Au milieu de plantes et d'arbres tropicaux, l'agriculteur brésilien Marcos Croce a fait le choix de cultiver peu de café, mais de qualité: tout l'inverse de son pays, premier producteur mondial, peu réputé pour la finesse de son breuvage.

À 300 km au nord de Sao Paulo, la «Ferme Écologique Fortaleza» produit de manière biologique un grain bien supérieur aux tonnes de café ordinaire que le Brésil exporte.

«Ici nous avons réussi à faire la différence grâce à notre qualité», affirme Croce, 62 ans, marchant entre les arbustes de café.

À 1000 mètres au-dessus du niveau de la mer, dans la municipalité de Mococa, le domaine appartenait à la famille de son épouse, produisant du café depuis 1890 selon les méthodes traditionnelles, avec engrais et pesticides.

Le couple a repris l'affaire en 2001, adoptant immédiatement l'agriculture biologique.

Et alors qu'avant, la ferme produisait 10 000 sacs de café par an, «nous avons perdu 80% de la production», dit Croce, en raison d'une plus faible productivité et d'une réduction de la surface destinée aux grains, dans cette propriété de 800 hectares.

Mais il ne regrette pas son choix, vendant désormais son bon café à 30 pays, dont la France et l'Italie. Pour partager son enthousiasme pour le bio, il a créé la coopérative «Bob-O-Link», rassemblant quelque 60 petits agriculteurs de la région.

«Nous voulons établir un indice de durabilité de l'environnement et de la production de café, et aussi dans le domaine social», dit-il.

«Deuxième division du café»

Avec 45,3 millions de sacs de 60 kilos en 2014 - près d'un tiers de la production mondiale -, le Brésil est numéro un devant le Vietnam et la Colombie.

Mais son café est jugé de basse qualité, seuls huit millions de ces sacs correspondant à du café de spécialité (donc meilleur), même si ce chiffre a bondi de 59% depuis 2013.

«Le Brésil a toujours été considéré comme la meilleure équipe de deuxième division du café», affirme Silvio Leite, président de l'Association de Café de spécialité, créée en 1991.

En 1999, l'Association a lancé le concours Cup of Excellence pour promouvoir son meilleur café, depuis imité dans d'autres pays et devenu une référence mondiale.

La demande pour ce café supérieur - de type arabica, conjuguant arôme et saveur équilibrée et noté plus de 80 sur 100 par des dégustateurs certifiés - a augmenté de 10 à 15% dans le monde ces dernières années, bien plus que celle pour les cafés ordinaires (2%).

Premiers consommateurs sur ce segment, l'Europe, les États-Unis et le Japon, séduits par ces grains raffinés, surtout produits jusqu'à présent par la Colombie et certains pays africains.

«Un miracle»

Une tasse de bon café «est un miracle», assure Isabela Raposeiras, 41 ans, propriétaire du Coffee Lab à Sao Paulo où elle prépare, vend et parle du café.

Cette spécialiste reconnue mondialement explique toutes les étapes pour y arriver : où la plante a été cultivée, la maturité du grain, son séchage avec ou sans la pulpe, sa torréfaction et même la préparation de la tasse. Tout influe dans le résultat final, plus ou moins doux, avec des notes fruitées ou boisées.

Au Brésil, de plus en plus de régions produisent du café de spécialité, surtout des petits producteurs ayant parié sur ce marché plus exigeant et en croissance.

Le géant sud-américain - deuxième consommateur mondial de café ordinaire derrière les États-Unis - commence tout juste. Ce n'est que depuis 2014 qu'il existe une région avec une dénomination d'origine, le «Cerrado Mineiro» (sud-est).

«Il y a des cafés incroyables au Brésil et de plus en plus demandés», affirme Susie Spindler, de l'Alliance for Coffee Excellence, responsable du concours de qualité.

En août, l'hiver austral prend fin. Dans la cour de la ferme Fortaleza, Ivan Santos, 31 ans, membre de la coopérative «Bob-o-Link», dispose au soleil les baies cueillies à la main lors de la récolte.

«Produire du café de qualité, sans défaut, c'est difficile, lent et cher», confie-t-il. «Mais c'est un rêve : nous envoyons notre meilleur café au monde et à de bons prix».