Marianne St-Gelais est présente à l’aréna Maurice-Richard dans le cadre des Championnats canadiens de courte piste, cette semaine. Celle dont les exploits sur la patinoire ont souvent fait vibrer le Québec garde cependant ses pieds sur le béton. Elle est là pour encourager et conseiller les jeunes patineurs.

L’ex-olympienne aujourd’hui entraîneuse au Centre régional canadien d’entraînement (CRCE) de patinage de vitesse courte piste a rencontré La Presse le 22 août, après la deuxième journée de compétition.

C’est la première fois que la native de Saint-Félicien assiste aux sélections olympiques plutôt que d’y participer, elle qui a pris part aux trois derniers Jeux olympiques d’hiver. « Étrangement », dit-elle, ça ne lui fait pas le moindrement mal de ne pas être celle qui lutte pour une place au sein de l’équipe nationale cette semaine.

J’ai pris ma retraite parce que j’en avais assez de mon sport.

Marianne St-Gelais

« Je l’aimais encore, j’étais passionnée, mais je n’avais plus ce dévouement de me lever tous les matins, de chausser mes patins et d’aller me dépasser. Je ne sentais plus que j’avais cette agressivité de vouloir battre ma coéquipière. Au contraire, j’étais fière d’elle. C’est plus ça qui est là en ce moment. »

Il n’est donc pas étonnant qu’elle occupe aujourd’hui et depuis un an le rôle d’entraîneuse. La femme de 31 ans encadre la relève du courte piste afin de l’aider à atteindre les plus hauts sommets, comme elle l’a elle-même fait par le passé.

« J’aime ben ça ! », lance-t-elle avec tout l’entrain qu’on lui connaît.

On pourrait penser que son rôle amène St-Gelais à s’intéresser davantage au volet performance des jeunes athlètes. C’est tout le contraire. Elle souhaite avant tout créer une connexion avec eux. Pas surprenant, vu ses talents de communicatrice.

« Connaître l’être humain et l’aider à se dépasser, ça va au-delà de juste lui dire de se pencher et de pousser, explique-t-elle. Il y a une grosse partie psychologique avec les êtres humains. Je ne suis pas préparatrice mentale, je ne suis pas psychologue, mais j’essaie d’entrer en relation avec les jeunes pour qu’ils me fassent assez confiance pour, après ça, vouloir se dépasser. »

« Je valorisais énormément le rapport que j’avais avec mes entraîneurs, avec mes coéquipiers, avec l’équipe autour de moi, ajoute-t-elle. J’ai l’impression que l’environnement y est vraiment pour beaucoup quand tu veux que les jeunes se dépassent. Mon plus gros défi, j’ai l’impression que c’est vraiment ça. »

St-Gelais n’a jamais vraiment voulu être entraîneuse. L’occasion s’est présentée un peu par hasard, et l’ex-patineuse n’avait pas vraiment d’attentes en s’embarquant dans le projet, mais elle est loin de le regretter à ce jour.

« Dans ma tête à moi, ce n’est pas tous les bons athlètes qui sont forcément de bons entraîneurs, laisse-t-elle entendre. Je me rends compte, en étant avec mes jeunes, que ma pédagogie et la façon dont je vais leur transmettre est très importante. C’est peut-être très clair et hyper facile, mais le vulgariser, c’est une autre histoire. En grande partie, c’est ça qui est important. […] Ça, je ne savais pas si je l’avais, parce que je ne l’avais jamais fait de ma vie. Mais ça s’est super bien passé avec les jeunes. »

Je suis là parce que j’aime ça et que ces jeunes me font triper.

Marianne St-Gelais

Marc Gagnon se plaît aussi dans son nouveau poste

Un autre grand ex-patineur québécois est aussi présent aux Championnats canadiens cette semaine. Entraîneur adjoint de l’équipe canadienne au côté de Sébastien Cros depuis janvier, Marc Gagnon assiste à ses premières sélections olympiques dans son nouveau poste. Au moment de s’entretenir avec La Presse, il avait presque perdu la voix à force d’encourager les jeunes athlètes.

Quintuple médaillé olympique, Gagnon a pris sa retraite il y a bientôt 20 ans. Il était alors resté loin des arénas pendant quelques années avant de revenir dans le monde du sport. Il a passé 6 ans comme entraîneur-chef du CRCE avant de se joindre à l’équipe nationale.

« C’est une passion. Je la vis juste différemment maintenant, mais elle est tout aussi intéressante », fait-il valoir.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Marc Gagnon

Dans le temps où j’étais athlète, c’était mon succès qui comptait, mais là, je veux que tout le monde réussisse. Ça demande même plus d’investissement parce que tu veux trouver toutes les petites choses qui vont changer la donne pour chacun de ces athlètes.

Marc Gagnon

L’ex-olympien se souvient de sa dernière course comme si c’était hier. Il pourrait décrire chaque coup de patin. Et ayant déjà vécu plusieurs sélections olympiques, il est parmi les mieux placés pour comprendre comment chacun des jeunes athlètes se sent à l’aréna Maurice-Richard cette semaine.

« Est-ce que ça me manque ? Eh non ! lance-t-il en riant. Le stress de tout ça, zéro ! J’ai l’impression qu’on se retrouve quand même à être l’un des sports qui rendent ça difficile, une qualification pour les athlètes. C’est correct parce qu’on le fait pour s’assurer d’avoir les meilleurs athlètes, mais en matière de stress, c’est difficile. C’est sur 10 jours, c’est vraiment long, ça prend des athlètes résilients. On a de bons athlètes et, en plus, ils sont jeunes. »

Belle relève

Parlant de bons et jeunes athlètes, il y en a plusieurs qui luttent pour une place dans l’équipe nationale depuis samedi dernier. Certains ont impressionné depuis le début de la compétition, qui se termine dimanche. Du lot, la Trifluvienne de 17 ans Florence Brunelle et le Sherbrookois de 20 ans Nicolas Perreault. Tout porte à croire que la relève est belle en courte piste.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Florence Brunelle

« Oui, on en a, de la relève, et on le voit très bien, affirme Marianne St-Gelais. Ce sont des sélections olympiques hors du commun. Je n’ai jamais vu autant d’action en deux jours de compétitions. Je trouve aussi que les jeunes ont une audace qu’on n’avait pas vue depuis longtemps. Cette audace de vouloir se dépasser, de prendre sa place, de ne pas se limiter à celui qui est devant soi, à un nom sur une feuille, à un titre. »

De tous les patineurs ayant pris part aux Jeux olympiques de PyeongChang, en 2018, seuls trois sont encore en action : Charles Hamelin, Kim Boutin et Pascal Dion. De l’avis de Marc Gagnon, la prochaine équipe nationale sera probablement la plus jeune jamais vue. Celle avec le moins d’expérience, aussi.

« C’est sûr que l’année COVID-19 a dérangé tout le monde dans le sport, mais nous, avec une équipe jeune comme ça qui avait besoin de se solidifier, ça va être plus difficile. C’est là qu’on va voir jusqu’à quel point l’équipe est capable de prendre un step. »

« Par contre, il y a du talent, précise-t-il. Si ça ne se matérialise pas cette année, ça va être dans quatre ans, c’est certain, parce qu’on a vraiment de la bonne relève. Après, on peut être surpris dans six mois aussi ! »

Leadership au féminin

Patinage de vitesse Canada a récemment annoncé la mise en place d’un projet pilote de leadership féminin en vue de la prochaine saison. En tant qu’ambassadrice, Marianne St-Gelais cherchera à inspirer les patineuses et les entraîneuses cadres qui participent au programme grâce à une série de séances vidéo virtuelles.