En début de soirée, Jake Allen recevait la coupe Molson. Environ 20 minutes plus tard, il se retrouvait sur le tabouret du réserviste, une casquette sur la tête.

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Si on a besoin de résumer ce qui est arrivé au Canadien en ce froid mardi soir au Centre Bell, c’est à peu près ça : c’est passé de festif à pas du tout festif bien assez vite, le temps d’une mauvaise sortie de la part du gardien partant.

Ça explique en grande partie cette victoire assez facile du Lightning de Tampa Bay, par la marque de 5-3. Après 13 minutes et 50 secondes de jeu, et après 4 buts sur seulement 9 tirs, l’affaire était déjà entendue, et Allen était sur le banc.

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Le cinquième et dernier but de Tampa Bay.

Par contre, il n’était pas dans le vestiaire en fin de match, le Canadien ayant pris la décision de ne pas le rendre disponible aux membres des médias.

« Quand tu accordes un but sur la première présence du match encore… on a une équipe fragile, on a perdu un peu de confiance, a admis Martin St-Louis après le match. C’est pas mal ça qui résume la première période. Mais on s’est retrouvés un petit peu ensuite… »

Un peu plus tard, l’entraîneur du Canadien a expliqué que ce qui est arrivé, c’est « pas nécessairement la faute à Jake », mais il est difficile d’omettre qu’Allen affichait un taux d’arrêts de ,927 en début de soirée, et qu’au moment de quitter, ce taux avait chuté comme une mauvaise journée à la bourse, pour passer à ,910.

Jordan Harris, lui, a blâmé un mauvais départ dans son ensemble. « Même s’ils avaient joué la veille, a noté le défenseur au sujet des joueurs du Lightning. On sait le genre d’attaque qu’ils ont, si on avait pu les ralentir en partant pour bien amorcer le match… mais ils ont connu un bon départ. »

Mais peut-être que tout ça était à prévoir ? Après tout, le Canadien avait sans doute un peu trompé la réalité en ce début de saison, pour une foule de raisons, et en premier les gardiens. Surtout Allen lui-même, qui a souvent offert des performances inespérées. Ces bonnes soirées devant le filet ont permis de masquer pendant un bout les carences défensives de cette équipe. Évidemment que ça n’allait pas durer.

David Savard absent, les autres ont dû camper des rôles différents, et Mike Matheson, entre autres, s’est trouvé à tenir un rôle sans doute trop exigeant pour son propre bien. Il a été sur la glace à quatre reprises samedi à St-Louis quand l’adversaire a marqué, et mardi soir, il a été sur la glace lors de quatre buts ennemis, encore.

Mike Matheson n’a pas été rendu disponible par le Canadien en fin de soirée, alors Martin St-Louis a dû parler à sa place.

« Il serait le premier à le dire, il ne joue pas selon ses standards présentement, a expliqué le pilote montréalais. Chaque joueur qui joue autant que lui va vivre quelque chose de similaire dans une saison. On sait ce qu’il peut amener à l’équipe, je sais qu’il cherche à nous amener ça aussi, à nous offrir du meilleur rendement, et on va continuer à l’aider, parce qu’on a besoin du joueur qu’il est capable d’être. Mais c’est difficile de faire ça pendant 82 matchs… »

Ce qui est difficile, aussi, c’est de gagner dans l’indiscipline, et à deux reprises mardi soir, quand le Canadien tentait de remonter la côte après avoir réduit l’écart à deux buts, il y a eu des mauvaises pénalités, dont celle à Arber Xhekaj. « J’ai pas aimé cette punition-là… on ne se donne pas de chance quand on écope de punitions comme ça », a résumé Martin St-Louis.

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Combat entre Arber Xhekaj et Tanner Jeannot

Enfin, les livres d’histoire retiendront qu’en ce 7 novembre 2023, le Canadien a été vaincu par un certain Matt Tomkins, gardien de son état, à l’âge vénérable de 29 ans. Il s’est offert sa première victoire à vie dans la LNH, à son troisième départ. Un gars qui a joué un peu partout, dont les deux saisons précédentes en Suède. C’est contre lui que le Canadien a perdu.

Un club en reconstruction, ça ressemble pas mal à ça.

En hausse : Samuel Montembeault

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Steven Stamkos et Samuel Montembeault

Il s’est amené en relève à Jake Allen, et quelques gros arrêts de sa part ont au moins permis de ralentir les ardeurs du Lightning.

En baisse : Jake Allen

De telles soirées nous rappellent qu’il est préférable de l’employer à l’occasion, avec parcimonie.

Le chiffre du match : - 3

C’est le différentiel de Mike Matheson lors du match de mardi soir.

Dans le détail

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Matt Tomkins (90)

Une victoire inspirée de Roy et de Price

Si Matt Tomkins s’accroche à Tampa pendant la majeure partie de la saison, attendez-vous à ce que son nom soit évoqué dans votre débit de boisson local lorsque la discussion portera sur les candidats au trophée Bill-Masterton. Le gardien du Lightning a signé mardi sa première victoire dans la Ligue nationale, à l’âge vénérable de 29 ans. Comme il aime lui-même le rappeler, Tomkins a pris « le long chemin » pour atteindre la LNH, passant quatre ans dans la NCAA, du temps dans la Ligue américaine et l’ECHL, de même que deux saisons en Suède, avant de finalement poser ses valises dans le circuit Bettman. Le respect de ses coéquipiers était palpable. Au son de la sirène, Alex Barré-Boulet a récupéré la rondelle, avant de la donner à Victor Hedman qui, lui, l’a donnée à l’entraîneur-chef Jon Cooper, qui l’a remise au vainqueur dans le vestiaire. C’est sans doute à ce moment que les journalistes massés près du vestiaire ont entendu des hurlements de joie derrière les portes. « Tous les sacrifices ont valu la peine pour se rendre ici. Il y a eu plusieurs questions en chemin. Est-ce que ce métier est pour moi ? J’ai fait plusieurs arrêts. La Suède a été une grosse partie de ça. J’y suis parti sans me douter que ça me ramènerait ici. » La victoire était particulièrement symbolique pour ce gardien qui idolâtrait Patrick Roy et Carey Price.

Matheson ne s’en sort pas

Mike Matheson connaît assurément ses moments les plus difficiles depuis son arrivée à Montréal. Celui qui a souvent pris le rôle du général de la ligne bleue du Canadien a de nouveau peiné en ce soir du 175e anniversaire de l’élection de Zachary Taylor à la présidence des États-Unis. Matheson a conclu la soirée avec un différentiel de - 3, comme il l’avait fait samedi à St. Louis. Son marquage plus ou moins étroit de Nick Paul sur le deuxième but de Tampa avait de quoi laisser songeur. Ses difficultés coïncident par ailleurs avec le match du 28 octobre, contre les Jets, quand il avait déclaré forfait après la deuxième période. Il n’a pas manqué de match, mais c’est à se demander s’il joue à 100 % de ses capacités. « Il ne joue pas à [la hauteur de] ses standards ces temps-ci, mais chaque joueur qui joue autant de minutes passe à travers ça dans une saison », a justifié Martin St-Louis.

Respect pour Montembeault

À la fin de la deuxième période, Samuel Montembeault est passé devant le banc du Lightning pour retraiter au vestiaire, mais pas avant qu’Alex Barré-Boulet ne donne une bonne tape d’encouragement au gardien du Canadien. Les deux comparses ont joué ensemble avec l’Armada de Blainville-Boisbriand, puis avec le Crunch de Syracuse. « On s’est revus en été, on est devenus proches », a indiqué Barré-Boulet. Parmi les rares points positifs à relever pour le CH, on note certainement la tenue de Montembeault, venu à la rescousse de Jake Allen en première période. Le Bécancourois a finalement bloqué 22 des 23 tirs des visiteurs, et il venait d’ailleurs de réaliser un bijou sur Nikita Kucherov lorsque le Lightning l’a finalement déjoué en fin de match. Mais dans les 43 minutes qui ont suivi son entrée dans le match, il a au moins permis au CH de rester dans le coup, réalisant de nombreux arrêts brillants. « Il n’y a plus de cachettes, c’est un très bon gardien dans la ligue, estime Barré-Boulet. Je le savais, j’avais joué avec. Je ne suis pas surpris de ses succès. De le voir se battre comme il l’a fait ce soir, c’est tout à son honneur. » Montembeault a profité de ce match pour resserrer l’écart qui le sépare de Jake Allen. Son efficacité est maintenant de ,902, contre ,910 pour le Néo-Brunswickois.

Guillaume Lefrançois, La Presse