie arrière du restaurant, est totalement ouverte. On n'est plus à la télé. Le jeune homme met entièrement et totalement la main à la pâte.

Le menu de La Planque met de l'avant des produits qui ne viennent jamais de très loin. Les pétoncles, par exemple, sont de la baie de Fundy, le saumon bio, de la Nouvelle-Écosse, la pintade, du Cap Saint-Ignace et les fraises, évidemment, de l'île d'Orléans. Les compositions comportent beaucoup d'ingrédients, peut-être trop parfois. Mais isolés, les éléments sont délicieux. Les tomates d'une salade en entrée sont juste assez mûres, goûteuses. Même si la saison n'était alors pas parfaitement arrivée, on les a particulièrement bien choisies. Malheureusement, le pesto «peint» dans le fond de l'assiette a déjà été vu trop souvent et si le chèvre émietté est bon, il est peut-être un peu fade. Au menu, on annonçait de la mozzarella di buffala. On regrette le remplacement. Cela dit, c'est comme ça à La Planque. On fonctionne avec les produits du marché, ce qui est sur le marché au jour le jour, et c'est tant mieux. On garde donc l'esprit ouvert. On s'adapte.

L'entrée de boudin blanc aux petits pois avec pêche et vinaigrette au soja et lime est aussi un peu déconcertante. On aimerait épurer. On aimerait du boudin blanc plus intègre, moins perdu. On cherche son moelleux pour y planter une fourchette. On trouve seulement des morceaux bien cuits. En revanche, le saumon sous vide, dont la consistance garde ainsi un moelleux aérien, ne demande qu'à être adoré. Surtout que les asperges sont parfaitement apprêtées, juste à la frontière du croquant. La bisque aux moules qui l'accompagne? Oui. Mais ce n'est pas ce que l'on retient. Le cochon bio de Damien est aussi hyper tendre, savoureux. On l'aimait avant même de goûter aux rösti et à la sauce crème sure et ail rôti et aux choux de Bruxelles et aux haricots verts et aux épinards et à la sauce au chipotle.... Ouf.

Au dessert, les compositions font honneur aux produits de saison, comme la rhubarbe lorsque nous y sommes allés. On la retrouve sous forme de tarte, un peu lourde, servie avec une glace vanille. Préféré le quatre-quarts aux fraises, avec mousse aux fraises et crème fraîche. Une jolie redondance tout en vitamines, qui goûtait parfaitement l'été, parfumé, lumineux et doux.

La carte des vins n'est pas banale. Et le serveur sait de quoi il parle. On lui explique nos goûts, il propose des idées originales. On cherchait un Bourgogne, on se retrouve avec un espagnol. Mais la suggestion fonctionne. Bravo. De façon générale, service et atmosphère sont hyper sympathiques. C'est convivial et pro à la fois. On sent que le chef a recruté une équipe qui aime vraiment son travail. Et c'est cet enthousiasme qui nous fait repartir du restaurant avec le sourire. Dans un coin de Limoilou, on a bâti une cachette gourmande qui n'est pas parfaite, mais qui sait nous accueillir les bras ouverts. Que demander de plus?

La Planque

1027, 3e avenue, Québec

418-914-8780

Prix: entrées de 1 à 19$, plats de 20 à 27$.

Carte de vins: on a fait un effort pour bâtir une carte originale, avec des jolies trouvailles, avec beaucoup d'idées à prix abordables. Et on sait l'expliquer. Dommage que la bière se limite à la 50. Clin d'oeil amusant au côté col bleu du quartier, mais un peu court quand même.

Décor: Le local est celui d'un ancien fleuriste que le designer Alain Dumont a transformé en bistro post-industriel éclectique, hommage éclaté aux origines ouvrières du quartier. Ampoules suspendues, rallonges qui deviennent fioritures, inox, panneaux de bois bruts. C'est chaleureux et amusant.

Atmosphère: Très vivante, pour ne pas dire bruyante. C'est un endroit bien en vie, avec des gens de toutes générations, où on a envie de sortir, de voir du monde.

Service: Efficace, professionnel, souriant.

(+) Une adresse bien vivante, très sympathique, dans un quartier méconnu de Québec, en pleine transformation. Une destination nouvelle.

(-) La cuisine pourrait être épurée.

On y retourne? Bien sûr.