À 21 ans, Valérie Grenier est l'un des plus beaux espoirs du ski alpin canadien. Aux Jeux olympiques de PyeongChang, aucun de ses compatriotes n'a fait mieux que sa sixième place au combiné.

Ce résultat au-delà de ses attentes cache un mal qui l'afflige depuis déjà plusieurs années: le syndrome des loges. Cette pathologie, qui empêche les muscles de pleinement se déployer durant un effort, entraîne des douleurs chroniques parfois insoutenables aux tibias, là où s'exerce tout le contrôle en ski. Comme si un pilote de Formule 1 ne pouvait utiliser ses doigts adéquatement pendant une course.

Au printemps 2016, Grenier a subi une opération aux deux jambes pour tenter de régler ce qui est aussi appelé le syndrome du compartiment. Après une trêve de six mois, ses maux ont ressurgi en plein coeur de l'hiver. L'imminence de ses premiers JO lui a fait repousser une deuxième intervention.

Au lendemain d'une dernière saison frustrante, passée à composer avec la douleur, Grenier est retournée sur la table d'opération le 13 avril à Calgary. «J'espère que cette fois-ci, c'est la bonne», a déclaré la jeune femme, hier, depuis la métropole de l'Alberta, où elle fait sa rééducation entourée des spécialistes de Canada Alpin.

Les médecins se sont concentrés sur le tibia gauche, procédant à une fasciotomie, soit une incision pratiquée dans l'enveloppe du muscle. Ils ont aussi libéré un nerf coincé qui lui causait une douleur aiguë.

«C'était un endroit sur le côté, en bas de mon tibia, que je ne pouvais même pas toucher avant que je me fasse opérer, a expliqué Grenier. Quand j'y touchais, ça envoyait un choc intense à mes pieds et à mes orteils. Au moins, de ce côté, je vois déjà une grande différence.»

«Vraiment frustrant»

Optimiste, Grenier doit toutefois s'armer de patience depuis la semaine dernière. Une infection à ses deux cicatrices l'a obligée à prendre des antibiotiques et à freiner ses élans dans le gymnase.

«C'est vraiment frustrant parce que c'est un recul. On ne peut pas être aussi combatif que la semaine passée. C'est stressant un peu. Je veux vraiment tout faire pour que ça guérisse le plus vite possible. Il faut juste que je reste positive. En ce moment, c'est la partie la plus difficile.»

Si l'expérience d'il y a deux ans lui fait craindre une rechute, l'ex-championne mondiale junior de descente n'a aucun regret d'être repassée sous le bistouri. Après deux premières saisons de Coupe du monde très prometteuses, où elle a marqué des points dans les quatre disciplines, elle a dû restreindre son temps sur neige l'hiver dernier, reculant au classement.

«C'était vraiment frustrant. Des fois, j'arrêtais pendant une semaine pour donner une pause à mes tibias. Je ne pouvais pas enfiler mes bottes de ski, sinon ça empirait. Je sentais que je ne pouvais pas skier à mon plein potentiel.»

Vers la fin des longues descentes, elle peinait aussi à maintenir sa position de recherche de vitesse.

Un peu moins d'un mois avant le début des Jeux, la Franco-Ontarienne de Saint-Isidore a aggravé son cas en faisant une chute dans les filets pendant une descente d'entraînement à Cortina d'Ampezzo. En Corée du Sud, elle a mal entrepris sa quinzaine en ne ralliant pas l'arrivée lors de la deuxième manche du slalom géant. Ses deux épreuves de vitesse (23e en super G et 27e en descente) n'ont pas plus été à la hauteur de ses ambitions.

Un déclic est survenu durant la manche de descente du combiné. Croyant se diriger vers un autre classement décevant à mi-parcours, elle s'est simplement relâchée et laissé guider par son instinct. «Quand j'ai vu que j'étais sixième en bas, je me suis dit: "Wô, qu'est-ce que c'est que ça?" On dirait que j'étais trop stressée jusque-là, que j'essayais de faire des choses pas normales.» Libérée, elle a maintenu son rang après la manche de slalom, en route vers un résultat «vraiment fou» pour elle.

Inspirée par les amitiés nouées avec les autres athlètes canadiens à PyeongChang, dont le bosseur Mikaël Kingsbury, Valérie Grenier rêve maintenant de participer aux succès du pays à Pékin en 2022. D'ici là, elle se concentre sur la prochaine étape, avec l'espoir de prendre part au premier camp sur neige avec ses coéquipières en Italie au mois de juillet.

Photo tirée d’Instagram (@valeriegrenier)

Au lendemain d'une dernière saison frustrante, Valérie Grenier est passée sur la table d'opération le 13 avril à Calgary.