À la veille d'une réunion cruciale de la commission exécutive du Comité international olympique, qui doit se prononcer mardi sur le sort des athlètes russes pour les Jeux de PyeongChang, Alex Harvey réclame un « message clair ».

Alex Harvey n'avait pas commencé sa saison qu'il faisait déjà parler de lui. En marge d'une compétition préparatoire en Suède, le mois dernier, le Russe Alexey Petukhov se demandait si son rival canadien n'était pas un froussard.

Suspendu à vie par le Comité international olympique (CIO), il lui en voulait d'avoir soulevé des doutes sur la probité de son compatriote Sergey Ustiugov, dominant aux Mondiaux.

Furieux, Petukhov a écrit à Ivan Babikov, entraîneur d'origine russe de l'équipe canadienne de ski de fond, pour lui faire savoir que son athlète méritait « un coup de poing au visage » pour avoir émis un tel commentaire. Harvey n'a pas reçu le message, mais des journaux scandinaves en ont fait état.

Les deux hommes se sont retrouvés à Kuusamo, il y a 10 jours, pour le début de la saison de Coupe du monde. Aucun coup n'a été échangé... pas plus qu'à Lillehammer, la semaine dernière, où les deux fondeurs logeaient au même hôtel.

« Ça a l'air qu'il a dit ça, mais il ne me l'a jamais dit directement », a indiqué Harvey après sa sixième place au skiathlon, dimanche, en Norvège. « Il ne m'a jamais menacé. En partant, tous les Russes ne parlent pas très bien anglais, alors on ne leur parle pas beaucoup. On se salue d'un signe de tête. C'était pareil comme avant ! Je ne lui parlais pas plus ou moins. »

En stage à Davos, le champion mondial du 50 kilomètres n'avait jamais prévu de participer aux épreuves de début de saison à Gällivare, ce qui a peut-être échappé à Petukhov, suppose-t-il. À ses yeux, cette petite tempête n'était qu'une « histoire croustillante » pour les médias scandinaves.

« COMMENT TU CHANGES ÇA ? »

La controverse entourant les athlètes russes, elle, est bien réelle. Après avoir pu prendre le départ à Kuusamo, Petukhov et cinq de ses collègues ont finalement été suspendus provisoirement pour la deuxième fois par la Fédération internationale de ski (FIS), en raison de leur implication dans un stratagème de dopage aux Jeux olympiques de Sotchi.

Après avoir disqualifié 25 athlètes russes pour la même raison, la commission exécutive du CIO doit maintenant se prononcer sur le sort de l'ensemble de l'équipe en vue des Jeux de PyeongChang, dans le cadre d'une réunion à Lausanne, demain et mercredi.

Sans réclamer un bannissement de tous les athlètes russes, Harvey espère que le CIO enverra « un message clair ».

« Ça a vraiment l'air systémique, a noté Harvey. Ce ne sont pas des individus qui font le choix de se doper. C'est vraiment organisé. Comment tu changes ça ? En ce moment, les règles sont écrites de façon à ce que ce soient les athlètes qui écopent. Si tu veux changer le système, j'ai l'impression que ça prend quelque chose de drastique de la part du CIO pour envoyer un message clair. Il faut crever l'abcès comme la Fédération internationale d'athlétisme l'a fait depuis trois ans. »

En ce sens, « les coaches, les médecins et les directeurs sportifs » doivent aussi recevoir des sanctions, a plaidé l'étudiant en droit.

« Tu as des athlètes pour qui le ski de fond était toute leur vie. Ils ont suivi les indications du coach toute leur vie. Ça adonne qu'ils se font pogner pour dopage. Ils retournent en Sibérie, mais les coaches, eux, continuent de travailler. »

- Alex Harvey

Quant à Ustiugov, quintuple médaillé aux Mondiaux de Lahti et finaliste aux Jeux de Sotchi (5e du sprint), Harvey a réitéré les propos qu'il avait tenus en novembre au Journal de Québec : « Tu peux juste avoir des doutes contre lui, mais tu ne peux pas dire qu'il est dopé. Quand tu lis que c'est le système au complet... Ça a l'air que lui n'était pas impliqué là-dedans. »

Ustiugov a terminé neuvième dimanche à Lillehammer, entouré de ses jeunes compatriotes Alexey Chervotkin (8e) et Alexander Bolshunov (10e). « C'est une nouvelle génération, a commenté Harvey. Beaucoup sont très jeunes, ont moins de 23 ans. Vraiment, il faut leur donner le bénéfice du doute. »

En voilà trois qui ne dormiront pas très bien cette nuit, en souhaitant que le CIO soit aussi magnanime.