Voilà neuf ans maintenant qu'existe le restaurant Au Cinquième Péché, sur l'avenue du Mont-Royal, près de la rue Saint-Denis, mais du sang neuf vient de lui donner un petit coup de jeunesse. Certains membres de l'équipe sont en effet partis, de nouveaux sont arrivés. On l'aimait déjà. On l'aime encore plus.

Installée dans une zone très fréquentée du Plateau, où il vaut mieux se rendre en vélo ou en métro qu'en auto - les stations Bixi abondent et la station de métro Mont-Royal n'est pas loin -, Au Cinquième Péché n'est pas «une autre» table à la française du quartier.

C'est un petit restaurant simple, décoré sans prétention, comme un établissement de quartier qui a juste assez vécu, mais révèle sa modernité à travers quelques clins d'oeil astucieux - notamment les lampes en pots de confiture.

C'est une adresse qui se réclame de la «bistronomie», tendance de l'Hexagone alliant le concept du bistro à la gastronomie, où l'on mange une cuisine française accessible revisitée avec un regard moderne et branchée sur les saisons. D'ailleurs, le menu est sur l'ardoise, prêt à changer tous les jours. Les prix, en outre, y sont fort raisonnables, notamment le vendredi midi où, pour une quarantaine de dollars - entrée, dessert et même expresso inclus -, on peut se régaler à deux. Le soir, on double.

C'est ainsi qu'au lunch, récemment, une copieuse langue de veau braisée qui s'évanouit sous la dent tellement elle est tendre était relevée par le croquant de pousses de salicorne, dont c'est la saison. En outre, une salade de betteraves se mariait à des raisins rouges très frais, à des cubes de concombre et à des pistaches pour former une harmonie de textures craquantes, chacune à sa façon, le tout sur fond à la fois sucré et acidulé. Une jolie réflexion très fraîche en début d'été, présentée dans un petit pot de verre, en référence aux marinades.

Au plat principal, même scénario à la fois vif et réconfortant lorsque l'onglet, cuit comme on l'a demandé, c'est-à-dire bien saignant, rencontre des haricots verts extrafins et, surtout, une très fine purée de panais. Autre classique bien revu: une salade de gésiers, avec la première roquette fraîche de la saison et de jeunes radis braisés encore bien croquants, accompagnée d'une tombée d'oignons confits, servie sur des croûtons, façon tartine. Les gésiers sont tendres, l'équilibre des textures à point. Un plat tout simple et sans chichi, mais savoureux.

Au dessert, le riz au lait et à la rhubarbe - on remarque que les produits du potager de saison sont bien mis en valeur - est plutôt un riz à la crème richement vanillé et bien sucré accompagné d'une compote de rhubarbe acidulée. Une belle création, encore là, simplement construite mais qui marche, sur des ingrédients abordables et tout simples. Le pudding au pain, en revanche, avec pomme et praline, est plus lourd.

On termine le tout avec un bon expresso qui a le mérite d'être inclus dans la table d'hôte du midi.

Des tables comme celles-là, à Montréal, on aimerait en avoir plus, car on sent la volonté du chef de ne pas se laisser guider uniquement par les modes, les tendances du moment, mais bien d'être fidèle aux principes d'une cuisine de bistro savoureuse qui n'a pas à coûter une fortune.

La carte des vins est conçue de la même façon, avec beaucoup de vins naturels et bio, en importation privée, à prix raisonnables (beaucoup de bouteilles autour de 40$). La carte fait une belle place aux vins français, mais çà et là on découvre un barolo ou un Argyros de Santorini, en Grèce.

À essayer, en réservant bien à l'avance. La salle n'est pas immense.

Au Cinquième Péché

4475, rue Saint-Denis 

514-286-0123

www.aucinquiemepeche.com



Prix: Le midi, on peut aisément manger à deux, entrées, plats, desserts et cafés compris, pour une quarantaine de dollars, avant pourboire. Le soir, on double.

Carte des vins: On est ici chez des gens qui aiment le vin, mais pas les grands crus de frimeurs, plutôt les tout petits qui s'affirment, qui font les choses différemment: les bio, les «nature». Prix raisonnables.

Décor: Décor tout simple de bistro, avec des chaises noires en bois courbé, des lampes sympathiques en pots de confiture. Couteaux Laguiole. Ça donne une idée du soin porté aux détails qui comptent.

Faune: Des gens du quartier, mais aussi, de toute évidence, de jeunes épicuriens et amateurs de vins qui font le détour pour essayer cette table.

Plus: Un excellent rapport qualité-prix chez des gens qui ne cherchent pas à suivre les tendances ponctuelles, mais qui revisitent les classiques avec soin et de bons produits.

Moins: Pourquoi être ouvert le midi seulement le vendredi?

On y retourne? C'est sûr.