Quand l'hôtel Saint-Paul a ouvert au début du millénaire, son restaurant, le Cube, a fait sensation. La cuisine de Claude Pelletier - qui est aujourd'hui au volant du Club chasse et pêche - y était fine et créative, et cet espace ne s'est jamais remis de son départ, il y a près d'une dizaine d'années.

Voilà qu'après plusieurs tentatives différentes, le lieu pourrait avoir de nouveau trouvé une formule intéressante.

Une formule pas incroyablement originale, puisqu'il s'agit, là comme à tant d'autres tables, de nous offrir principalement charcuteries et bons vins. Mais une formule néanmoins intéressante car, contrairement à tant d'établissements qui ont sauté sur cette mode en croyant que leur amateurisme passerait inaperçu, ici, on travaille sérieusement.

Pour tout dire, le plateau de charcuteries qu'on nous a servi en entrée était probablement le plus beau et le plus savoureux goûté depuis fort longtemps.

Le personnage derrière cette relance s'appelle Philippe Poitras. Plusieurs reconnaîtront ses boucles blondes en le croisant: il a travaillé pendant des années comme sommelier ou même parfois comme gérant de salle au Pied de cochon et à la Cabane à sucre du Pied à Saint-Benoît.

La cave à vins

C'est lui qui a sélectionné la nouvelle cave à vins, remplie de quelques classiques, mais aussi de cuvées intrigantes de petits producteurs travaillant avec des techniques naturelles et ancestrales et des cépages dont on entend rarement parler.

Si vous aimez les vins nature, les importations de la maison Rézin, et si vous cherchez un sommelier à qui vous confier parce que vous rêvez la nuit de Meursault ou de Gevrey-Chambertin (sans avoir les moyens d'assouvir ce fantasme), voilà le genre de personne qui sera capable de vous comprendre et de proposer d'autres solutions.

Côté cuisine, c'est clairement dans la charcuterie qu'il faut se lancer.

On commande donc un plateau, dont la taille sera ajustée selon le nombre de commensaux. Mortadelle maison, jambon ibérique, jambon cru italien, rillettes, foie gras au torchon... La variété de produits est impressionnante et leur qualité aussi. Les saucissons sont parfumés, les cochonnailles cuisinées, bien équilibrées. Et on apprécie l'acidité et la fraîcheur des confitures et marinades qui ponctuent le tout, comme ces asperges et lanières d'aubergines. Oh, et si on veut, on peut même commander du pata negra, la meilleure qualité de jamón venu de la péninsule ibérique.

Le reste est plus inégal. Une huître au serrano - jambon cru espagnol - servie chaude et gratinée perd sa délicatesse. En plat principal, l'assiette de maquereau au jambon des Îles tombe aussi un peu à plat, sans ponctuation parfumée ou savoureuse particulière et le poisson - contrairement à ce qui est si souvent le cas au restaurant - n'est pas assez cuit. En revanche, les tons déclinés façon terre et mer des tagliatelles avec palourdes et serrano remplissent la bouche sans excès de sel, et leur cuisson est juste. Jolie combinaison aussi de gnocchi avec ail des bois et prosciutto.

Choux de Bruxelles et flocons de jambon cru italien

On adore en outre les choux de Bruxelles servis en à-côté avec flocons de jambon cru italien, donc bien salés et dont les feuilles extérieures, plutôt grillées, se détachent et se dévorent comme des chips. Malheureusement, toutefois, la tchoutchouka promise sur le menu, cette délicieuse salade marocaine de tomates et de poivrons mijotés, n'était pas servie le soir de notre passage.

Au dessert, les bombolini, de petits beignets servis avec une panna cotta à l'espresso, se laissent manger aisément; pas très fin côté saveur, mais néanmoins assez légers côté texture. En outre, on cherche un peu de contrastes sur le plat, une pointe aigrelette, qu'on retrouve du côté de la mousse à la ricotta avec fraises, citron et crumble.

Mais se souviendra-t-on longtemps de ce plat? Non. Du plateau de charcuteries, oui.

HAMBAR

355, rue McGill, Montréal, 514-879-1234

www.hambar.ca

Prix > Plateau de charcuteries 24$ ou 46$. Plats principaux entre 20$ et 52$. Desserts entre 7$ et 11$

Carte de vins > Méticuleusement sélectionnée pour inclure importations privées de petits producteurs et des crus plus classiques. Internationale.

Décor > On retrouve la lumière qui était présente dans le Cube, le premier restaurant qui s'est installé dans cet espace à l'ouverture de l'hôtel Saint-Paul. Grande table, bar, étincelantes machines pour trancher le jambon, fesses de porc suspendues... Mélange inattendu de rustique et de rutilant, qui fonctionne.

Ambiance > Vu par un mercredi soir de printemps: salle comble, niveau sonore assez élevé. On dirait que tout ce que le Vieux-Montréal compte de jeunes créatifs et autres entrepreneurs branchés dans la trentaine s'y étaient donné rendez-vous. Petite terrasse tout ouverte, mais un peu isolée de l'hôtel, sur la place d'Youville, pour une ambiance plus aérée.

PLUS > Le plateau de charcuteries, somptueux. Et une belle carte de vins.

MOINS > Des plats principaux inégaux.

On y retourne? > Oui, pour un verre de pinard et quelques cochonnailles, peut-être sur la terrasse.