Le défi de la conciliation travail-famille a été mis  de l'avant lors de la récente grève de la construction. L'enjeu préoccupe tous les pères québécois: plus de la moitié d'entre eux envisageraient de changer d'emploi pour obtenir plus de flexibilité en la matière, révèle notamment un sondage Léger réalisé pour le Regroupement pour la valorisation  de la paternité (RVP) que La Presse a obtenu en exclusivité.

Papa impliqué

«Le désir d'engagement des pères auprès des enfants et celui de faire équipe avec la conjointe sont très importants», constate Raymond Villeneuve, directeur du RVP. En effet, 100 % des pères d'enfants de 6 à 12 ans et 96 % des pères en général trouvent «extrêmement» ou «très» important de s'impliquer auprès de leurs enfants. Faire équipe avec l'autre parent - pour les soins, l'éducation, les loisirs, les tâches domestiques et le partage des responsabilités parentales - est une valeur «extrêmement» ou «très» importante pour 92 % des hommes qui ont des enfants et 98 % de ceux qui ont des petits de 5 ans et moins. «On s'attend aujourd'hui à voir ce résultat-là, quasi unanime, dit Christian Bourque, de la firme Léger, tout en soulignant la volonté des pères d'aller vers un meilleur partage avec l'autre parent. Et chez les plus jeunes, ça va de soi.»

54 %

Plus d'un père sur deux changerait «probablement» ou «certainement» d'emploi pour obtenir de meilleures mesures de conciliation travail-famille. «Ça dit à quel point c'est important, souligne Raymond Villeneuve. Dans leur projet de vie, les enfants sont très importants. Les entreprises devraient en tenir compte.» Près de quatre pères sur dix (38 %) accepteraient même une baisse de salaire pour faciliter leur vie familiale, une proportion qui grimpe à près d'un père sur deux (48 %) lorsque les enfants sont petits (0 à 5 ans) et chez les non-francophones. «Les priorités des papas changent, dit Christian Bourque, par comparaison avec un passé de papas pourvoyeurs et un peu absents. Les papas d'aujourd'hui veulent autre chose. C'est un signal encourageant envoyé par les pères. En contrepartie, il faut que la société les reconnaisse.» Or, seuls 38 % des pères estiment que la société les considère autant que les mères.

61 %

Six pères sur dix ont droit à des mesures comme le télétravail, la modification de l'horaire ou la reprise des heures perdues pour mieux s'occuper de leur famille. La très vaste majorité (87 %) juge même facile de s'en prévaloir. «En surface, les choses vont relativement bien, constate Christian Bourque. Une majorité de papas arrivent à concilier travail et famille de façon adéquate, mais est-il acceptable pour notre société qu'un père sur quatre dise avoir du mal à concilier les deux?» Plus le degré d'instruction est faible, plus le revenu est faible, plus l'emploi est précaire, plus le pourcentage de pères qui ont de la difficulté augmente, ajoute également le sondeur, et c'est d'autant plus vrai pour les pères non francophones. Plus les enfants sont jeunes, plus les réponses sont négatives à l'ensemble des questions.

Une petite gêne?

Bien qu'une majorité de pères disent avoir accès à des mesures de conciliation, à peine 9 % s'en prévalent «régulièrement» et 44 % «parfois». «On est en transition. Les choses bougent et les hommes ne bougent pas tous à la même vitesse, juge Raymond Villeneuve. Il y a encore place à une évolution positive.» Le sondage souligne aussi que parmi les pères qui demandent des aménagements ou manquent du travail, ils sont nombreux à se sentir jugés par leurs supérieurs (27 %) ou leurs collègues (19 %). «On aimerait que ce soit plus proche de zéro, mais on n'en est pas là», constate Christian Bourque, qui croit que, dans certains milieux, les pères doivent encore entendre «sa mère ne peut pas y aller, elle?».

17,4 heures

C'est le temps consacré aux tâches domestiques et aux responsabilités parentales par les pères. Les mères en font environ 5 heures de plus, précise Raymond Villeneuve, tout en soulignant que l'implication des pères est en augmentation constante et que ceux-ci travaillent en moyenne 8 heures par semaine de plus que les mères à l'extérieur de la maison. «Pour moi, c'est assez clair que l'égalité entre les femmes et les hommes n'est pas atteinte au Québec, dit-il, mais ça bouge dans le bon sens.» Christian Bourque ajoute que le sondage mesure «la volonté des pères de faire leur part».

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Le sondage a été réalisé sur l'internet entre le 25 mai et le 1er juin par la firme Léger auprès de 1000 pères de famille. Aucune marge d'erreur ne s'applique.