La LNH dilapide chaque année 218 millions de dollars en salaires perdus à cause des blessures. Voilà ce qui ressort d'une nouvelle étude qui dresse le portrait d'une ligue coupe-gorge où plus de la moitié des joueurs sont blessés chaque saison.

«On a remarqué que, sur une période de trois ans, près des deux tiers des joueurs de la LNH ont raté des matchs parce qu'ils étaient blessés. C'est énorme, dit le chercheur principal, le neurochirurgien Michael Cusimano. Accepterait-on ça dans notre milieu de travail à nous? J'en doute.»

L'étude en question a été menée par des chercheurs de l'hôpital St. Michael's, à Toronto. Les auteurs ont répertorié les blessures subies par les joueurs de la LNH dans les trois dernières saisons. Leur but? Calculer combien d'argent les blessures faisaient perdre à la LNH.

Lorsqu'un joueur est blessé, dans la grande majorité des cas, son salaire est pris en charge par son équipe, parfois par les assureurs.

De 2009 à 2012, pendant 3 saisons, les blessures ont ainsi coûté 653 millions en salaires perdus. Pendant cette période, 63% des 1307 joueurs ont manqué au moins un match à cause d'un événement survenu sur la glace. Chaque année, 51% des joueurs ratent un minimum d'un match.

Selon le Dr Cusimano, ces chiffres parlent d'eux-mêmes et ce qu'ils disent est limpide: il y a trop de violence dans la LNH. En réalisant cette étude, le médecin espère convaincre la Ligue d'apporter des changements à ses règlements. «Souvent, la Ligue dit que d'altérer le spectacle lui ferait perdre de l'argent, indique-t-il. Mais en fait, la nature même du spectacle actuel fait des dizaines de blessés et fait perdre beaucoup d'argent à la Ligue en pertes de salaires.»

Au-delà des considérations financières, Michael Cusimano en appelle aux considérations éthiques. «Les enfants qui jouent au hockey imitent le style de leurs "héros" de la LNH. Éthiquement, la LNH est responsable, croit-il. On le voit dans le hockey mineur où les commotions cérébrales sont un fléau.

«C'est un problème bien réel pour Hockey Canada et on voit que le nombre de jeunes qui pratiquent le hockey diminue», dit-il.

Coûteuses commotions

L'étude du DrCusimano illustre aussi à quel point les commotions cérébrales font mal à la LNH. La commotion est désormais la blessure dont la guérison est la plus longue au hockey, devant les blessures aux jambes, à l'aine, aux pieds, aux poignets, etc. En moyenne, un joueur qui subit une commotion manque 11,1 matchs; 1 fois sur 10, il rate plus de 30 rencontres.

«La commotion cérébrale, on ne met pas deux, trois jours à s'en remettre, explique le spécialiste de l'Université de Montréal Dave Ellemberg, qui n'a pas participé à l'étude. Certains athlètes qui en sont à leur deuxième commotion peuvent mettre des semaines.»

La commotion est aussi au deuxième rang des blessures les plus fréquentes dans la LNH, après celles aux jambes et aux pieds. Ça pourrait être bien davantage, estime le professeur Ellemberg. Selon lui, la moitié des commotions passent inaperçues.

«Environ 50% des joueurs n'osent pas dire à leur équipe qu'ils présentent les symptômes d'une commotion. On sait cela à cause d'entretiens anonymes avec des joueurs, dit-il. Les joueurs ont peur qu'on leur associe un stigmate, qu'on leur fasse rater des matchs, que leur valeur tombe sur le marché.»

Le neurochirurgien Michael Cusimano est en train de travailler à une autre étude sur le sport et les commotions. Il dit avoir réalisé sa dernière pour «changer les choses dans le hockey». Mais de son propre aveu, ni la LNH ni l'Association des joueurs n'y ont réagi pour l'instant.