Un podium en Coupe du monde, ça ne change pas le monde. En tout cas, pas celui du fondeur Alex Harvey. Le grand espoir de l'équipe canadienne de ski de fond se prépare sereinement pour les Championnats du monde U23.

Alex Harvey n'a pas attrapé la grosse tête en montant sur la troisième marche du podium à la Coupe du monde de ski de fond de Whistler, il y a une dizaine de jours. Pas le genre de la maison. Il a plutôt attrapé un virus dans un vol entre Vancouver et Genève. Rien de grave, mais un mal de gorge l'a un peu affaibli à son arrivée en France, où il participera cette semaine aux Championnats du monde des moins de 23 ans de Praz de Lys-Sommand.

 

«Dans un avion, c'est facile de tomber malade, disait Harvey hier. L'air est recyclé, il y a du monde partout. On se lave les mains le plus possible, mais un voyage, c'est toujours ça passe ou ça casse.»

Au bout du fil, la voix est claire. Depuis deux jours, Harvey est rétabli. N'empêche, il ne devrait pas prendre le départ du 15 kilomètres style libre, demain. Il préfère se préserver pour la poursuite de 30 kilomètres, samedi.

À quelques jours du plus important rendez-vous de sa saison, le fondeur de Saint-Ferréol-les-Neiges ne semble nullement affecté par ce petit impair physique. Alors que d'autres s'inquiéteraient de forces potentiellement perdues, Harvey ne glissera mot sur son état physique qu'en fin de conversation.

«De toute façon, le 30 kilomètres, c'est vraiment la course que j'aime le plus, souligne l'athlète de 20 ans. Si je peux sauver de l'énergie en ne courant pas jeudi, ce sera ça.»

Harvey a parlé davantage de la stratégie qu'il compte employer pour la poursuite, épreuve continue comprenant un 15 km classique suivi d'un 15 km style libre.

«C'est un départ de masse, donc toujours un peu plus stratégique, note-t-il. Tu essaies de te protéger. Pas nécessairement du vent, parce qu'on ne va pas si vite. Mais ça reste quand même un avantage de suivre. Ça devrait se finir au sprint entre cinq ou six gars. Il faut donc rester bien positionné à l'avant du peloton pour être prêt à réagir, sans nécessairement être le premier.»

Un finish au pas de patin, décidé entre cinq ou six gars, ça ressemble pas mal au scénario de Whistler. Sur la future piste olympique, Harvey y avait remonté deux concurrents dans la dernière ligne droite pour gagner le bronze au sprint par équipe avec son partenaire, le vétéran George Grey.

Ce podium a pris tout le monde par surprise, y compris Harvey. «George avait déjà fini sixième avec Devon Kershaw aux Championnats du monde. Mais là, de finir troisième, personne ne s'attendait à ça. Tu espères, tu y rêves, mais à 20 ans, je ne pensais pas faire une médaille en Coupe du monde tout de suite», dit Harvey, soudainement un candidat incontournable à l'équipe olympique.

Les entrevues ont été nombreuses, mais le jeune homme à l'habitude. En tant que fils de Pierre Harvey, il répondait déjà aux questions des journalistes à l'âge de 12 ans, aux Jeux du Québec de Rimouski. «C'est bon, ça permet de continuer à populariser le sport», souligne Alex.

Grey et Harvey sont devenus les troisième et quatrième fondeurs canadiens à s'inscrire au palmarès de la Coupe du monde cette saison, du jamais vu pour l'équipe masculine. Kershaw et Ivan Babikov, un Russe naturalisé canadien au printemps, ont chacun réussi l'exploit lors du dernier Tour de ski. En 2006, Kershaw était devenu le premier fondeur canadien médaillé depuis les trois victoires de Pierre Harvey à la fin des années 80.

«À force de s'entraîner avec du bon monde, on progresse, souligne Harvey. Les succès de Devon, ça pousse, ça stimule les autres. L'arrivée d'Ivan renforce encore plus l'équipe.»

Ralenti par un problème d'irrigation sanguine à une jambe, Harvey avait néanmoins gagné une médaille d'argent et fini deux fois quatrième aux derniers Mondiaux juniors. À son premier essai chez les U23, il visait à l'origine une place parmi les 10 premiers, «peut-être» un top cinq. Après son succès à la Coupe du monde, il s'autorise à rayer le peut-être.