Une image plus canadienne, ça ne s'invente pas. Les parents, Jan et Zedna, des immigrés tchèques, agitant l'unifolié au bout d'un bâton de ski. La copine, Lauren, chantant l'Ô Canada avant la course. En arrière-plan, les Rocheuses émergeant de la pénombre.

John Kucera, le petit gars de Calgary, a mis la touche finale à ce scénario de rêve en prenant le deuxième rang du super-G de Lake Louise, hier après-midi. Entouré de sa famille et de ses proches, Kucera a pu célébrer chez lui, sur sa montagne, ce troisième podium en Coupe du monde, un premier en près de deux ans.

«Je reviens à la maison et je remonte sur le podium. C'est vraiment un bon feeling», a déclaré le skieur de 24 ans, qui s'était fait un nom en remportant le super-G de Lake Louise en 2006.

En franchissant la ligne d'arrivée, Kucera n'a pas eu à se retourner vers le tableau indicateur pour comprendre qu'il venait de réaliser une bonne performance. La foule en délire lui a fait comprendre qu'il était premier.

La journée s'annonçait excitante. Le coureur suivant, un certain Hermann Maier, s'est alors rappelé au bon souvenir des amateurs de ski. Celui qu'on surnomme le Herminator a attaqué le parcours comme à ses beaux jours pour devancer Kucera par 59 centièmes. Quand l'Américain Bode Miller, tenant du titre du globe de cristal, a perdu un ski dans le mur principal, on a compris que personne n'approcherait Maier.

L'Autrichien de 36 ans signait ainsi son 54e succès en Coupe du monde, un premier depuis une victoire à Garmisch en janvier 2006. Pas mal pour un gars qui songeait à la retraite au printemps et qui a failli faire l'impasse sur Lake Louise en raison de maux de dos. «Il y a trois semaines, j'étais incapable d'entrer et de sortir de mon auto», a expliqué Maier, qui s'imposait pour une quatrième fois en super-G à Lake Louise.

Fin renard, Maier a utilisé ses skis de descente pour le super-G, comme la plupart de ses coéquipiers autrichiens. «Il faut prendre des risques pour gagner», a-t-il expliqué. Les Canadiens avaient envoyé les leurs la veille par avion à Beaver Creek, lieu de la prochaine Coupe du monde.

Le Suisse Didier Cuche a complété le podium. Le vétéran de 34 ans a eu ce commentaire suave au sujet du gagnant: «C'est bien de le voir de retour. En espérant que c'est Hermann qui revient, et non pas le Herminator...»

Kucera lisait d'ailleurs la biographie de Maier la veille de sa victoire à Lake Louise, en novembre 2006. «C'est un peu étrange d'être sur un podium à côté d'une idole de jeunesse, a confié Kucera. Mais la prochaine fois, j'espère bien le battre.»

Le podium de Kucera, jumelé à la septième place d'Erik Guay, permet à l'équipe canadienne de mieux respirer à l'issue de ce premier week-end de vitesse de la saison. La veille, skieurs et entraîneurs avaient regagné le Château Lake Louise en grommelant. La météo changeante avait bousillé leurs plans pour la descente.

Gagnant du dernier entraînement, Kucera avait été particulièrement affecté, devant se contenter du 35e rang. «Je voulais montrer que je skiais bien, que ce n'était pas un coup de chance à l'entraînement. Je ne veux pas être ce genre de gars», a raconté Kucera.

Le podium de Kucera est un quatrième en trois ans pour l'équipe masculine canadienne à Lake Louise. Erik Guay avait amorcé ce qui devient presque une tradition en finissant deuxième de la descente en 2003.

Hier, le skieur de Mont-Tremblant a complété l'épreuve au septième rang à 99 centièmes de Maier, un résultat qui l'a laissé sur son appétit. La veille, il avait fini 10e de la descente. «Je ne dirais pas que je suis satisfait, mais c'est quand même un bon départ, a évalué Guay. J'ai connu de bonnes sections, mais j'ai encore perdu beaucoup de temps sur le plat et je ne sais pas pourquoi. Il faut que je règle ça.»

Au total, quatre Canadiens se sont classés parmi les 30 premiers. Le prometteur Robbie Dixon a fini 19e tandis que Manuel Osborne-Paradis a pris le 27e rang. À son première départ en vitesse en près de deux ans, Stefan Guay, frère cadet d'Erik, a réussi le 41e temps.

Alors que les hommes mettent le cap vers le Colorado aujourd'hui, la tente du cirque blanc reste plantée à Lake Louise en vue de trois épreuves féminines de vitesse le week-end prochain.