Sur les bords du Gange tumultueux, dans le nord de l'Inde, une foule en blanc inspire et expire à l'unisson: la petite ville de Rishikesh lévite au rythme du festival international de yoga, où se pressent Occidentaux en quête d'un retour aux sources de la spiritualité.

Dans les étroites ruelles de cette ville sacrée de l'Inde, où la musique de relaxation qui s'échappe des magasins de disques couvre à peine le bruit des klaxons, on croise Américains, Allemands, Français, Mexicains déambulant entre deux cours, un tapis de yoga sous le bras.

Baptisée capitale mondiale du yoga pour la présence jadis de nombreux yogis dans les grottes de l'Himalaya entourant cette bourgade, Rishikesh a vu affluer des centaines d'étrangers de 36 pays venus participer à la 12e édition de ce festival organisé par un centre spirituel, l'ashram Parmath Niketan.

Depuis mardi, de 4h00 du matin au coucher du soleil, ces festivaliers atypiques approfondissent assidûment une discipline et une philosophie nées en Inde voici des millénaires et qui a fait émerger un marché de plus en plus lucratif en Occident.

«Le yoga ne coule pas dans notre sang comme les Indiens alors je viens ici pour un retour aux sources. Rishikesh, c'est le paradis des yogis!», s'enthousiasme Juliette Allard, une Française de 38 ans établie à Barcelone.

«Mais l'approche du yoga est ici austère. Quand on a l'habitude de la petite bougie et de l'encens pendant le cours, on peut être déçu en voyant à quel point les cours sont secs», ajoute cette professeure de yoga, qui vient depuis trois ans au festival.

Leçons de respiration, de postures, de chants, d'alimentation, mais aussi cours issus de toutes les familles du yoga dont le Kundalini -- exporté avec succès aux Etats-Unis dans les années 60 par un Sikh--, sont proposés par des professeurs à la renommée mondiale.

«C'est très inspirant de venir là où sont les racines du yoga. Ces cours rendent la vie plus douce et permettent de parvenir au bonheur», assure Daniela Lobeira, une Mexicaine de 41 ans qui travaille pour la protection des animaux.

Popularisée par les Beatles venus y pratiquer la méditation, Rishikesh respire toute l'année grâce au yoga. Des dizaines de professeurs y sont installés et les écoles offrant des formations à la semaine ou au mois pullulent au bord du fleuve couleur émeraude.

Les murs de la ville sont aussi couverts d'annonces pour «se reconnecter avec soi-même» et l'alcool ainsi que la viande sont totalement bannis des menus des restaurants.

Pendant la durée du festival, les cafés et restaurants bon marché ont rajouté une interdiction pour se mettre au diapason des participants: pas le droit de fumer à l'intérieur pour ne pas indisposer les «chakras» (centres d'énergie) de ceux qui viennent se sustenter en coup de vent, explique Narendra, le gérant du «Tip Top restaurant».

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Des participants au festival international de yoga en Inde

La participation au festival (600 dollars) inclut les repas -- végétariens -- mais au bout de quelques jours, certains estomacs occidentaux ne supportent plus la monotonie des plats de riz et lentilles proposés par l'ashram.

Pour l'une des professeurs vedettes, une Américaine en turban et tunique blancs qui se fait appeler «Gurmukh Kaur Kalsa», «tous ceux qui ont des valeurs spirituelles veulent revenir à la maison, c'est-à-dire en Inde. L'Inde est le pays de la spiritualité, c'est notre mère à tous».

Cette enseignante, qui a ouvert deux centres de Kundalini à New York et Los Angeles, estime que la présence massive d'étrangers s'explique par «l'absence de paix intérieure en Occident».

«Dans les pays occidentaux, on essaie d'avoir une bonne éducation, de faire beaucoup d'argent, on ne trouve pas la paix, on tombe malade. Mais aujourd'hui, les priorités ont changé: on veut maintenant se sentir mieux, être plus proche de son être et le yoga, c'est cela», conclut-elle.

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