Martin Boucher Arsenault s'est lancé dans la création de bijoux après des années de travail comme technicien forestier. Mais l'arbre, par la forme de ses branches, est resté au coeur de sa vie professionnelle. «J'ai rapetissé ma forêt», lance-t-il.

Dans son atelier-boutique de Percé, non loin du quai, Wazo (son nom d'artiste) n'arrête pas une seconde. Il discute avec les clients, fait la finition de certains bijoux et règle un imprévu après l'autre. Ses huit mois de création, à la morte saison, ont fait place à l'affluence touristique de l'été. L'artiste ne se plaint pas de la bonne marche des affaires, mais il a hâte de trouver quelqu'un pour gérer la boutique afin de pouvoir créer tout à son aise.

Il y a bientôt 10 ans, ce besoin de créer lui a fait prendre le virage qui mène de la forêt aux bijoux. «J'étais tanné de ne pas pouvoir m'exprimer. J'avais besoin d'innover.»

À l'époque, il a déjà 33 ans. Originaire de Lac-Humqui dans la vallée de la Matapédia, fils d'un père micmac et d'une mère acadienne, Wazo ne se sent pas l'âme urbaine. Il déménage quand même à Montréal pour compléter un cours en bijouterie-joaillerie. De dures années «dans le béton» pour ce Gaspésien. Ce qui l'aide à passer à travers: déjà, il sait exactement où il s'en va. «Je suis rentré (à l'école) en me disant que j'allais créer à partir de matières organiques», raconte-t-il.

À la fin de son cours, Wazo part de zéro. Il se départit de l'un de ses seuls objets de valeur, une antiquité: «un vieux lit français en chêne, tellement beau... Je l'ai vendu à mon propriétaire, un Italien. C'est avec cet argent-là que j'ai acheté des outils, du fil d'or, du fil d'argent.»

La signature Wazo: l'empreinte des branches dans ses bijoux. Il préfère d'ailleurs s'afficher comme «artisan de la branche» plutôt que comme bijoutier. Wazo utilise surtout des rameaux de pommier ou de noisetier, pour leur texture. «J'aime leur côté vécu, leurs rides, comme la peau d'un humain», explique-t-il.

Il procède par moulage, puis forme et forge ses branches, immortalisées dans l'argent ou le bronze. «J'emprunte le physique des matières, mais je les laisse dans la nature.» Il fait de même avec les coraux.

Les pierres trouvent leur place au coeur de ses créations. «Je ne les sertis pas, je les embrasse de branches», précise Wazo. Parmi ses pierres de prédilection, la gaspéite, une pierre des monts Chic-Chocs en Gaspésie, qu'il se procure auprès de prospecteurs. Agates gaspésiennes, perles, ambre ou labradorite du Québec lui font aussi bon usage. «J'aime faire le mélange des minéraux et des branches. C'est comme si j'avais plusieurs couleurs pour peindre», illustre-t-il.

Un bijou réussi, pour Wazo? «Il faut qu'il parle de lui-même, sans être sur un corps. Un beau bijou, c'est comme un art à porter.»

Et Wazo les porte, ses oeuvres. Au moment de l'entrevue, il arbore un collier et un bracelet de sa collection «sorcière», et une bague inspirée de coraux. Même si ce sont encore surtout des femmes qui s'ornent de ses créations, de plus en plus d'hommes emboîtent le pas.

En Gaspésie, les bijoux de Wazo sont offerts à son atelier-boutique de la place du Quai à Percé, et à la boutique L'Échoppe du parc national de Miguasha. À Québec, ils sont vendus chez Esprit nouveau, sur l'avenue Cartier, et à Montréal, au marché Bonsecours, dans le Vieux-Montréal.

Pour en savoir plus: www.wazo.biz