« On sait qu’Arber est bon offensivement. Mais pour jouer à cette position-là, il faut être capable de défendre. »

En s’exprimant ainsi à une semaine du début de la saison, Martin St-Louis avait été assez clair sur ses attentes à l’endroit d’Arber Xhekaj. Quelque deux mois plus tard, force est de constater que le défenseur n’a pas réussi à progresser comme son entraîneur l’aurait voulu.

Mardi matin, il s’est entraîné avec le Rocket de Laval, au lendemain de la première rétrogradation de sa carrière.

En principe, céder un joueur de 22 ans aux ligues mineures n’est pas un évènement. Mais pour Xhekaj, c’est un coup dur. Le grand gaillard a fait le saut directement des rangs juniors à la LNH, la saison dernière, et n’a pas peiné à garder sa place au camp cette saison.

Il n’en menait franchement pas large, mardi, dans le vestiaire du Rocket. Il assure qu’il n’a jamais rien tenu pour acquis à Montréal. Il n’empêche que la décision de la direction, qui ne lui a été transmise que lundi, l’a pris par surprise.

L’objectif de ce stage à Laval est clair : « Ils veulent que je bâtisse mon jeu défensif. »

Ce mandat n’a rien pour effrayer Jean-François Houle, entraîneur-chef du Rocket. Les défenseurs à caractère offensif éprouvent régulièrement des problèmes à leur arrivée dans les rangs professionnels, a-t-il fait remarquer. Leurs lacunes les plus courantes ? Leur jeu dans leur territoire, l’utilisation de leur bâton, leur positionnement… Autant d’éléments qui font défaut chez Xhekaj.

Son cas n’est pas unique, a insisté Houle. Logan Mailloux, William Trudeau et Mattias Norlinder sont dans le même bateau. Justin Barron est passé par là.

« Au cours des dernières années, le seul défenseur qui est arrivé [à Laval] avec un côté défensif, c’est Jayden Struble. On le voit à sa manière d’utiliser son bâton, à son jeu physique. Mais ce n’était pas un gars offensif à l’université. »

Même si St-Louis a affirmé que l’émergence de Struble n’est « pas reliée » au sort de Xhekaj, il est difficile de les dissocier totalement. Après que Xhekaj s’est blessé au « haut du corps » à la mi-novembre, Struble, dont c’est la première saison chez les professionnels, a très bien paru avec le Canadien, dans un rôle similaire à celui du numéro 72.

Avec le retour prochain de David Savard dans la formation, on peut s’attendre à ce que Norlinder retourne à Laval et que Struble demeure à Montréal. Jean-François Houle assure par ailleurs n’avoir été informé d’aucune « échéance » pour la remise de Xhekaj sur le droit chemin.

PHOTO AARON DOSTER, ARCHIVES USA TODAY SPORTS, FOURNIE PAR REUTERS CON

Eric Robinson (50) et Jayden Struble (47)

« On va travailler pour qu’il puisse retourner dans la LNH », a-t-il simplement dit.

À l’entraînement du Tricolore, à Brossard, Martin St-Louis n’a pas semblé très entiché de l’idée de discuter de la situation. « Ça fait partie de son cheminement », a-t-il succinctement affirmé au sujet de Xhekaj.

Régression

On peut être plus ou moins surpris du renvoi de Xhekaj, mais il est manifeste que ses performances cette saison étaient en régression, et pas seulement en défense.

En 17 rencontres, il a été limité à un but et deux mentions d’aide. Il a perdu sa place sur la deuxième vague d’avantage numérique. Son temps de glace a diminué par rapport à l’an dernier, et ce, en dépit du départ du vétéran Joel Edmundson pour Washington.

Une rare constante dans son jeu a été son indiscipline. Au moment de se blesser, il menait la LNH pour les pénalités mineures (11).

À voir l’absence totale d’étonnement chez Jean-François Houle à l’évocation de ce dernier aspect, on comprendra qu’il était inclus dans les correctifs attendus par la direction du CH.

« On compose justement avec ça [chez le Rocket], a noté le pilote. Il faut être plus disciplinés, surtout à 200 pieds de notre filet. » Récemment, l’attaquant Xavier Simoneau a été laissé de côté après avoir écopé d’une mauvaise pénalité. Si Arber Xhekaj se rend coupable d’une faute semblable, « on va le traiter comme tout le monde ».

L’Ontarien pourrait être rapidement « testé » dans la Ligue américaine. Dès ce mercredi, avec la visite des Senators de Belleville, il ne serait pas surprenant que le dur à cuire québécois Boko Imama défie le farouche bagarreur.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Arber Xhekaj lors d’une bagarre contre Tanner Jeannot

« Je ne pense pas que le Canadien veuille qu’il sorte de sa blessure pour venir se battre ici contre des goons, a estimé le vétéran défenseur Tobie Paquette-Bisson. Il aura peut-être une cible sur le dos pour quelques jours, mais il devrait être capable de se défendre. »

« Il va être correct, c’est certain », a ajouté en souriant le défenseur Logan Mailloux, qui s’est rapproché de Xhekaj l’été dernier.

Le principal concerné a pour sa part maintenu qu’il ne souhaitait « pas changer » sa manière de jouer. Or, même s’il est conscient que « des gars voudront se faire un nom », « [se] battre contre n’importe qui ne va pas [le] ramener en haut ».

Pour relever le défi défensif qui lui est lancé, il faudra qu’il passe le plus de temps possible sur la glace, pas au banc des pénalités.

« À Montréal, je ne disputais pas beaucoup de minutes, alors c’était dur pour moi de me mettre en valeur, a-t-il dit. Ici, si j’ai plus de minutes, je pourrai peut-être montrer davantage ce dont je suis capable. »