Carl Villeneuve-Lepage, sommelier au Toqué! à Montréal, vient de remporter le concours du meilleur sommelier du Canada, à Vancouver, devant huit autres candidats venus d'un océan à l'autre. La sommelière Véronique Rivest, l'un des juges cette année, nous propose une petite incursion dans les couloirs du concours.

Seriez-vous en mesure de participer au concours du meilleur sommelier du Canada ? Neuf candidats représentant cinq provinces ont pris part à la compétition organisée tous les trois ans et qui vient de se dérouler à Vancouver, les 4 et 5 septembre. Voici son déroulement. Vous verrez, il s'agit d'un beau parcours à obstacles.

La première journée, les candidats ont d'abord passé un examen théorique de 50 questions. Parmi celles-ci: 

- Quelle est la gamme de degrés Oechslé minimum admissible pour un vin spätlese en Allemagne?

- Qu'est-ce que la flash détente?

- Combien de menzioni geografiche aggiuntive (lieux-dits) sont reconnus dans la DOCG Barbaresco?

- Quel est le vieillissement sur lies minimum pour un Muscadet de Sèvre et Maine Clisson?

- Qu'est-ce que le polyvinylpolypyrrolidone?

- Quelle est la région de production des whiskies écossais suivants? Talisker, Springbank, Auchentoshan, Tamdhu, Kilchoman.

Après l'examen théorique, les candidats doivent procéder à la dégustation analytique de deux vins: en faire une description complète, incluant l'évaluation des arômes et de la structure (acidité, alcool, tanins), l'identification précise des vins, et terminer en évaluant leur potentiel de garde, en suggérant la température de service adéquate ainsi que des accords avec des mets.

La prochaine épreuve en est une d'accord mets et vins: un menu quatre services à harmoniser avec des sakés, avec explications à l'appui.

Ensuite, une dégustation analytique de trois xérès: un fino, une manzanilla pasada et un oloroso.

Puis, finalement, un examen de service, assez classique: servir une demi-bouteille de Sancerre à une table de six convives, qui posent toutes sortes de questions aux candidats pendant l'épreuve.

Au deuxième jour de la compétition, le mardi 5 septembre, on fait l'annonce des trois finalistes qui ont obtenu les meilleurs résultats lors des épreuves de la veille. Il s'agit de Pier-Alexis Soulière, Carl Villeneuve-Lepage et Steven Robinson, qui seront de la finale, le jour même.

La finale est de très haut niveau, et se déroule en langue seconde, comme pour le concours du meilleur sommelier du monde.

Ce n'est pas pour rien que les Canadiens se classent aussi bien à l'international: la barre est placée très haut ici!

La première épreuve est la préparation d'un cocktail, un daiquiri, pour trois personnes. Puis, l'identification de quatre spiritueux à l'aveugle: un arak du Liban, un rhum de 18 ans du Nicaragua, un brandy espagnol de 5 ans et un Armagnac de 1983.

Ensuite, le service d'une bouteille de Champagne, qui doit être passée en carafe (avec explication du geste) et servie à une table de six convives, toujours avec des questions sur le vin, sa composition et son origine précise, et des recommandations d'accords. La bouteille doit être vidée au complet dans les six verres, en quantité parfaitement égale, sans possibilité de retourner en arrière.

La prochaine épreuve est la décantation et le service d'un magnum de vin rouge à une autre table de six convives. Mais il n'y a que des carafes de 750 ml, ce qui force les candidats à en utiliser deux (un magnum contient 1,5 L). Le client demande à ce que le bouchon soit intact, pour le conserver en souvenir. Il faut donc utiliser un tire-bouchon à deux lames - qui s'insèrent de chaque côté du bouchon - plutôt qu'un tire-bouchon classique qui le percerait.

Ensuite, des photos de personnalités et de paysages du monde du vin à identifier (entre autres: Heidi Barrett, célèbre vigneronne californienne; Alice Feiring, gourou américaine du vin nature; le vignoble de Bernkasteler Doctor dans la Moselle en Allemagne et de Contours Vineyard dans Eden Valley en Australie), et l'identification d'erreurs dans une carte des vins.

Finalement, la dégustation analytique de trois vins rosés: de Provence, de l'Oregon et de Tavel.

Au bout de ces épreuves, le gagnant est enfin annoncé: Carl Villeneuve-Lepage, du restaurant Toqué! à Montréal devient le meilleur sommelier du Canada 2017. La deuxième place va à Pier-Alexis Soulière, présentement au restaurant Manresa, en Californie, et la troisième à Steven Robinson du restaurant Atelier, à Ottawa.

L'Association canadienne des sommeliers professionnels (ACSP), qui organise le concours, compte cinq divisions au pays: Québec, Ontario, Atlantique, Colombie-Britannique et Prairies. 

Chacune organise un concours provincial et les tenants d'un titre provincial peuvent participer au concours du meilleur sommelier du Canada. Ceux qui atteignent la première et la seconde place peuvent ensuite prendre part au concours du meilleur sommelier des Amériques.

Le prochain se déroulera à Montréal au printemps 2018. Carl et Pier-Alexis pourront donc y prendre part. Ce sera une occasion exceptionnelle pour le public d'assister à un concours et d'encourager nos meilleurs sommeliers canadiens.

Au-delà du travail énorme que représente un tel concours pour les candidats, c'est une occasion unique de tisser des liens, de faire grandir et reconnaître la profession.