L'Armagnac, déjà vendu dans plus de 100 pays, s'est lancée à la conquête de la Chine qui est en passe de devenir dès 2012 le plus gros acheteur à l'étranger de cette eau-de-vie à la robe couleur or ambré produite dans le sud-ouest de la France.

Distillé depuis plus de 700 ans, l'Armagnac et ses quelque 3,5 millions de bouteilles (en 2008) ont depuis longtemps conquis des marchés sur les 5 continents, pénétrant récemment des pays comme le Brésil, le Belarus et la Zambie.

Mais si «le client historique» reste la Grande-Bretagne, en 2008 et 2010 le premier importateur a été la Russie, et début 2012 ce pourrait être la Chine, selon le président du Bureau national interprofessionnel de l'Armagnac, Pierre Tabarin.

En 2010, précise-t-il à l'AFP, il s'est vendu 25 000 bouteilles d'Armagnac en Chine. Un nombre qui pourrait atteindre 250 000 en 2011, soit à peu près autant qu'en Russie. «Mais en chiffre d'affaires, la Chine sera devant car les Armagnac importés sont plus âgés», et donc plus chers.

Après la Chine, les plus gros importateurs devraient être peut-être Hong-Kong, la Russie, la Grande-Bretagne et les États-Unis.

Pour M. Tabarin, l'ouverture du marché chinois a des raisons politiques et économiques: «Une réduction de la consommation d'alcool de riz pour garder cette denrée pour l'alimentation» et «la montée d'une classe moyenne plus aisée».

Thomas Guasch, viticulteur distillateur à Castelnau-d'Auzan, dans le Gers (sud-ouest), exporte 80% de sa production vers les marchés traditionnels (Grande-Bretagne, Italie...), mais également vers ceux «qui démarrent comme la Slovaquie, la Slovénie ou le Belarus».

«La Chine se réveille pour l'import, on sent un bouillonnement», constate-t-il en notant qu'il a eu cette année une trentaine de demandes d'acheteurs éventuels, contre 15 l'an dernier pour ses «Château de Bordeneuve» et «Baron de Sigognac».

«Ils s'y connaissent, et l'Armagnac a une bonne réputation», souligne-t-il.

«L'Armagnac est un produit du terroir traditionnel plus qu'un produit de luxe», pour Jérôme Delord, dont la famille distille l'eau de vie depuis quatre générations à Lannepax (Gers). La Maison Delord exporte 70% de son volume, notamment en Australie, en Russie, en Suisse.

Il n'a pas encore réussi à décrocher un marché en Chine, mais «il faut qu'on y soit», reconnaît-il. Avec ses clients, il insiste sur l'aspect terroir de l'Armagnac, aux côtés du foie gras, du confit, du rugby... et de d'Artagnan: «Le produit n'en est que meilleur!»

Les quelque 20 000 hectares de production française, peuvent faire face à l'appel d'air de la Chine, de nombreux propriétaires ne distillant actuellement qu'une partie de leur production, le reste étant vendu comme vin des Côtes de Gascogne.

«L'objectif, selon M. Tabarin, est de faire passer l'Armagnac de 0,1% du marché mondial des spiritueux à 0,2%».

Un but qui ne pourra être atteint, reconnaissent les spécialistes, qu'en diversifiant les habitudes de consommation de l'Armagnac, comme cela se fait à l'étranger: les Chinois le boivent pendant le repas, les Australiens trinquent avec leurs collègues à la sortie du bureau...

Aussi, pour rajeunir la clientèle en France, l'interprofession n'hésite plus à proposer de boire l'Armagnac non plus seulement en digestif mais aussi en apéritif, avec des glaçons, en cocktails et au cours du repas avec le fromage (Roquefort), le dessert, du chocolat...