Les choses ont considérablement changé à la SAQ depuis quelques décennies. Et, dans l'ensemble, pour le mieux. Le carré d'as (si je puis dire) réalisé par la société d'État depuis, disons, le début des années 80, au moment où les consommateurs ont commencé à s'intéresser au vin pour de bon, est formé - à mon avis - des quatre éléments suivants.

D'abord, et ce fut l'étincelle qui déclencha le reste, il y a eu l'apparition des libre-service.

Le vin avait désormais droit de cité, ce n'était plus une boisson défendue, qu'on cachait dans l'arrière-boutique ou la cave des succursales et qu'on remettait au client subrepticement, par un guichet, comme au confessionnal!

Puis, deuxième élément, la gamme, à partir de ce jour-là, s'est mise à s'élargir, pour enfin atteindre ce qu'elle est aujourd'hui. Raffinée, diversifiée, s'enrichissant constamment de nouveaux produits.

Toujours plus curieuse, la clientèle a demandé à être informée. Troisième élément, donc, l'apparition des conseillers en vin.

Le quatrième élément est en quelque sorte un cadeau qu'a fait la SAQ à sa clientèle, à savoir la création du magazine Cellier, à l'automne 2006, et dont vient de paraître le 22e numéro.

Gratuit, de très haut niveau, mettant toujours l'accent sur le produit phare - le vin, bien entendu -, il s'agit là, pour la SAQ, d'une séduisante carte de visite et d'un outil de promotion exceptionnel, qui est à la hauteur de ses visées.

Visées, bien compréhensibles, qui sont de vendre toujours davantage de vins de qualité, et donc plus chers, avec pour résultat une augmentation, lente mais soutenue, du prix moyen de la bouteille de vin, du chiffre d'affaires et des bénéfices.

Or, la société d'État entendrait modifier l'orientation de son magazine pour l'axer sur des sujets de style «art de vivre». Ce qui risquerait de reléguer son produit phare, le vin, au second, sinon au troisième plan. Où serait l'intérêt, à la fois pour le consommateur et la société d'État? On peut se le demander.

«Au moment où on se parle, il n'y a rien de changé et de décidé (...) Il est possible qu'il y ait évolution, la clientèle change, on est toujours en train de s'adapter», a déclaré à ce sujet le porte-parole de la SAQ Renaud Dugas.

Le contenu de Cellier pourrait être enrichi, afin de le rendre encore plus attrayant, toujours en ayant le vin comme centre d'intérêt. Les sujets ne manquent pas. Nouveaux millésimes, nouvelles tendances, nouveaux producteurs, etc.

Car le vin, personne ne l'ignore, est, pour ainsi dire, un puits inépuisable, comme le montrent les décennies d'existence de magazines comme l'anglais Decanter, la Revue du vin de France, l'américain Wine Spectator, etc.

Bref, il faut souhaiter qu'il en aille de même pour Cellier et donc que celui-ci reste avant tout centré sur le vin.

N'est-ce pas ce que vend essentiellement la SAQ?

Coteaux du Languedoc 2009 Prestige Château Puech-Haut, 26,25$ (11 565 082), et 52,50$ le magnum (11600175), ***1/2,$$$, 2012-2016.

Mis en vente il y a deux jours, dans le cadre de la parution du 22e numéro de Cellier, ce très beau vin comptant parmi les plus réputés du Languedoc se présente avec une robe quasi opaque, le bouquet, ample, épicé, harmonieux, mais retenu pour l'instant, étant bien typé Languedoc. La bouche est du niveau attendu, d'une bonne concentration, dense, avec des tannins gras, aimables. 55% Grenache, 35% Syrah et 10% Carignan, avec élevage en fûts pour le quart du vin de Syrah et en cuves béton pour tout le reste de la cuvée. 14,5% (146 caisses et 900 magnums).

Toscana 2008 IGT Cabernet Sauvignon San Fabiano Calcinaia, 25,95$ (11546914), ***,$$$, 2012-2015.

Autre vin commercialisé pour le 22e numéro de Cellier, richement coloré, et très Cabernet Sauvignon au nez mais sans rien de végétal. Il s'agit d'un vin charnu, aux tannins bien serrés, un peu austère. Très réussi. 90% Cabernet Sauvignon et 10% Petit Verdot, avec élevage en fûts de chêne français. 14% (75 caisses).

Toscana 2006 Tenuta Monteti, 33,50$ (11547061), ***1/2, $$$ 1/2, 2012-2014.

Vin de Toscane, de cépages bordelais, à peu près opaque, au bouquet large, distingué, avec une note chocolatée (le bois) qu'on retrouve en bouche. Laquelle est dense, relativement corsée, bâtie sur des tannins bien enrobés. Élevage en fûts de chêne français, dont 70% de neufs. Également en vente depuis deux jours. 14%

(100 caisses).

Priorat 2009 Camins del Priorat Alvaro Palacios, 23,05$ (11180351), et 46$ le magnum (11604651),***1/2, $$1/2, 2012-2015.

D'une couleur soutenue sans qu'elle soit opaque, son généreux bouquet associe fruits noirs et fruits rouges, avec des notes épicées (le bois) bien mariées à l'ensemble. Les saveurs sont mûres, avec quelque chose comme d'un peu sucré, la bouche bien concentrée, les tannins gras. 50% Carignan, 40% Grenache et 10% de Cabernet Sauvignon et de Syrah, l'élevage étant fait en fûts de chêne américain. 14,5% (209 caisses et 1500 magnums).

Bourgogne 2009 Bachelder, 34$, *** $$$1/2, 2012-2013.

Joli bourgogne blanc, plutôt léger, au bouquet harmonieux et rappelant les vins de Chablis, du Québécois Thomas Bachelder, grand amoureux de la Bourgogne. Non sans finesse, ses saveurs sont relevées par un peu de gaz carbonique, et le boisé est éminemment discret. Mis en vente également dans le cadre du 22e numéro de Cellier. Son seul défaut: il est cher. 13% (100 caisses).

La recommandation de la semaine

Bordeaux 2010 Louis Eschenauer

L'étiquette laisse... à désirer, le vin, lui, d'une autre grande année pour le Bordelais, est étonnamment bon et digne d'intérêt, surtout compte tenu du prix. Rien d'opaque, mais la couleur est soutenue, le bouquet, net, de bon volume, légèrement boisé. La bouche suit, concentrée, avec du corps, tannique et un peu carrée, quoique sans rugosité. Vin de Merlot, de Cabernet franc et de Cabernet Sauvignon, il est élevé partiellement en fûts et le reste en cuves. À ne pas mettre en cave trop longtemps, car le bouchon est en matière plastique, mais à goûter sans faute. 13% (2383 caisses).

15$ (517722), ***,$1/2, 2012-2013.