Les viticulteurs du Beaujolais utilisent pas moins de trois méthodes d'élaboration de leurs vins, dont l'une, la thermovinification, est très peu connue.

«Et on peut assembler les vins obtenus par les différentes techniques», expliquait sur place la responsable des vinifications du Brouilly Château de Pierreux, Lydie Nesme.

Autrement dit, un même vin peut avoir été fait en partie par thermovinification; en partie par la méthode beaujolaise traditionnelle, dite en grappes entières (les grappes sont mises à fermenter sans avoir été foulées au préalable); et enfin, en partie à la bourguignonne.

Dans ce dernier cas, on égrappe, c'est-à-dire qu'on écarte la partie ligneuse, ou boisée, des grappes, lesquelles sont foulées et donc écrasées.

«La thermo», dit-on simplement dans le Beaujolais pour désigner la thermovinification.

Celle-ci est... de toute évidence une réponse aux critiques comme quoi les vins du Beaujolais manquent à la fois de couleur et de matière.

Car, par cette méthode, les viticulteurs obtiennent, précisément, beaucoup de couleur et de chair.

La façon de procéder est la suivante. Une fois les raisins foulés, ou pas, on chauffe la vendange à environ 65 degrés Celsius (une température beaucoup plus élevée que la température normale de fermentation), et on la maintient ainsi pendant une douzaine d'heures.

Après quoi le moût est ramené à la température de vinification normale (environ 25 degrés).

Puis, les levures naturelles ou indigènes présentes sur les peaux des raisins ayant été détruites pendant la période de chauffe, on doit alors ajouter aux moûts des levures sélectionnées, comme en produit la célèbre société montréalaise Lallemand.

«On a comme ça beaucoup de couleur, fait observer Lydie Nesme, mais les vins sont plutôt courts en bouche.» En ce sens que leur goût ne persiste pas beaucoup une fois le vin avalé (ou craché).

Certains viticulteurs, notamment Jérôme Mathon, dans l'appellation Brouilly, dont on trouve à intervalles de ses vins au Québec, se refusent à employer la thermovinification. Parce que, m'expliquait-il en substance dans un courriel, elle élimine les levures naturelles et modifie donc le caractère des vins.

Impossible de trancher... Car tant du côté des viticulteurs que des consommateurs, on trouve des partisans et des dénigreurs de ces beaujolais bien colorés et denses en bouche.

Mon opinion? Un peu de thermovinification ne nuit pas, tout au contraire, me semble-t-il. Mais, chose certaine, c'est la demande qui le veut. Ne dit-on pas que le client a toujours raison?

À noter enfin que la thermovinification est aussi utilisée dans d'autres vignobles, notamment dans le Languedoc.

Deux beaujolais

Morgon 2009 Jean Ernest Descombes, 19$ (856898), *** 1/2,$$, 2012-2016.

Goûté à l'aveugle, et richement coloré pour un beaujolais, ce vin a été élaboré à 60% par thermovinification. Le bouquet est ample, associant fruits rouges et fruits noirs et... je me suis demandé s'il ne s'agissait pas d'un vin de Syrah. Suit une bouche charnue, dense, aux tannins tendres. Avec l'aération, cependant, le caractère variétal (c'est du Gamay, bien sûr) est nettement manifeste. Il sera mis en vente le jeudi 19 juillet. 12,7% (99 caisses).

Moulin-à-Vent 2009 Clos de la Tour, 24,55$ (11679223), *** 1/2,$$$, 2012-2017.

Très bien coloré lui aussi, et goûté également à l'aveugle, cet autre beaujolais est du même style que le Morgon, en un peu plus concentré, m'a-t-il semblé. Le bouquet, de petits fruits noirs, est de bonne ampleur, la bouche bien en chair, bâtie sur des tannins gras. Et, encore dans ce cas, je n'ai pas deviné qu'il s'agissait d'un beaujolais. Très bon également. Il sera lui aussi en vente le 19 juillet. 13% (250 caisses).

D'autres vins

Rioja 2008 Crianza Vina Bujanda, 15$ (11557509), ***,$ 1/2, 2012-2015.

Vin rouge de la Rioja, très coloré... comme le demande le marché. D'abord discret, son boisé, aux nuances vanillées, est beaucoup plus présent au nez après un bon moment d'aération. Plus que moyennement corsé, assez peu tannique, les fruits rouges dominent, à la fois au nez et en bouche. 100% Tempranillo, avec élevage en fûts de chêne américain (70%) et français (30%). À noter que le prix de ce vin a diminué de plus de deux dollars. 13% (285 caisses).

Coastal Region 2009 Syrah Viognier Goat-Roti, 22,40$ (10440691), ***,$$ 1/2, 2012-2017?

Vin rouge d'Afrique du Sud, élaboré, comme le Côte Rôtie (Goat-Roti!), de la vallée du Rhône, avec de la Syrah et un peu de Viognier. Richement coloré, son bouquet, ample et passablement épicé (le bois), rappelle les mûres. Corsé, tannique, ferme, quoique sans rugosité, il laisse en fin de bouche, comme tant de rouges de ce pays, des arômes évoquant le cépage Pinotage, d'origine sud-africaine. Élevage en fûts de chêne français. Particulier. 14,5% (122 caisses).